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Deux jours plus tard, William, cet enfoiré, demandait à Milo pourquoi je dormais dans l'arrière boutique au juste.

Milo lui rétorqua que ce n'étaient pas ses oignons, mais je compris que je devais déguerpir fissa.

Tant pis, j'allais devoir dépenser de l'argent. Je m'en sortirais de toute façon avec la rentrée générée par la pub que j'allais tourner bientôt.

A la pause café, je comparai les offres sur Internet. Deux se distinguèrent du lot.

La première avait cet avantage d'être située tout près du garage...

L'autre demandait deux fois moins de fric. Ca me tentait bien, forcément.

A l'heure du déjeuner, je pris le bus pour le centre-ville. L'adresse me mena dans un joli quartier arboré, avec un trottoir large et clair. Un passant promenait son chien et me sourit amicalement. J'y vis un signe favorable.

Je sonnai à la porte. Quelle ne fut pas ma surprise lorsque Louka le loustic en personne m'ouvrit.

Il portait un t-shirt bleu ciel et un jean, et était pieds nus.

Je n'avais même pas encore ouvert la bouche qu'il lança, s'étouffant presque :

─ Miss Lays ?!

─ Ouais. Bonjour. Comment tu m'as reconnue ?

─ ... ton parfum.

Wah ! J'étais impressionnée.

─ Qu'est-ce que tu fous là ? s'enquit-il, sur ses gardes.

─ Je viens pour l'annonce, répondis-je du ton lent et patient qu'on utilise pour expliquer la vie à un gamin de cinq ans.

Louka semblait surpris. J'en eus rapidement l'explication :

─ En fait, je cherchais surtout un homme, me précisa Louka-mignon, l'air mal à l'aise.

─ Ah ? Je savais que tu étais gay, dis-je pour l'agacer.

Il leva les yeux au ciel.

─ Non, je ne suis pas gay, Miss Lays. Je suis tout ce qu'il y a de plus hétéro, merde !

─ Pour ma défense, ton offre ne précisait pas « un » coloc. Juste « cherche coloc ».

─ Oui, et je me trouve bien con maintenant.

─ Tu ne penses pas qu'un homme et une femme puissent vivre ensemble ?

─ Si. Pourquoi pas, j'imagine. C'est avantageux pour toi : je ne risque pas de te mater sous la douche...

Le ton était franchement cynique. Il vivait mal sa cécité, OK... eh bien, moi aussi. Ca ne m'aurait pas déplu qu'il me mate sous la douche !

Sauf que Louka ajouta :

─ Tu sais bien que tu ne m'attires pas de toute façon.

Jeu, set, et match. Je me renfrognai, boudeuse. Se prendre un énième râteau par un mec qui ne pouvait même pas me voir ! C'était dur. Pff.

─ Entre, vas-y.

Il s'écarta. Je passai devant lui, museau levé. L'appartement me sidéra. Il était immense, haut de plafond, doté de baies vitrées panoramiques (rien que ça), décoré sobrement, mais avec goût. Deux lustres en cristal et quelques larges photos en noir et blanc encadrées complétaient cette aura raffinée. Des plantes en pot étaient disséminées un peu partout, de minuscules sur des étagères, d'autres plus grandes au pied de certaines fenêtres, ou encore dans des coins.

Tout le temps du mondeWhere stories live. Discover now