⚘11. La barquette de fraises

319 46 32
                                    

━ 4 octobre 2019 ━

Oops! This image does not follow our content guidelines. To continue publishing, please remove it or upload a different image.

4 octobre 2019


          LA SYMPHONIE DES CIGALES ET DES GRILLONS avait été la première chose qui m'avait interpellée. Puis était venu le lac entouré de sapins verdoyants, sans oublier la place de la mairie et ses fanions colorés accrochés aux lampadaires, vestiges de la fête de la musique de cet été. Et maintenant, c'était la bâtisse cubique aux crépis immaculé qui plus je l'admirais, plus mes larmes de joie gonflaient.

C'était peut-être un peu bête, mais pour la première fois depuis un mois, j'étais de nouveau chez moi.

Les lettres et recommandés s'entassaient dans un coin de la cuisine, perchés sur le comptoir entre les livres sur la Grèce antique de ma mère et les tasses de cafés qui attendaient d'être lavées. Il y avait des toiles d'araignées sur les bibelots de mon père, mais ses statuettes égyptiennes et ses parchemins couverts de hiéroglyphes n'avaient pas perdu de leur éclat.

La maison était vide, je pouvais le sentir par l'air frais qui émanait du carrelage ou par l'absence de fredonnement. Maman devait encore être aux lycée, en train d'exposer les enjeux de la mondialisation à des Terminales peu inspirés. Et pour ce qui était de Papa, il m'avait envoyée un message, me prévenant qu'il était toujours en Égypte mais qu'il pensait à moi.

J'avais été déçue d'apprendre qu'il ne pourrait pas rentrer me voir et avais failli ne pas lui répondre, espérant que cela lui ferait les pieds. C'était peut-être égoïste de ma part et un brin exagéré, mais cela faisait un mois que je n'avais pas vu mes parents — je les avais bien appelés mais ce n'était pas pareil — et mon père préférait rester au Caire.

Des fois, je me demandais s'il ne préférait pas ses momies et ses vieilleries antiques à sa vie de famille. Si s'il avait eu la possibilité de recommencer sa vie, il aurait fait en sorte de ne jamais s'enticher de telles responsabilités. Or, malgré ses défauts et ses absences répétées, je me rappelais sans cesse que mon père nous aimait, ma mère et moi et que s'il le pouvait, il passerait chacun de ses instants à nos côtés.

Hélas, en ce début d'octobre, Papa était probablement coincé sur un chantier de fouille près de la pyramide de Gizeh, en bon archéologue qu'il était.

Maman rentra une heure plus tard alors que je flânais insoucieusement sur la terrasse près de la piscine, un bouquin à la main, la peau encore trempée de ma baignade. Je l'entendis déposer ses affaires dans la cuisine, ouvrir le réfrigérateur à la volée et soupirer en constatant qu'il n'y avait pas grand chose à manger. Puis elle repéra ma silhouette fluette qui lézardait au soleil et son visage s'illumina.

— Clélie ! Ma chérie !

Je me redressai à l'entente de mon prénom et courus me réfugier dans ses bras. Son parfum sucrée vint titiller mes narines et un sourire niais prit place sur mes lèvres. Elle me serra fort dans ses bras, me répétant ô combien je lui avais manquée et pendant ce temps-là, une boule de chaleur grandissait en moi.

LA THÉORIE DES MITOCHONDRIESWhere stories live. Discover now