Colombe

Chap. 49

Colombe est encerclée par ce groupe d'une dizaine d'hommes, et regarde d'un œil inquiet ses trois geôliers à genoux sur le sol. Qu'est-il en train de se passer? Qui sont ces gens? Que veulent-ils?

La jeune femme n'a pas le temps d'analyser davantage la situation qu'on vient la saisir pour ligoter ses poignets et la bâillonner à son tour. Elle se laisse faire sans trop de résistance, sachant parfaitement que ça serait inutile de tenter quoi que ce soit. Elle préfère garder ses forces et son esprit clair.

L'un des hommes ordonne alors leur mise en marche, et toute la troupe se met aussitôt en route.
En marchant, Colombe observe les trois frères plus en détails. Il y a du sang sur leurs visages et leurs vêtements. Il est évident qu'ils se sont battus, que eux ne se sont pas laissés faire, même si le résultat est le même. La jeune femme tente un moment d'interroger du regard Tristan où Jean. Mais l'aîné est empli de rage et résigné, et le benjamin se contente de fixer ses pieds, les larmes aux yeux. L'espoir ne fait visiblement plus partie de leur vocabulaire, ce qui inquiète profondément Colombe.

La marche dure plusieurs heures jusqu'à ce qu'enfin ils sortent de la forêt et arrivent à un village. La nervosité chatouille la nuque de la jeune femme. Ses pas deviennent plus lent, ralentis par l'appréhension.
En arrivant dans l'allée principale du village, des gens se mettent à sortir de chez eux et à hurler sur la foule. Non pas sûr la foule en réalité, mais sur les trois frères. On leur jette des épluchures et de la merde dessus en les injuriant, tandis que la troupe est acclamée. Colombe observe la scène avec effarement, terrorisée.
Une foule immense s'accumule peu à peu autour d'eux, et la marche s'arrête à la place principale ou toute la population vient les entourer pour assister à la suite.
Un homme monte sur l'estrade de la place et lève les bras bien hauts pour faire taire la foule qui continue de hurler à la fois d'acclamations et d'insultes.

-Après des mois de recherches, nous les avons eu!!!

Immense acclamation.
Colombe sent Urbain s'agiter comme un chien enragé à côté d'elle.

-Ces trois monstres! Ces porcs sans patrie et sans âme ont volé nos maisons et violé nos femmes en toute impunité pendant trop longtemps! Nous avons agit, et nous les avons ramenés, pour que justice soit enfin faite!

Nouvelle acclamation.

-Ils pensaient pouvoir se jouer de nous, mais ils n'avaient aucune chance face à notre détermination! Alors maintenant, nous allons les renvoyer d'où ils viennent! En Enfer!

Sous les cris assourdissants de la foule, les trois frères sont poussés sur l'estrade, tandis que Colombe reste aux pieds, juste tenue par un homme, comme si tout le monde l'avait complètement oubliée.
Mis en ligne, on arrache les vêtements des trois condamnés qui sont alors nus comme des vers. Des excréments continuent de voler vers eux, tout autant que des cris.

Tristan garde la tête haute, affrontant les événements avec dignité, tandis qu'Urbain doit être maîtrisé par plusieurs hommes pour rester en place, et que Jean sanglote comme un petit garçon.

Colombe observe la foule, et alors, elle voit certains visages de femmes avec un certain regard. Ce même regard qu'elle a elle-même parfois. Ce regarde vide d'une femme qui a souffert par la faute des hommes. Colombe comprend. Elle sait que ces quelques femmes ont été victimes de ces trois criminels, que comme elle, elles ont été violées, et regarde maintenant la justice des Hommes s'opérer. Mais toutes savent que leur mort ne les soulagera pas. Elle empêchera d'autres femmes de souffrir dans le futur, mais il est trop tard pour elles maintenant.

Colombe reporte son attention sur les frères, et alors, l'homme qui a parlé à la foule brandit un long couteau dans sa main et sans la moindre hésitation attrapé les parties génitales de Jean et les lui tranche d'un coup vif.
Le jeune homme pousse un hurlement abominable en tombant à genoux, mais il n'a pas le temps de souffrir longtemps que l'homme se positionne derrière lui et lui tranche la gorge. Le corps tombe alors inerte de l'estrade et vient s'étaler dans la boue dans une marre de sang.

Colombe a le souffle coupé, et une nausée vient la saisir à la gorge.

Alors, l'homme vient effectuer le même acte barbare sur Urbain, qui hurle plus fort, et tombe plus lourdement, mais dont la mort est tout aussi certaine.
Et finalement, lorsque le bourreau arrive au niveau de Tristan, ce dernier tourne son visage vers Colombe et lui lance un regard entendu. Un regard qui semble vouloir lui communiquer qu'il est désolé, qu'il lui demande de lui pardonner.
Lentement, Colombe hoche la tête, elle lui pardonne, et au même instant Tristan est tué à son tour...