Hypnose, tome 1, Notre Rencontre. | ✔

Chapitre 10. « Des yeux bleus perçants »

~ Leah ~

Lorsque je rouvris mes yeux, tout était calme. Un silence de mort me berçait tranquillement. Je n'avais aucune idée du temps que j'avais passé en apnée sous l'eau et, malgré ça, je n'éprouvais pas le moindre besoin de remonter à la surface.

Pourquoi les jurés m'auraient-ils fait consciemment sauter du haut d'une falaise ? En quoi l'évaluation de mon don aurait quelque chose à faire là-dedans ?

Leur décision était tout simplement illogique. J'essayais de trouver une explication mais rien de tout cela n'avait de sens.

Que veulent-ils au juste ? M'humilier ?

Je n'arrivais pas à y croire, pourtant c'était l'unique hypothèse qui me paraissait être possible et ça ne me plaisait pas beaucoup. Une rage dont je n'aurais jamais deviné l'existence auparavant naquit au plus profond de mon être, surgissant brusquement de nulle part. Cette histoire de supposée « humiliation » me restait douloureusement coincée en travers de la gorge.

Quelles sont les chances pour que ce soit réellement le cas ?

Non, je ne pouvais pas les laisser faire durer ça plus longtemps. Ils n'avaient pas le droit de me faire sentir comme une moins-que-rien... enfin, j'étais la seule autorisée à me considérer de la sorte. S'il fallait se donner en spectacle pour leur prouver que je n'étais pas n'importe qui, alors j'étais prête à faire ce qui était nécessaire. J'allais leur montrer qu'il ne fallait pas se jouer de moi.

Soudain, je vis mes cheveux flotter tout autour de moi et je me rendis compte que j'avais passé suffisamment de temps sous l'eau et qu'il était temps pour moi de leur prouver que je n'étais pas une simple fillette que l'on pouvait se permettre d'humilier.

Je n'eus pas le temps d'y réfléchir plus longtemps que je remontais déjà comme une furie vers la surface et, lorsque mon crâne frôla la toute limite de l'eau, je fis basculer ma tête en arrière dans un grand geste et mes cheveux suivirent le mouvement. Ma tête resta tournée vers le plafond, où je pouvais apercevoir une lune si grosse que j'aurais presque pu la toucher rien qu'en tendant le bras. Je remplis doucement mes poumons d'oxygène tout en écoutant le bruit que faisait la cascade derrière moi. Ce son d'habitude si paisible paraissait presque angoissant à présent.

La rive n'était pas loin et, en quelques brasses, j'atteignis un endroit où j'avais pied. Puis, marchant avec le peu de détermination qui me restait, je tâchai de franchir les différentes vagues qui tentaient de me retenir prisonnière de cette eau turquoise où se réfléchissait la lumière de la lune. Je regardais loin devant moi, ne souhaitant pas me retourner et accorder un regard vers l'endroit où les examinateurs avaient vraisemblablement tenté de m'humilier.

Lorsque je posai le pied sur la rive, où une légère couche d'eau restait toujours présente, un sentiment de joie m'envahit brusquement. J'avais cru que jamais je n'arriverais à m'échapper du cauchemar que renfermait la forêt. J'aurais pu m'écrouler sur le mince filet d'eau au niveau de mes chevilles pour décompresser si j'avais pu, pourtant je voulais finir cette épreuve au plus vite et je n'allais pas gagner le moindre temps en me réjouissant sur mon sort.

Trouvons cette fichue porte.

Cette partie du paysage où je me trouvais était nettement plus éclairé que la précédente. Cette fois-ci, je pouvais enfin voir où je posais mes pieds sans avoir à plisser les yeux dans une semi-obscurité. La forêt avait complètement disparu, laissant place à une grotte humide illuminée par une gigantesque lune. Je marchais le long des parois à la fois rugueuses et lisses, ma main gauche touchant la roche rêche et mes ongles crissant contre celle-ci. Parfois, de grandes entailles apparaissaient dans la pierre, permettant de cacher efficacement une personne dans le besoin. Une légère brise vint me caresser le visage et, étrangement, à cet instant précis, je me sentais particulièrement bien, probablement plus vivante que jamais avec ces battements de cœur qui continuaient toujours de cogner contre mes tempes.