Chapitre 14

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Je mange en silence essayant d'éviter de repenser à mes parents. J'ai toujours cru les revoir un jour, comme ils l'avaient promis. Mais j'étais jeune et le seul moyen pour ne pas me rendre triste était de me mentir. Des fois je me demande si je ne finirai pas par les oublier. Bien sûr c'est la chose que je redoute le plus. Mais plus je grandis, plus les moments que j'ai passés avec eux s'évaporent laissant place à de nouveaux souvenirs sans importances.

Alors que j'ai la tête plongée dans mon bol, j'entends Théo prendre une chaise et s'asseoir à côté de moi. Je n'ai sûrement pas envie de lui parler après tout à l'heure. J'ai vraiment fait un grand effort pour mettre nos discordes de côté et me concentrer sur les choses plus importantes.  Mais il ne me considère même pas comme une personne à part entière. Il m'utilise pour s'amuser et dès qu'on parle de choses sérieuses il en profite pour rappeler à quel point il me méprise. J'ai beau tenter d'être forte en réalité je ne le suis pas. J'essaie seulement de mettre en pratique les conseils qui m'ont été donnés par Leila.

- Ça va ? Reprend Théo.

Je ne lui répondrai pas, sérieux il me prend pour qui ?

Il dépose sa main sur mon bras me faisant lever la tête. Il ne me faut que quelques secondes pour que je lui enlève la main de mon bras.

- Alyssa, parle-moi. Qu'est-ce qui ne va pas ?

Je me dépêche de terminer ma soupe pour ne plus être obligé de rester dans la même pièce que lui.

Je finis alors par déposer mon bol dans l'évier et me dirige vers les escaliers, mais ce gros débile continue de me pourchasser.

- Alyssa.

Lorsqu'il arrive derrière moi, il me fait faire volte face et je me retrouve qu'à quelques centimètres de son visage. Il semble vouloir chercher la réponse en me regardant mais je baisse le regard.

- Je t'ai vue pleurer, ne prétend pas le contraire. Je veux juste que tu me dises ce qui se passe.

Ce qui se passe ? Je n'ai pas envie de parler de mes sentiments à ce pauvre débile. Pas après comment il a parlé de moi.

- Tu peux me faire confiance.

Ai-je bien entendu ce qu'il vient de dire ?

- Tu plaisantes j'espère ?

- Non, je suis sérieux.

- Lâche-moi. Dis-je sèchement.

Je le vois analyser la situation et je sais très bien qu'il se demande si je suis sérieuse mais je le suis. Alors il finit par me lâcher et je remonte dans ma chambre.

Pendant je ne sais combien de temps je suis allongée sur mon lit et à réfléchir. Ce n'est vraiment pas bon de rester seule. Je n'ai tellement rien à faire que je pense à des choses auxquelles je ne devrais même pas penser.

Lorsque je décide de me relever, je prend ma montre pour voir l'heure et je suis surprise d'apercevoir qu'il est déjà 20 heures. Cela fait plus d'une heure que les autres sont sorties et je suis coincée ici avec Théo.

J'en ai tellement marre de rester là haut que je décide de descendre prendre l'air. En arrivant en bas, Théo est allongé sur le canapé et se relève brusquement lorsque je me stop pour le regarder.

Avant qu'il n'ouvre la bouche, je sors de la maison. Je crois entendre mon prénom lorsque je ferme la porte mais je n'en suis pas sûre.  Alors que je pensais seulement prendre l'air devant, une idée me passe par la tête. Pourquoi pas aller à l'endroit où Killian m'a emmené ce matin ?

Mais je me ravise. Ce n'est pas le moment de se perdre non plus.  Alors je décide seulement de m'asseoir sur un tronc d'arbre allongé au sol.

La journée est bientôt terminée et le fait qu'Avery ne soit toujours pas rentrée commence à m'inquiéter. Et si je ne la revoyais jamais ?

J'essaie de chasser ses mauvaises pensées de mon esprit et d'essayer de ne plus penser à rien. Mais alors que je réussis presque à atteindre cet objectif, mon éternel enquiquineur vient s'asseoir à mes côtés.

Je m'apprêtais à me relever mais je suis retenue par sa main sur mon bras.

- S'il te plaît pour une fois reste. J'ai besoin d'être avec quelqu'un.

- Et bien moi je n'ai pas besoin d'être avec toi.

J'ai envie de m'éloigner le plus loin possible de lui mais quand je le regarde pour une des rares fois dans les yeux, je voie son désespoir.

Alors sans rien ajouter je reviens m'asseoir.

- Merci.

Je suis vraiment en train de faire un travail sur moi même en ce moment. Malgré tous les propos qu'il a tenus contre moi, je décide d'être meilleure que lui et de rester. Je devrais faire pareil avec Maya mais Théo et Maya ce sont deux personnes bien différentes.

Dans les premières minutes personne ne parle et je trouve ça vraiment bizarre venant de lui, alors je décide de dire :

- Je suis désolé pour Avery.

- ...et Maya. Ajoute-t-il.

- Oui et Maya. Dis-je pour lui faire plaisir.

- Je sais que tu n'es pas sincère,  Alyssa.

- Si je le suis. Enfin je le suis plus pour Avery que Maya. Avouai-je.

- Tu les connaissais avant ça ? Me demande-t-il.

- Je connaissais uniquement Maya.

- Comment ?

- C'était la fille d'une grande amie à mes parents.

- Était ? Ajoute-t-il.

- Oui, mes parents sont...morts.

Je détourne mon regard de Théo, je n'aime pas quand quelqu'un me voit faible.

-Mes parents étaient tout pour moi,  Addy, la mère de Maya a prit soin de moi lorsqu'ils ont été tirés et maintenant je n'ai plus rien. Dis-je comme si je me l'avouais enfin à moi même.

- Je comprend ce que ça fait. Tu avais quel âge ?

- 8 ans.

Je sens le regard de Théo se poser sur moi après ma réponse.

- Ça a du être tellement difficile pendant toutes ces années. Mais tu es quelqu'un de forte.

Je m'apprête à lui avouer que non, je ne suis pas forte, je suis loin d'être celle qui pense. La fille qui lui tient tête et qui n'a jamais peur. J'ai souffert toute ma jeunesse entre les critiques, les jugements des autres et le manque de mes parents. Je suis tout sauf quelqu'un de fort mais j'ai décidé de le cacher, toute ma vie je me suis cachée pour éviter les situations comme celles-ci. Je ne veux pas de la pitié des autres. Alors je mens, à tout le monde et à moi même.

Je lève le regard en sa direction et même si je voudrais à présent dire des millions de choses, je fais la seule et unique chose à laquelle je n'ai jamais pensé.
Je me jette dans ses bras.

Hffmbx.

INTRA 1 : Puisse votre sacrifice nous libérerOù les histoires vivent. Découvrez maintenant