Vingt

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Quartier de Portobello
Édimbourg, Écosse
5 juillet 2022

𝓞jee

𝓙'ai une peur irrépressible du conflit, au point que mon corps tout entier le redoute. C'est une peur tenace qui me tenaille le cœur et m'empêche d'évoluer, qui chuchote d'abord pas maintenant, puis plus jamais.

C'est très difficile d'aller contre sa nature, quand bien même on sait se remettre en question. On peut questionner sa nature, mais on ne peut la défier ; elle nous poursuivra jusqu'à notre dernier souffle. Bien sûr, il faut apprendre à s'en délier, tout déconstruire, cela vient avec le temps.

Je suis montée de toutes pièces, bâtie par les principes de la société dans laquelle je vis. Une société qui vous dit d'être fort, d'être beau, de sourire, mais de ne pas en faire trop : surtout, rester dans les normes, ne pas se plaindre, savoir encaisser, encaisser jusqu'à la fin.

Je suis façonnée par mon mode de vie et mon cercle proche. Je crois en ce que je dis et j'essaie, tout du moins, de l'appliquer – non sans avoir tourné l'idée dans ma tête jusqu'à la mettre sens dessus dessous.

Polluant, c'est le terme. Trop me caractérise le mieux, trop me colle à la peau et m'empêche de vivre. Trop me pousse à trop réfléchir. C'est agréable lorsqu'il s'agit de trop rire, trop sourire. Trop est intéressant et instructif à court terme, mais encombrant à long terme. Pour soi, pour les autres aussi. Ce n'est qu'un faiseur de doutes qui bride l'estime de soi.

L'ambition, la détermination – l'obsession – sont des leviers dans ce monde capitaliste. Je crois qu'il faut redéfinir notre rapport à la productivité : ce n'est pas grave si je n'avance pas dans mes projets aussi vite que je le voudrais, ou si je ne trouve pas chaque jour l'énergie nécessaire pour le faire.

Ce n'est pas grave si je ne suis pas constamment au summum de mes capacités, si je cesse de me battre un peu, de lutter – contre moi-même, contre ce surplus d'émotions, ces penchants que je ne saisis pas encore, les choix d'un ami que je ne comprends pas, les réactions et paroles de mes proches, les inégalités dans le monde, le manque d'humanité des humains...

C'est grave, en revanche, si je laisse ces pensées limitantes piquer mon cerveau et l'envahir sans permission. Il prendra sans nul doute le moindre centième de mon énergie.

La Justesse de tes ÉmotionsWhere stories live. Discover now