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Mouse

─ T'as mis de la crème, Mouse ?

─ Nan.

─ Ca tape, cette après-midi.

─ Pas grave.

─ Mouse...

─ J'ai pas de crème solaire.

─ J'en ai moi. Dans la salle de bains du couloir. Va la chercher, s'il te plaît, je vais t'en mettre.

Grommelant, je me levai et allai chercher le tube de crème. Je le mis dans la main de Louka, qui fronça les sourcils.

─ Mets m'en, puisque tu as tant insisté pour que j'aille m'en procurer.

─ Bon, OK.

Il retira ses gants, mit de la crème dans sa main. Pour l'aider, je posai directement ses mains sur mon épaule.

Ni lui ni moi n'ajoutâmes un mot de plus. Il était si près. Il me touchait. Je me surpris à l'imaginer me renverser sur ce transat et m'embrasser avec passion. A glisser les doigts dans mes cheveux en murmurant mon prénom. Mes pensées débiles rendaient son étalage de crème plus gênant qu'il ne l'était en réalité.

─ Voilà, marmonna Louka d'un ton bourru.

─ Merci. C'est sympa.

Et il s'éloigna avec son arrosoir et ses sécateurs.

On était le lendemain de mon petit concert. Il faisait chaud. Je prenais une pause, un peu de bon temps, pour une fois, quant à Louka, il devait s'occuper de son jardin.

Un moment, derrière mes lunettes de soleil, je regardai Louka tailler les arbustes, arroser les plants de fleurs, se mettre à genoux pour désherber certains coins. Il portait un t-shirt gris, un bob, qui aurait eu l'air ridicule sur n'importe qui d'autre, et de gros gants de travail.

Puis j'ouvris mon livre et plongeai dedans.

Je n'avais pas spécialement envie de bronzer. Je n'en avais pas besoin. Je voulais juste flemmarder au soleil, et pourquoi pas piquer un somme. Les abeilles butinaient tranquillement les plans de jasmin. Je fermai les yeux.

Plus tard, je sentis une ombre qui me cachait le soleil et ouvris un œil.

─ Tiens, dit Louka.

Il me tendait un petit bouquet composé de ces lys fushia que j'avais trouvés si extraordinaires le premier jour, et de ces ravissants pivoines d'un rose si tendre qu'il en était presque blanc. Il y avait quelques autres fleurs aussi. J'admirai la concordance des couleurs, l'agencement du bouquet. On aurait dit qu'il sortait tout droit de chez un fleuriste. Je levai les yeux vers Louka. Il semblait gauche, embarrassé par son geste, comme s'il avait peur que je me moque de lui. Il était très mignon, surtout avec ce bob vissé sur le crâne.

─ Merci.

J'étais agréablement surprise. Si je m'attendais à ça. Ca faisait bien longtemps qu'un homme ne m'avait offert de fleurs. Ils avaient beau m'admirer, me couler des regards lascifs... aucun ne pensait à être attentionné, encore moins romantique, avec moi. Et de toute façon, je n'avais pas le temps d'avoir un copain. Puis le dernier n'en parlons même pas.

Je les portai à mon nez.

─ Elles sont très belles.

─ Tant mieux. C'est pour m'excuser de toutes ces vacheries que je t'ai balancées dans le passé. J'avais pas à te faire ce genre de remarques.

─ Excuses acceptées.

Louka détourna la tête. Je compris qu'il était embarrassé. A cause des " vacheries " ou à cause des fleurs ?

Tout le temps du mondeWhere stories live. Discover now