Chapitre 2 : Je vis.

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J'ouvre les yeux. Le voile qui me recouvre la vue met plusieurs minutes à disparaître. Je peux alors distinguer une sorte de toit au-dessus de moi, fait en branches tressées. En tournant la tête, je peux voir des murs faits de la même manière. Ma tête bourdonne et mes membres me font souffrir. Je ne comprends pas où je suis, je ne sais pas pourquoi je suis là... Je jette un œil à ma tenue : je suis habillée simplement, dans une robe de villageoise un peu trop courte. Mais... pourquoi ? Alors tout me revient subitement. L'Épreuve du Trône ... la lumière dorée ... la souffrance.

Je suis incapable de bouger. Quelqu'un s'approche, car j'entends des pas. Je m'attendais à voir apparaître n'importe qui, sauf la ... jeune fille qui se trouve sur le seuil de la cabane...Elle est musclée et me dévisage d'un air dédaigneux. Elle a des yeux... de prédatrice.

- Tu es réveillée...

Sa bouche se tord de dépit à cette constatation.

- Oui... Où suis-je ?

- Tu découvriras ça bien assez tôt. Estime-toi déjà heureuse d'être en vie.

- Je peux me lever ?

- Tu peux toujours essayer.

Elle semble me mettre au défi. Je pose mes jambes au sol et m'écroule immédiatement. Un air supérieur posé sur le visage, la jeune femme m'observe :

- Tu es courageuse. Et stupide. N'importe qui aurait pu deviner que tes jambes seraient complétement engourdies après trois jours de sommeil.

- Trois jours ?

- Pas un de plus, ni de moins.

Son ton est toujours aussi hostile.

Avant que je n'aie pu lui répondre, un sifflement retentit et un éclair rouge entre dans l'abri, passant entre les jambes de la jeune femme. Un serpent.

J'étouffe un gémissement et rampe rapidement jusqu'au fond de la cabane. Je me tasse sur le mur, tandis que le reptile se dresse devant moi, comme pour mieux m'observer. Ce n'est pas un énorme serpent, mais une seule de ses morsures pourrait tuer un être humain. Et jusqu'à preuve du contraire, je suis un être humain. Je m'apprête à tenter de m'échapper par un côté quand la voix de la femme blonde retentit :

- Ne bouge pas ! ; m'ordonne-t-elle.

Je lui réponds d'un hochement de tête, toujours morte de peur. Elle tire le morceau de bois qui retenait ses cheveux en un chignon. Une sarbacane !

Elle ramasse une fléchette sur un tas que je n'avais pas remarqué, et il en tombe une goutte qui consume immédiatement un brin d'herbe. Du poison. Elle porte l'arme à sa bouche, tandis que le serpent s'approche encore plus de moi. Si elle rate son tir, j'ai une chance sur deux de finir empoisonnée. Mais si elle ne tire pas, j'ai une chance sur deux de finir mordue par un serpent.

Sans aucune hésitation, elle souffle dans le petit tube, et le missile part à toute vitesse en sifflant. Il est précis, meurtrier. Et il atteint sa cible. J'entends un petit son sec à ma gauche, et je tourne la tête. À un centimètre de ma main git la tête du serpent rouge et noir, mort, la nuque encore fumante. Je recule, dégoûtée par son corps visqueux et ses yeux globuleux. La jeune fille s'approche de moi, mais, avant qu'elle n'ait pu dire un mot, je désigne le serpent du bout des doigts :

- Merci...pour ça.

- Crois-moi, j'aurais préféré tuer quelque chose d'autre.

Cependant, au milieu de la centaine de questions qui se bousculent dans ma tête, une seule subsiste :
- Mais qui es-tu ?

- Mon nom est Elia, et ne t'avise plus jamais de m'adresser la parole.

La jeune fille me lance un regard hargneux avant de sortir.

- Isis va venir vérifier ton état.

Elle écarte les branches, et la lumière de la lune inonde l'habitat. Puis je me retrouve seule, avec un cadavre de serpent et une odeur acide de poison et de sang. 

Valandia. T1_MauditeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant