Part 6

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Je crois qu’à cet instant mon cerveau ne fonctionnait plus. Je pensais juste que j’allais le tuer pour l’empêcher de recommencer. Je remontais rageusement les escaliers et ouvrait violemment la porte. Il était toujours couché sur le lit et dès que j’entrais, il se releva. Il allait foncer sur moi quand je sortis le couteau. Il se figea et resta sur place. Mon air déterminé l’avait convaincu de ne pas trop insister. Et je crois qu’à cet instant qu’il avait foncé, j’aurai enfoncé le couteau tellement la haine m’aveuglait
- viens, commençais-je en criant fort. Viens, approche un peu que je te tue.
Il a mis un doigt sur la bouche pour me demander de me taire, mais je criais encore plus fort. Je m’approchais de lui, le couteau toujours à la main et en criant fort et il reculait. Il était encore nu.
- Salopard, imbécile, tu n’as même pas honte d’essayer de me violer. Tu es un moins que rien. walay, je le jure sur ce que j’ai de plus chère, si tu ose encore lever la main sur moi, je te tue et j’irai dormir en prison. Touche-moi et tu verras. Vas y touche moi et tu verras
Il essaya de récupérer le couteau et je fis un mouvement qui lui taillada l’avant bras droit et le sang se mit à couler. A ce moment je pris peur et laissai tomber le couteau. Il en profita pour me donner un coup de poing qui m’envoya cogner le mur. Je retombais lourdement et c’est à ce moment que j’entendis le cri de maman. Elle se tenait devant la porte et regardais la scène complètement affolé.
Mais qu’est ce qui se passe ici ? cria-t-elle paniqué, son regard allant de tonton Farah à moi.
- cette salope a essayé de me tuer.
- c’est lui qui voulais me violer criais je à mon tour.
Je me relevais difficilement car mes côtes me faisaient mal.
Maman se figea et regarda fixement tonton Farah
- ce n’est pas vrai.. Elle est venue me provoquer jusqu’ici dit il en cherchant de quoi se couvrir le corps.
Maman ramassait la serviette et le lui jeta à la figure, puis se tourna vers moi et me lança sur un air menaçante :
- sors d’ici tout de suite.
Je sortis rapidement et manquait de faire tomber tata Sophie qui avait l’oreille collée à la porte. Je courus m’enfermer dans ma chambre et j’entendais les cris de maman dans la chambre. Je tremblais encore de tous mes membres et en me touchant la lèvre, je vis qu’elle saignait. Je n’avais pas les idées très claires et finalement je me couchais sur le lit et ne me demandez pas comme j’ai fait mais je me suis endormis presque sur le champ en priant de ne plus me réveiller. Mais je me réveillais en fin d’après midi et il régnait un silence inquiétant dans la maison. Je n’osais pas sortir et je me mis à réfléchir sur ma situation. Je ne sais pas ce que Tonton Farah va raconter à maman et c’est à cet instant que je compris que je n’avais personne. Si elle me demandait de quitter sa maison, ou irais je ? Mes parents n’étaient pas la et la famille qui était à Dakar me considérait comme une paria car j’avais fait des études et donc j’étais différents d’eux. Toute ma vie je n’ai connut que maman Fanta. Elle était toute ma famille. Je me sentais vraiment perdu et d’un coup je me sentis sale et je me levais pour aller me laver.
L’image que me renvoyait le miroir me fit peur. Avec ma peau très claire, j’avais des marques de doigts rouges sur le cou, ma joue gauche était enflé et toute rouge. J’avais des marques rouges partout sur le corps en plus de cette douleur à chaque fois que je respirais. Je pris une douche frénétique en appuyant sur toutes les parties que ce salaud avait touchées. Je pleurais de dépit et de rage. Je laissais ma chasse d’eau couler de la pointe des cheveux jusqu’au bout de mes orteils. Je restais ainsi pendant très longtemps et finalement je sortis en pleurant. Je trouvais maman dans ma chambre immobile, avec un regard noir. Je ne savais pas quoi faire et je restais debout la tête baissée. Finalement, elle se leva et me demanda d’un ton ferme de la rejoindre dans sa chambre quand j’aurais fini de m’habiller. Ce furent, je crois, les minutes les plus longues de mon existence. Toutes sortes de pensées me venaient à la tête et quand j’ouvris la porte je sus que ca n’allais pas être facile
- maman, je suis la, commençais je doucement en me tordant les doigts.
- qu’est ce qui s’est passé avec Farah ? demanda t’elle sans me regarder
Je lui expliquais exactement comment les choses se sont passées et comment, il m’a sauté dessus et a essayé de me violer. Elle m’écoutait silencieusement et avait les sourcils froncées. Je sentais qu’elle avait beaucoup de peine et ne dis rien
- demain je t’amène voir le médecin pour savoir si oui ou non, il s’est passé quelque chose entre vous. Je ne sais pas qui croire mai sache que tu m’as beaucoup surprise. Farah dis que tu lui demandais souvent de l’argent en échange de petites faveurs et que cette fois, il a refusé de te donner et tu l’as menacé avec un couteau
- non c’est pas vrai..Criais-je. J’étais ébahie par autant de mensonges. Je ne lui ai jamais demandé de l’argent
- Maman, tu me connais, tu m’as éduqué, tu sais de quoi je suis capable dis je en pleurant et en tournant son visage pour qu’elle me regarde
- oui je croyais te connaitre mais la je ne sais plus qui croire. Je veux savoir ou se situe la vérité. Après j’aviserais. Demain on va chez le médecin.
Je continuais à pleurer et finalement elle me demanda de la laisser mais avant de partir elle me rappela
- Diouldé, je ne veux pas que cette histoire s’évente. N’en parle à personne car j’ai beaucoup d’ennemis et je ne voudrais pas que ce scandale arrive à leurs oreilles
Je ne dis rien et sortis. J’étais tellement choquée par ses dernières paroles que je ne sus comment les prendre. Je restais assise sur mon lit toute la nuit incapable de bouger, incapable de dormir et avec cette vive douleur quand je respirais. Le lendemain arriva vite et maman me trouva exactement dans la même position que je m’étais assise la veille, pour me demander de me préparer. Je n’avais pas fermé l’œil de la nuit. J’allais me débarbouiller le visage et revêtit une robe en wax. Mes cheveux que j’avais mouillés la veille n’étaient pas peignés et j’attachais un foulard. Mon visage était encore tout rouge et j’avais les marques sur tout le corps. Avant de partir je l’entendis appeler le Dr Rassoul. Apparemment, elle avait pris on contact et on devait aller le trouver pour qu’il nous diligente. Cette perspective ne m’enchantait guère mais je n’avais pas le choix et je la suivis dans la voiture. Personne ne parlait et j’avais le visage collé à la vitre. Le Dr était à l’entrée de l’hôpital et nous attendais. Quand il me vit il eut un choc car il me regardait fixement. Il me regarda avec un air intrigué et se tourna vers maman pour lui demander ce qui s’est passé ?
- elle est tombé hier dans les escaliers. Mais en fait les blessures sont superficielles. Par contre je voudrais que tu m’aides à voir un gynéco pour une consultation. On n’a pas de rendez vous et c’est pourquoi je me suis dit que tu pourrais nous aider puisque c’est une urgence.
Il semblait encore plus perdu et me regarda à nouveau en fronçant les sourcils.
- ma collègue gynéco n’est pas encore la, mais en attendant, comme elle est tombé il vaut mieux que je lui fasse une petite consultation pour voir si tout va bien et lui prescrire une pommade pour les lésions. Suivez-moi
On le suivit le long des couloirs de l’hôpital et on arriva devant son bureau. Il demanda à maman de patienter le temps qu’il me consulte. J’entrais et il referma la porte. Il me demanda de m’assoir sur le lit à l’autre bout du bureau. J’enlevais mes chaussures et je m’assis. Il revint quelques secondes plus tard et se mit juste en face de moi.
- tu es vraiment tombé dans les escaliers me demanda t’il brusquement en m’observant
Je gardais la tête baissée et il la souleva pour que je le regarde. Il avait l’air préoccupé et j’ai essayé de répondre mais aucun son ne sortait de ma bouche. C’est juste les larmes qui se sont mis à couler. Il ne dit rien et commença par me prendre la tension. Il regarda les rougeurs sur mon cou et prit un air vraiment inquiet
- Diouldé, je ne sais pas comment ceci t’es arrivé mais c’est sérieux. Puisque tu ne veux rien me dire je ne peux pas te forcer à parler.
Ensuite il me demanda d’enlever la robe et posa son appareil sur mon dos en me demandant de respirer. Chaque respiration était douloureuse et finalement il me toucha les cotes. Je gémissais car la douleur était vraiment forte.
- il faut que tu fasses une radio, je crois que tu as les cotes cassées.
Il me demanda de me rhabiller et ensuite me tendis une feuille pour une radio et une ordonnance. On retrouva maman à la porte et il lui demanda de faire rapidement la radio le temps qu’il trouve sa collègue gynéco. Il nous accompagna jusqu'à la salle de radio et parla au technicien pour qu’il nous prenne rapidement en disant que c’était sa maman. Donc on ne patienta pas trop longtemps et par contre on devait attendre pour les résultats. En attendant, Dr Rassoul était revenu et nous avait amené au service de gynéco. Il y avait di monde devant le bureau, mais il frappa à la porte et entra. Il revint quelques minutes plus tard et nous expliqua que juste après la patiente, sa collègue allait nous introduire. Maman le remercia beaucoup pour la diligence et on patienta. C’était la première fois que j’allais chez le gynéco et j’appréhendais gravement. J’avais envie d’expliquer à maman j’ai été excisé et que je n’ai jamais couché avec qui que se soit, mais elle avait le visage tellement fermé que je n’osais pas. Mon cœur battait fort quand la gynéco sortit et nous appela. C’était une dame très gentille qui nous demanda de nous assoir et nous interrogea sur le motif de la consultation.
- en fait c’est ma fille. Elle a fait une mauvaise chute dans les escaliers et je me demandais si.. enfin vous savez si…comme c’est une jeune fille
Elle avait du mal à formuler sa requête et la la dame comprit.
- oui oui j’ai compris.. Mademoiselle, suivez moi.
Il y avait une table cachée par un rideau et elle me demanda de me déshabiller et de monter sur la table. J’avais vraiment peur et était complètement en panique. Depuis mon excision, c’était la première fois que j’écartais encore les cuisses et surtout que j’offrais cela au regard d’une autre personne. Je tremblais de tous mes membres et la gynéco ayant remarqué cela me parla doucement en me demandant de me calmer. Au lieu de cela, je me mis à pleurer silencieusement. Je me sentais humiliée, rabaissée. Maman qui était à coté demandai si tout allait bien et elle répondit que oui.
J’avais les cuisses serrés et qui tremblaient comme pas possible. Elle me demanda finalement de me rassoir et alla me chercher de l’eau. Elle revint et se mit à me parler en me disant qu’elle ne me ferait pas de mal et qu’elle voulait juste regarder. Je me calmais et me couchais sans arrêter de trembler. Elle écarta doucement mes cuisses et je fermais les yeux en contractant tout mon corps. Je sentis ses doigts qui touchaient cette partie et qui observais ; je l’entendis soupirer et se lever. Malgré mes yeux fermés, mes larmes continuaient à couler et elle me demanda gentiment
- tu as été excisé ma belle
J’avais une grosse boule à la gorge et je dus avaler pour pouvoir articuler un mot. J’ouvris la bouche mais je ne pus articuler aucun mot. Finalement elle me demanda de me rhabiller et de venir.
- alors, demanda maman inquiète
- votre fille a été excisé madame et il ya eu ablation du clitoris et des petites lèvres. Dit-elle en regardant maman.
C’était la première fois que j’entendais parler de ce qui m’était arrivé et je l’écoutais attentivement. Elle expliqua que mon cas n’était pas trop grave car certaines poussaient le bouchon jusqu'à recoudre l’entrée. Maman semblait tellement surprise que le médecin comprit qu’elle n’en savait rien. Elle se tourna pour me regarder mais je gardais la tête baissée.
- pour la virginité, je peux vous rassurer, elle est bien vierge et personne ne l’a jamais touché complétât elle comme si elle avait comprit que je n’étais pas tombé dans les escaliers.
Maman était encore immobile et ne disait rien. Finalement elle remerciait le docteur et on prit congé. On trouva le Dr Rassoul à la porte qui nous attendait.
- je te remercie beaucoup Rassoul. Sans toi, on aurait passé la journée ici.
- je vous en pris. Mais je viens de récupérer sa radio et c’et bien ce que je pensais. Elle a une cote brisé et je lui ai prescrit un anti inflammatoire ; dit il en lui tendant une ordonnance. Il faut qu’elle reste bien au calme et je lui donne rendez vous dans trois jours pour voir.
Elle le remercia encore tandis que je gardais le silence. Je sentais son regard mais j’avais tellement honte que je n’osais pas le regarder. Je me demandais juste ce qu’il allait penser. A l’époque je pensais que c’est uniquement les femmes enceintes qui consultent les gynécologues et donc comprenez ma gêne.
Sur le chemin du retour, maman s’arrêta à une pharmacie et acheta mes médicaments. Personne ne parlait et à un moment elle me dit juste
- pardonne-moi Diouldé, mais je devais savoir.
Je ne répondis rien et me contentais de regarder par la fenêtre.
Une fois à la maison, on trouva tonton Farah au salon. Il était assis et regardait la télévision. Tata se dirigeait vers la cuisine et moi je montais en le dépassant comme si je ne l’avais pas vu. Au bout d’un moment j’entendis les cris provenant de la chambre de maman. Je sortis et m’approcha pour comprendre ce qui se passait et j’entendis distinctement la voix de maman.
- arrête Farah, arrête… diouldé n’as couché avec qui que ce soit donc tu mens quand tu dis qu’elle le faisait avec d’autres hommes quand je voyageais. J’en ai marre de tes tromperies, de tes infidélités. Ca dure depuis trop longtemps et je supporte trop de choses
Tonton Farah parlait plus bas et je n’entendais pas ce qu’il lui disait
- arrête, ne mêle pas mon fils à tes mensonges.
Tonton Farah continuas à parler et mon cœur rata un battement. Mon Dieu il était en trin de lui parler de Malik et de moi. Que savait-il exactement ? Je me retournais et comme d’habitude manquait de faire tomber tata Sophie. Je la bousculais violemment et elle tomba lourdement. Je m’enfuis dans ma chambre et restait allongé.
Comme je m’y attendais ma clique vint me rendre visite car c’était un lundi. J’avais mis un meulfeu pour cacher mon cou et les rougeurs que j’avais sur le corps. Je me mis aussi un peu de maquillage pour mieux camoufler les choses. Mais les traces étaient toujours la et la joue était encore un peu gonflé. Coumba et Moha furent surpris et me demandèrent ce qui m’était arrivé.
- ne rigolez surtout pas, mais hier je suis tombé dans les escaliers, répondis je, en trichant la réponse de maman. J’avais le cœur en compote et j’étais profondément atteinte mais je fis comme si de rien n’était.
Ils éclatèrent de rire et ne pouvaient plus s’arrêter. Je leur expliquais que maman m’avait amené à l’hôpital et que j’avais même une côte de casser. Ils éclatèrent de plus belle en compatissant. Je souriais en les regardant mais je n’avais pas le cœur à rigoler. Ils restèrent encore quelques temps puis prirent congé. Après leur départ, je m’étais installé sur la table de la cour et je ne sentis pas le temps passé. J’étais la, immobile surement depuis des heures et c’est la présence de maman qui me fit revenir sur terre.
- tes amis sont partis ? demanda t’elle en s’installa sur la chaise à coté de moi
Je hochais la tête sans rien dire.
- je n’ai jamais su que tu as été excisée. On a du te le faire avant que je ne te récupère
- non dis je finalement. C’était l’année ou je suis partie en Guinée. Tu te souviens je suis revenue malade.
Elle me regardait comme si je racontais une histoire farfelue
- et tu ne m’a rien dit ?
- c’est maman qui a dit de ne rien te dire car tu pourrais mal le prendre et me demander de retourner vivre avec eux.
Je parlais doucement et elle n’entendait surement pas ce que je disais car elle approcha sa tête.
- ha ta maman n’aurait jamais du faire ca sans me prévenir. Je suis totalement contre ce genre de chose.
Elle continuait à parler en racontant toutes les conséquences de ce geste. Finalement elle se tut et me regarda fixement, le ton ferme
- Diouldé, tu sais que ces derniers temps j’ai subi beaucoup de choc. La relation de Rama avec un blanc, Malik qui enceinte une fille, et maintenant ca. Je ne supporterai pas un autre scandale dans la famille. Farah n’est certes pas un saint mais, même Sophie m’a dit que quand je ne suis pas, tu sors jusque tard et des hommes viennent te rendre visite. Tu savais pour Rama tu ne m’as rien dit, tu as été excisée, tu ne m’a rien dit et peut être d’autres choses que j’ignore. Elle sous entendais surement ma relation avec Malik, mais ne précisa rien.
Je voulais protester, mais je me retins en me disant que ca n’en valait pas la peine. Donc elle continua
- Dans tous les cas, je ne sais plus qui croire et je veux que tu saches que je ne veux plus de scandale dans cette maison. Ce qui s’est passé entre Farah et toi, creuse un grand trou et enterre le. Il a dit qu’il ne recommencerait plus donc c’est fini. Si jamais, tu en parles et que des personne qui ne sont pas concerné apprennent cela, je ferais ce que je n’ai pas envie de faire. J’ai un nom dans ce pays et ma réputation est en jeu à travers mon mari. J’en ai marre de recevoir des coups donc ne parles à personne de ca. .
Mon cœur battait fort dans ma poitrine. Plus que la douleur physique, ce que maman venait de me dire me fit encore plus mal. Mon Dieu, elle voulait que j’oublie ca, elle ne me croyait donc pas et accordait un sursis à tonton Farah. Elle pensait vraiment que j’étais capable d’aller tenter Tonton Farah ? Ces paroles firent l’effet d’une bombe dans ma tête et j’eus envie de crier toute ma rage. Au lieu de cela, je restais assise, la tête baissée à l’écouter.
- je pensais t’avoir bien éduqué mais apparemment j’ai failli quelque part. Tu as tes examens dans quelques semaines, prépares les et réussit haut la main. Je suis ta maman et malgré tout j t’aime, mais ma réputation compte aussi et je ne laisserai personne la détruire. Tu m’as compris ?
Je hochais simplement la tête et en ce moment je me sentis seule au monde. Vraiment seule.

Diouldé : itinéraire d'une vieWhere stories live. Discover now