Chapitre 9 : La chasse

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La lune vient seulement de disparaître quand Elia me réveille pour l'entrainement. Comme toujours. Depuis un mois, date à laquelle je suis arrivée au camp, elle m'apprend à combattre du matin au soir. Mais cette fois, je ne vais pas m'entraîner. Du moins... pas comme d'habitude :

- Lève-toi ! Le soleil vient de se lever, c'est le moment idéal.

- Le moment idéal ?

- Pour chasser.

Un poids tombe immédiatement dans mon ventre. Je devrai tuer. Certes, ce ne sera pas des humains... mais une vie reste une vie. Un meurtre reste un meurtre.

Cependant, je prends quand même le couteau qu'elle me tend, tandis qu'elle s'arme d'un arc. Si c'est le seul moyen de me rendre utile pour mes sauveurs, alors je le ferai.

Elia m'entraîne dans un haut pin. Nous y sommes postées depuis presque une heure, guettant le moindre mouvement. Mais rien ne bouge entre les fourrés, et seule notre respiration trouble le calme. Quand tout à coup, elle me fait signe de regarder à ma gauche. Je tourne doucement la tête. Là. Entre deux buissons, un amas de fourrure blanche s'obstine à gratter le sol. Un lapin.

- Tu sautes, tu l'attrapes et tu lui tranches la gorge.

Sous les ordres d'Elia, je resserre un peu plus mes mains moites sur le couteau qu'elle m'a donné. Le lapin n'est pas très loin, à peine un ou deux pas depuis le tronc du pin. Je devrais pouvoir l'atteindre en sautant. C'est parti. Sous les yeux impitoyables d'Elia, je me jette au pied de l'arbre. Le petit animal n'as pas le temps de réagir que déjà je l'attrape par les oreilles. Reste le plus dur. Le coup fatal.

J'approche d'une main tremblante mon poignard de la tête du lapin. J'ai l'impression qu'il me supplie de ses grands yeux apeurés. Elia ne dit pas un mot pendant que j'hésite à achever le pauvre animal. Mes mains moites et mes tremblements ont alors raison de mon poignard, qui tombe sur le sol. Me penchant pour le ramasser, je desserre involontairement ma prise sur le lapin. Erreur.

Celui-ci en profite pour se dégager et part à grands bonds. Presque aussitôt, un sifflement se fait entendre. Une flèche vient abattre ma proie, et le petit corps reste planté au sol, sa fourrure blanche se tachant d'un liquide écarlate. Elia a tiré. Elle descend de l'arbre, arc à la main, et va chercher l'animal. Pendant qu'elle le décroche brutalement de la flèche, elle me jauge du regard :

- Pitoyable...

Je sens la dureté dans sa voix. Je relève les yeux vers elle :

- Je... je veux réessayer.

- Inutile. On rentre au camp.

Je passe le reste de la journée à apprendre avec Oren les différentes plantes. Contrairement à Elia, il est bienveillant, et il parvient à me faire oublier cette partie de chasse catastrophique. :
- Tu te souviens de ces plantes ?

- Ce sont des violettes, elles sont comestibles.

Un léger sourire s'étend sur ses lèvres. Il lâche un petit rire, tout en levant les yeux au ciel :

- Non. C'est de l'aconite, la plante la plus mortelle qu'on trouve dans ces bois.

Ses yeux pétillent d'une lueur espiègle quand il lâche :

- Fais-moi penser à ne jamais t'envoyer faire la cueillette, on y passerait tous.

Il rit plus franchement et je ne peux m'empêcher de faire de même. Plus tard dans la soirée, je retrouve Isis et Oren au pied d'un grand arbre, pour le repas. Pour la première fois depuis mon arrivée, je me sens bien, je me dis que leur monde pourrait bien devenir le mien.

Valandia. T1_MauditeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant