Chapitre 2. « Quelque chose qui surpasse toute l'humanité réunie »

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~ Leah ~

— Dis, tu ne pourrais pas faire un peu plus attention, Roxane ? lui fis-je remarquer lorsque la petite fille et sa mère se furent éloignées.

Elle haussa brièvement les épaules tout en se passant une main dans ses cheveux roux d'un air gêné.

— Oh, tu me connais... C'est plus fort que moi, Maladroite est mon deuxième prénom et Malchance est mon nom de famille.

Je secouai la tête, un petit sourire sur mes lèvres, avant de laisser échapper un soupir. C'était absolument vrai, il n'y avait pas plus maladroite sur Terre que Roxane.

Sans perdre plus de temps, je choisis un endroit assez éloigné de la foule pour que ma meilleure amie réfléchisse à quel manège nous allions nous rendre en premier sans que nous gênions quiconque.

Du coin de l'œil, je m'intéressai à toutes ces attractions qui avaient bercées mon enfance et qui avaient pris un sacré coup de vieux avec le temps. Les peintures s'écaillaient à certains endroits, des décorations avaient disparues à d'autres. Il n'y avait pas que ces manèges qui s'étaient transformés au fil des années, moi aussi j'avais changé. Je n'étais plus cette enfant qui souriait à chaque instant, qui riait à gorge déployée dans les auto-tamponneuses, qui demandait à son père de monter sur ses épaules.

À présent, cette personne n'existe plus.

J'étais en train de gratter les graviers du bout de ma chaussure lorsque la main de Roxane vint me tapoter l'épaule pour attirer mon attention et me tirer de mes pensées. Interloquée, je me tournai brusquement vers elle.

— Wow... Eh bien, ça surpasse tout ce que j'avais prévu... Leah, je pense que nous allons devoir annuler notre planning et passer directement au plan B parce que la situation est devenue critique.

— Quoi ? lâchai-je machinalement tout en sentant mes sourcils se froncer. Attends un peu, Roxane, de quoi es-tu en train de parler ?

Un sourire malicieux étira lentement ses lèvres. Puis, son doigt pointa un endroit totalement à l'écart des passants.

— De ça, annonça ma meilleure amie en me montrant discrètement un jeune homme adossé à un lampadaire et qui avait son regard fixé sur nous. Sur moi.

Machinalement, mes sourcils se froncèrent en apercevant cet inconnu qui nous dévisageait sans la moindre gêne apparente. Je déglutis avec difficulté en me rendant compte que cette personne ne semblait pas le moins du monde disposée à détourner ses yeux, quand bien même il s'était rendu compte que j'avais vu son petit manège.

— Décidemment, je crois que tu as une touche avec lui, là... Il te dévore des yeux, Leah, et je dois dire que j'ai du mal à ne pas le détailler du regard de mon côté...

Bon sang, comme si j'avais bien besoin d'un admirateur dans ma vie...

Plus je le regardais, plus mon instinct me soufflait que quelque chose ne tournait pas rond. Une personne comme lui, qui attirait tous les regards, n'aurait jamais dû remarquer une personne telle que moi, qui cherchait par-dessus tout à passer inaperçue.

Malgré tous mes efforts, il me paraissait impossible de me concentrer sur un autre élément autour de moi que ses yeux. Les nombreux mètres qui nous séparaient ne m'empêchaient pas de distinguer les plus infimes détails chez lui alors que je n'aurais pas dû en être capable. Je devinais quasiment ses traits physiques avant même de les avoir aperçus distinctement. Aucun être humain normalement conçu n'aurait dû en être capable.

Tout en déglutissant avec difficulté, je parvins finalement à m'arracher à la contemplation de ce parfait inconnu. Mon regard s'était lâchement fixé sur mes chaussures mais cela ne m'empêchait pas pour autant de sentir ses yeux inquisiteurs rivés dans ma direction, en plus de ceux de Roxane qui étaient déjà suffisamment stressants en eux-mêmes. Cette pression oculaire malfaisante et le simple fait de savoir que l'on épiait les moindres de mes agissements m'oppressèrent et, avant même que je ne comprenne ce qu'il se passait, l'oxygène se retrouva étrangement bloqué en travers de ma gorge. Il ne fallut pas plus qu'une poignée de secondes pour que mon cerveau se mette à m'envoyer des signaux d'alarme.

Hypnose, tome 1, Notre Rencontre. | ✔Where stories live. Discover now