Chapitre 54 / Trouver Dieu là où on ne l'attend pas

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Effectivement, le Range Rover n'était pas le plus gros véhicule du parking, ni le plus luxueux. Il était par contre, sans aucun doute, le moins extravagant. Après avoir déposé ses passagers devant le perron du château qui accueillait l'exposition, M. Duchamp alla se garer entre une Bentley bleu azur et une Maserati miroitante.

À peine sortie de la voiture, Lupita regretta de n'avoir pas pu prendre l'un de ses hoodies. Le boléro ridiculement fin qui accompagnait sa robe, ne la protégeait pas du vent vif qui soufflait ce soir-là. Aucun de ses deux chevaliers servants ne fit de remarque à ce sujet. Néanmoins,ils l'encadrèrent si bien, qu'elle se sentit aussitôt un peu moins à la merci des éléments.

— Vous êtes prête ? murmura Darius en accompagnant l'avancée de sa partenaire d'un effleurement léger de sa main dans son dos.

— Tout autant que vous, je pense, répondit Lupita en laissant cette main descendre jusqu'à sa taille, imposant l'image d'un couple uni en marche vers une soirée plaisante.

Ils marquèrent un temps d'arrêt devant la double porte ouverte qui donnait sur un large vestibule encombré de plusieurs personnes en pleine discussion. Il fallait dire que les invités étaient accueillis dans l'immense hall d'entrée par une sculpture monumentale et figurative de deux hommes en pleine érection et se tournant le dos.Le tout dans des matériaux recyclés et éclectiques.

« Ça commence bien » pensa Lupita en plaquant un sourire énigmatique sur ses lèvres, à la manière du célèbre modèle de Léonard de Vinci. C'était ça ! Ce soir, elle serait Mona-Lisa. Aussi muette et inexpressive...

— Parfait, murmura Darius en voyant l'œuvre. Un peu de scandale ne peut pas nuire à notre volonté de discrétion.

En passant près de la statue, Lupita soupira, tandis que Jung refoulait un ricanement. Darius, lui, resta de marbre. Il en avait vu d'autres et des pires. En fait, il trouva même quelque intérêt à celle-là. Il trouvait le choix du matériel intrigant.

— Ce ne sera que ce genre de choses dans toute l'exposition ? demanda Lupita avec une pointe d'appréhension.

Elle redoutait de s'ennuyer ferme si jamais les œuvres étaient toutes du même acabit.

— Non. L'artiste du vernissage est un peintre nouvellement en vogue, répondit-il en lui montrant discrètement l'affiche placardée près d'une porte latérale. Elle annonçait l'évènement, agrémentée de la reproduction d'une peinture abstraite se nourrissant de la chaleur des ocres et des rouges que d'autres peintres avaient su rendre magnifique en leur temps.

Ils pénétrèrent dans l'espace principal dédié à l'exposition qui n'était autre que l'ancienne salle de bal du château, une pièce toute en longueur et d'une largeur extravagante, aux plafonds restaurés, couverts d'angelots et d'or, et dont les murs avaient autrefois été ornés de peintures de grands maîtres. Aujourd'hui, il s'agissait de peintures d'un jeune artiste sur lequel certains pariaient pour spéculer, tandis que d'autres achetaient du bout des lèvres en espérant un jour pouvoir se targuer de l'avoir découvert à ses débuts. L'art était devenu un pari sur l'avenir.

Dès leur arrivée, Darius salua plusieurs personnes qu'il connaissait, en présentant Lupita comme « Mlle Jones, ma petite amie». Il devait bien avouer que ce patronyme anglo-saxon était bien commode en cette occasion. Par supposition, il donnait une origine étrangère à Lupita qui, tant que Deimos n'aurait rien colporté, demeurerait comme une aura mystérieuse autour de la jeune femme. Sans compter qu'elle jouait son rôle à la perfection pour le moment. Arrimée légèrement à son bras, elle demeurait souriante et riait discrètement quand cela s'avérait nécessaire. Personne ne lui posait de question directement, et c'est lui, Darius, qui répondait aux rares interrogations lancées à demi-mot, concernant leur couple.

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