#26 ~ Imprévisible

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Ambre dormait sur l'unique lit de sa cellule. Elle avait décidé de dormir, il y a quatre heures, en supposant que la nuit était arrivée, même si elle n'avait eu aucun moyen de le savoir puisque les volets étaient fermés et verrouillés.

Elle émergea en ouvrant les yeux. Elle eut une agréable surprise en voyant, allongé à côté d'elle, Artemus, souriant. Ambre en fit autant avant de se blottir contre le jeune garçon pour lequel elle avait eu le coup de foudre, à peine quelques heures auparavant.

« Tu es encore plus jolie quand tu dors » chuchota-t-il.

L'adolescente ne répondit pas. Qu'aurait-elle dit ? Elle savoura juste le compliment, l'instant présent. Un paradis imprévisible et merveilleux dans un océan de rage, de guerre et de trahisons... « Onyx peut aller se foutre en l'air autant qu'il veut avec son Anglaise, pensa Ambre. J'ai bien mieux. ». Elle n'arrivait pas à y croire. L'amour de sa vie était donc quelqu'un censé être un ennemi ? Cupidon était tellement sadique. Mais le destin tellement beau. Leur amour réciproque avait été si rapide, ils n'avaient rien dit et s'étaient enlacés dès l'entrée d'Artemus dans la cellule d'Ambre. Un amour délicieusement imprévisible.

« Artemus ? Demanda-t-elle.

- Oui ?

- Tu peux rester combien de temps cette fois ? »

L'adolescent était déjà venu 3 fois au cours de la journée précédente ; à chaque fois, il avait été limité par le temps, pour éviter de paraître suspect aux yeux de ses camarades.

« Une bonne demi-heure » déclara-t-il, la main dans les cheveux de sa douce. « Ne te préoccupe pas du temps, il passera toujours trop vite, mais il n'a plus aucune importance. »

Cette allusion au temps fit longuement réfléchir Ambre. Soudain, elle s'écria :

« On ne peut pas continuer comme ça. »

Artemus releva la tête, inquiet.

« Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Je t'aime. Tu m'aimes. Mais nous ne sommes qu'une prisonnière et son gardien, on ne peut pas rester éternellement ainsi. Dehors, la guerre continue : si Andromède gagne, ils ne te laisseront jamais m'aimer. Au contraire, si Morpheyes triomphe, c'est peut-être moi qui devrait passer te voir au parloir de la prison. Il faut qu'on trouve une solution.

- Tu sais, répliqua l'adolescent, si tu le veux je peux sortir maintenant, prendre un peu d'équipement et revenir avant midi pour te libérer ; on s'enfuira, et on vivra juste tous les deux en attendant la fin des combats. C'est possible, j'en suis sûr. Pendant que les super-lucides s'affronteront, on comptera les points, on s'embrassera, et quand tout sera fini on s'arrangera avec les vainqueurs. Ou bien, nous disparaîtrons dans la nature... »

Ambre resta un instant silencieuse devant la proposition de son copain ; il avait l'air sérieux et déterminé, malgré la difficulté d'une telle vie. Mais elle ajouta :

« À une condition.

-Laquelle ? »

Kristen se refusait de pleurer à nouveau, et pourtant elle se sentait craquer. Cela lui semblait une éternité, mais en vérité elle supposait qu'elle était enfermée ici depuis deux jours. Le premier après-midi, Artemus était venu la voir, et lui avait posé quelques questions sans se montrer très insistant. Elle n'y avait évidemment pas répondu, et elle craignait une technique psychologique du 'gentil bourreau/méchant bourreau'. Car ensuite, toutes les deux heures environ, un homme venait lui faire une piqûre. Elle avait très vite compris que c'était une puissante drogue qui l'empêchait de dormir, et donc de passer en état astral. Ils avaient tout prévu...

Mais elle était donc, depuis deux jours, complètement privée de sommeil, à lutter contre la faim, la fatigue, l'envie de pleurer ou d'appeler Artemus afin de tout lui révéler. Mais Saphir ne cédait pas. Elle avait oublié, depuis la fin de son programme il y a 3 ans, ce qu'était la souffrance psychologique. Néanmoins, les résistances utilisées par le passé se remettaient vite en place.

Mais là, c'était trop. Un surplus d'émotions, de fatigue ces derniers jours ajoutés à une trahison, un emprisonnement isolé et une privation de sommeil...

Soudain, la porte s'ouvrit. Kristen se rappela alors que cela faisait bien longtemps qu'on ne lui avait pas donné sa piqûre... Quelle ne fut pas sa surprise en voyant la silhouette d'Ambre se dessiner dans l'encadrement de la porte !

« Saphir ! s'écria cette-dernière.

- Ambre ? » répondit l'adolescente d'une faible voix.

C'est à ce moment qu'elle remarqua, juste derrière son amie, la présence d'Artemus qui déclara :

« Oh putain, ils l'ont complètement droguée... ! Je savais pas.

- Faut se grouiller de chercher les autres, s'inquiéta Ambre. Et je pense pas qu'elle puisse marcher...

- Je la prends »trancha-t-il.

Il prit Kristen et la mit sur son dos. Elle n'eut pas le temps de protester qu'elle sentit ses yeux se fermer. Le sommeil, enfin...

Après avoir vérifié que le somnifère utilisé sur ses collègues d'Andromède était toujours actif, Artemus et Ambre coururent chercher les autres prisonniers. Jade et Grenat purent alors s'occuper de Kristen, afin de l'amener jusqu'à la camionnette préparée par l'adolescent blond. Pendant ce temps, le couple partait chercher Topaze.

Le groupe s'attarda dans les salles de stock afin de voler certaines choses qui pouvaient s'avérer utiles : argent, armes, échantillons chimiques à étudier, ainsi que le peu d'affaires qu'Andromède leur avait saisi lors de leur capture. Avant de partir, Artemus sortit un briquet et commença à enflammer ce qu'ils ne pouvaient pas prendre. Mais il perçut des cris et des bruits de course ; leurs gardiens s'étaient réveillés. Il courut vers la sortie, et monta dans le véhicule in extremis.

Lorsque Jade mit en marche la camionnette, le groupe entendit des coups de feu. Mais trop tard. Ils étaient déjà loin.

Artemus, expert en conduite, prit le relais au volant, et Jade put allumer son téléphone et consulter ses messages. C'est en voyant son regard horrifié que Grenat l'interrogea sur ce qu'il se passait.

Tout en continuant à lire, le super-lucide aux yeux verts répondait :

« C'est Rubis... il n'y a pas eu d'attaque au Louvre. C'était une ruse.

- Ça on savait déjà, répondit Grenat.

- En revanche, Andromède a attaqué le QG lorsque tous les super-lucides étaient endormis, et la plupart des forces mobilisées au musée...

- Quoi ? » s'écrièrent les adolescents et Topaze. Même Artemus sembla surpris et leva un sourcil.

« Rubis était la seule éveillée... elle a réussi à se sauver avec Julie et Lead. Ils ont fui avec le métro, le train, et ont caché la petite chez ses grands-parents à Dijon. Elles sont à Chambéry depuis hier soir. »

Le groupe était tellement choqué que personne ne dit rien. Jade continua donc.

« Selon elle, Améthyste a été abattu, Iron semblait gravement blessé, et Opale aurait crié au moment où elle est partie. Les autres ont certainement été fait prisonniers. »

Le peu d'espoir qu'avait la troupe en s'évadant tombait à l'eau. Ils auraient voulu rentrer à Paris Raspail et établir un plan, continuer le combat, contre-attaquer Andromède.

« On est foutus, murmura Topaze. On a perdu ; on est seuls. Morpheyes n'existe plus ».

Le Monde des Rêves  (Terminé)(V1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant