Chapitre 61

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Kian

Pendant les jours qui suivirent, Murd et moi passâmes tout notre temps libre à étudier des copies de plans, de registres et d'inventaires. Aux repas, Dakhota utilisait diverses ruses pour nous faire parvenir des informations sous le nez des gardes. Parfois, elle optait pour un décolté plongeant et tapai la pointe de son pied sur le sol, dos à moi et face au garde, et je pouvais récupérer une feuille pliée fixée sous sa chaussure sans que le garde ne me prête attention. Ou alors elle scotchait un papier sous le plateau. Si elle avait énormément d'informations à nous transmettre, elle reprenait l'idée du tube d'aspirine dans la tarte. Murd et moi traitions chaque information, élaborions des plans et des tactiques en nous basant sur les données fournies par les Infiltrés et les connaissances de Murd. Le système de sécurité de la fondation laissait vraiment à désirer.

Nous avions très peu de temps, aussi, Murd et moi dormions peu. Chaque jour, un garde nous emmenait chacun notre tour dans une salle de bain tellement basique qu'elle ne contenait ni bouton ni pommeau de douche. L'eau tombait du plafond, déclenchée par le garde. La salle de bain n'était qu'une pièce de deux mètres cube avec une savonnette sur le sol. Je passais tant de temps enfermée que j'avais de quoi devenir claustrophobe.

Le mardi, c'est-à-dire deux jours avant la cérémonie, Nora est revenue nous voir avec quatre couturiers. Ils ont pris nos mesures sur un simple geste de la fondatrice. Par chance, en entendant le claquement de ses talons sur le sol, nous avions caché tous nos papiers sous notre oreiller.

- Est-ce une plaisanterie ?

- « Bonjour maman » aurait pu faire l'affaire. Bonjour Hélène.

- Kian.

Elle secoua la tête comme pour passer outre puis reprit :

- Dans deux jours, il y aura une cérémonie pour célébrer l'avènement de notre projet, à Roanoke.

Rien que je ne savais déjà.

- Et Samuel et toi serez sur l'estrade, bien en évidence devant les caméras pour que tous vos amis de l'ampoule sachent que vous-mêmes avez changé d'avis.

- C'est de la publicité mensongère, grognai-je en tentant d'éloigner une couturière.

- Peu importe. Ils croiront ce que nous voudrons qu'ils croient.

Tout comme ils nous avaient fait croire que l'Amérique était le seul continent à lutter, ou qu'ils n'avaient pas tué plus de la moitié de la population mondiale.

- Vous êtes pupilles de la fondation, vous êtes l'avenir. Un jour, si le voulez, vous pourriez être membres du conseil.

- Va en enfer, grinçai-je en détachant chaque syllabe. Satan attend avec impatience le retour de sa fille prodigue.

Elle secoua à nouveau la tête alors que les couturiers prenaient mes mensurations. Je détestais cette attention, je préférai retourner ramper dans la boue dehors plutôt que de me faire chouchouter ici. Lorsqu'ils furent enfin sortis, je me tournai vers Murd qui ressortait déjà toutes les notes.

- J'espère que les caméras seront braquées sur moi quand je lui donnerai un méchant coup de poing.

L'un des avantages à avoir fait échapper Hack, Charly et Silver, c'était que la fondation n'avait plus de réel moyen de pression sur moi. Je me moquais de provoquer des gardes ou de mal agir. Qu'ils me blessent ! J'étais prête à mourir dans l'explosion si je pouvais emporter les fondateurs avec moi.

Au cours de la semaine, j'avais également découvert que les Infiltrés avaient déjà réussi à convaincre certaines personnes de se rebeller contre Novus. Après l'explosion, il allait falloir que ceux qui resteraient convainquent les autres civiles que la fondation n'était plus une fatalité, et que nous pouvions lutter contre. C'était en grande partie les familles des gardes, si nous nous les mettions dans la poche, nous pouvions retourner les forces armées de la fondation contre elle-même.

Le 3eme PrénomOù les histoires vivent. Découvrez maintenant