23. feu d'artifices

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Je vérifie pour la vingtième fois l'horaire et le lieu de rendez-vous, alors que ça fait déjà quinze minutes que je me trouve à l'entrée du métro de la Gare de Lyon. Je suis arrivé avec une demie-heure d'avance, et je ne peux m'empêcher de me demander, toutes les cinq minutes, si je ne me suis pas trompé d'endroit ou d'heure. Pourtant, à chaque fois, le dernier texto que j'ai reçu d'Eden me livre les mêmes mots et chiffres. Gare de Lyon. Dix-neuf heure.

Et il n'est que dix-huit heure quarante huit. Alors il a encore le temps d'arriver. Mais si je stresse déjà, qu'est-ce que ça va être s'il est en retard ?

Dire que je suis fébrile serait un euphémisme, c'est à peine si je tiens sur mes jambes. J'évite de penser au reste de la soirée, parce que je n'ai aucune idée de comment les choses vont bien pouvoir se passer, et parfois, je me demande même comment on en est arrivé jusque là. Je n'ai pas beaucoup stressé cette semaine, mais je crois surtout que je ne me rendais pas compte de la situation. Toute une soirée seul avec Eden. Peut-être qu'on finira par s'entre-tuer, peut-être qu'il va encore me faire des reproches. J'ai du mal à m'imaginer passer cette soirée dans la joie et la bonne humeur. C'est sûrement mon côté pessimiste qui parasite mes pensées.

Mais en attendant, je vérifie l'heure une nouvelle fois sur mon téléphone, et je sens monter en moi ce sentiment de panique incontrôlable, qui me donne envie de me cacher loin, très loin d'ici. Il est dix-neuf heure douze et je suis toujours là, seul, à poireauter. Aucune trace d'Eden, ni de message pour me prévenir qu'il sera en retard.

Je souffle longuement, pour calmer cette douleur dans mon ventre qui obscurcit toutes mes pensées, et je baisse les yeux sur mon corps. J'ai mis trois heures à m'habiller, parce que je ne savais pas à quel point il risquait de faire froid, et au final, je me retrouve avec, sur le dos, un t-shirt blanc, une chemise kaki par dessus et un pull noir et mon bomber en guise de dernière couche. Et même comme ça, j'ai la tremblote. Mais je ne sais pas sûr que ça soit dû à la fraîcheur ambiante...

Lorsque mon téléphone affiche dix-neuf trente un, je suis tiraillé entre ce sentiment de honte d'être toujours là à attendre comme un con, et celui, beaucoup plus profond, de la colère de lui avoir fait confiance, d'avoir désiré vivre ce moment mais d'en être privé. En bref, de m'être fait avoir.

Je piétine tellement que j'ai mal aux mollets à force de rester debout, et la douleur dans mon ventre ne fait que s'accroître. Qu'est-ce que je suis censé faire ? Juste m'en aller ?

J'ai envie d'extérioriser ce que je ressens, comme je le fais souvent quand quelque chose me tracasse, mais c'est impossible. Dans une autre situation, j'aurais envoyé un message à Jonas, pour lui demander quoi faire, partir ou attendre encore un peu. Mais je n'ai parlé à personne de cette soirée avec Eden, et je ne me vois pas le faire. Je dois pendre sur moi et décider seul. Je ne vais pas attendre jusqu'à demain s'il ne vient pas. Je fais défiler une dernière fois, machinalement, le petit fil de notre conversation, c'est à dire à peine trois textos, et je souffle en fermant les yeux.

Pour que tu m'aimes encoreWhere stories live. Discover now