30 : Bas les masques

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Il n'y avait, à La Bourgade, aucun bâtiment portant le rôle de tribunal. À la place, l'une des pièces de l'extravagant hôtel de ville tenait le rôle de parloir privé.
Après tout, la petite délinquance cessait vite ses exactions après une discussion posée avec le bourgmestre et son bon Taylor. Les criminels de plus grande envergure, quant à eux, quittaient La Bourgade pour ne jamais y revenir après une discussion posée avec le bourgmestre et son bon Taylor. Un tribunal était donc superflu, et pas dans le type de superflu qui plaisait au Messire.

Le parloir en lui-même était exiguë et sombre.
À la lumière tamisée par de trop épais rideaux s'ajoutait la frêle lueur de l'unique bougie que portait un guéridon d'étain. Autour du meuble, trois fauteuils fatigués patientaient dans la pénombre, rapprochés par l'étroitesse de la pièce.
Les murs, à peine distinguables, semblaient être faits d'étagères aussi serrées que les livres qu'elles soutenaient.

Témeriel s'assit sur le siège que lui désignait le Messire.
Paulin et le bourgmestre prirent également place. Leurs deux fauteuils étaient positionnés de telle sorte que le Reliquaire faisait face, seul, à ce front binaire.

« Nous vous écoutons, indiqua Messire Misères, d'une politesse froide, à son invité.

Celui-ci répondit pareillement, tourné vers Paulin et ignorant complètement le bourgmestre. Le chevalier l'écouta avec attention.
— Soit. Dans un premier temps, Sa Seigneurie vous fait part de ses plus sincères félicitations quant à votre victoire au duel. Vous êtes le premier humain à l'avoir vaincu en combat singulier.
Dans un second temps, Sa Seigneurie vous présente ses non moins sincères excuses quant à son comportement. Cela concerne à la fois l'agressivité dont il a pu faire preuve à votre égard alors que le Duel était d'ores et déjà achevé, autant que son départ précipité.
Ce dernier lui ayant empêché de clarifier avec vous certains points, je suis aujourd'hui présent pour vous donner les réponses que vous méritez, en votre qualité de vainqueur du duel.

Il marqua une pause et se permit de respirer, avant de reprendre, impassible.

— En ce qui concerne la destruction de votre village, que vous avez évoqué, et pour laquelle vous avez malencontreusement accusé Sa Seigneurie, celle-ci m'a explicitement demandé de vous retourner ses mots exacts. Je le cite donc : « Tout ceci est une odieuse machination de mon frère Ixikriss, Dernier des Cinq et Agent du Mensonge. » Il ajouta plus tard, avec les mêmes directives : « Je jure n'être en rien impliqué dans l'annihilation d'une quelconque ville depuis le Jour de la Brèche. » Fin de citation.

— Il accuse son frère ? s'intrigua Paulin.

— Tout à fait, affirma le Reliquaire. Varlok ajoute que le Dernier est en ce moment dans son fort, Solitude, et qu'il n'est aucunement prévu que ce dernier ne le quitte avant le conciliabule de la Lune de Sang d'ici une semaine.

— Pourquoi diable nous livrerait-t-il une telle information ? interrompit Messire Misères, méfiant.

— Le Second n'a pas jugé nécessaire de m'en informer. Avez-vous des questions ? J'y répondrais au nom du Second autant que faire se peut.

— A-t-il prévu une quelconque forme d'assaut punitif ? s'enquit Paulin.

Le Reliquaire leva un sourcil, intrigué.
— Que voulez-vous qu'il punisse ?

— Nous craignons que le Second ainsi que sa cadette Quatrième ne cherche à se venger de l'affront que constitue la défaite dudit Second, clarifia le bourgmestre.

Ainsi qu'il fut ÉcritWhere stories live. Discover now