❄ Chapitre 18 (partie 2)

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Média : Eloane
Musique : La blanche hermine de Gilles Servat



Un pic de douleur me traversa le crâne. Littéralement. Je sentais mon sang battre à toute allure contre mes tempes. Sous le coup de la surprise, je me pris la tête entre les mains. Pour… je ne savais pas… essayer d’endiguer le mal peut-être ? Ou alors compresser ma tête jusqu’à en oublier mon propre nom ? J’avais sûrement dû lâcher un gémissement ou deux en même temps.

Je pensais que ça allait s’arrêter là, que la douleur allait disparaître et que je serais enfin un animal. Le problème, c’est que ce fut exactement la contraire qui se produisit.

Le mal continua à progresser dans mon mon corps, lentement, comme pour prendre tout son temps, alors que je souffrais le martyr. J’avais mal. Tout mon corps et tout mon esprit rayonnaient de souffrance. Cette même douleur qui investissait la moindre parcelle de ma peau, la moindre cellule de ma chair. Rien n'y échappait.

Il y avait aussi ce cri, à la fois si lointain et si proche de moi, qui m’étourdissait et m’écorchait les oreilles en même temps que les cordes vocales. Ce cri qui, compris-je entre deux vagues d’agonie, venait de mon être. C’était moi qui criait à m’en vider les poumons. Moi et juste moi.

Au moment où la douleur fut telle que je crus ne pas pouvoir résister plus longtemps, celle-ci commença à diminuer, peu à peu, jusqu’à se résorber complètement.

Il fallut un bon moment avant que tous les spasmes de souffrance n’arrêtent de secouer mon corps. Quand ce fut fait, je restai encore immobile quelques instants, le temps de prendre conscience de ce qui m’entourait et de mon propre corps ; et lorsque ma tête arrêta de tanguer dans tous les sens comme si on me balotait d’un endroit à un autre, je compris que j’étais étendue au sol.

J’ouvris finalement les yeux sur… rien. Tout était trouble. Je ne voyais rien. Juste des tâches de couleurs diformes. Je distinguai à peine les énormes fils des tatamis sous moi.

Mes paupières clignèrent automatiquement, plusieurs fois, jusqu’à ce que ma vue ne s’améliore enfin. Ça y est, je distinguais autre chose que des couleurs. Les formes et la profondeur s’étaient greffées à mon paysage.

— Eeeeeeh baaaaah diiiiit-dooooonc, t’eeeeees paaaaas zziiiii graaaaande queeee zzaaaa aaaaauuu fiiiinaaaal ! commenta une voix dont le zozotement ne m’était guère inconnu, malgré la déformation manifeste qu’avaient subi mes oreilles.

Le bourdonnement était toujours présent dans ma tête mais il diminuait de secondes en secondes. J’avais bon espoir de recouvrer l’audition d’ici peu de temps.

Mes muscles étaient douloureux et lever la tête vers la source du bruit me demanda beaucoup d’effort. J’y parvins cependant, à mon plus grand soulagement, pour me retrouver face-à-face avec un lutin géant. Non, pas un lutin géant, plutôt un Zéphyr géant ! Il faisait presque ma taille !

De là où j’étais, je pouvais distinguer chacune de ses tâches de rousseur, comme si ma vue avait gagné en précision et en netteté. Je voyais même les tâches de praline rose autour de sa bouche, jusqu’aux petits cristaux de sucre sur ses joues.

Je voulus crier, mais seul un petit couinement sortit de ma gueule.

Ma gueule ? Mais non voyons, j’avais une bouche, pas une gueule ! Ou plutôt, je n’avais plus de bouche mais une gueule à la place.

Je regardai tout autour de moi. Le monde me paraissait gigantesque vu d’ici.

— Oh, qu’elle est mignonne ! s’exclama un immense Théophane.

La Revanche de l'HiverWhere stories live. Discover now