Diouldé : itinéraire d'une vie

Partie 28

Le voyage a été long. Dans mon état, rester assise si longtemps était tout simplement mortelle. Heureusement que les hôtesses étaient aux petits soins, me demandant tout le temps si tout allait bien. On est arrivée au petit matin et c'est un des cousins de Demba qui est venu nous chercher à l'aéroport. On avait pleins de bagages et essentiellement des commissions pour la tante de Demba, Roughi. J'avais les pieds gonflés, le visage froissé, et j'étais surtout très fatiguée. Demba habitait un appartement dans la banlieue parisienne. J'avais l'impression que toutes les rues se ressemblaient et je me suis dit que je n'arriverais jamais à me retrouver dans cette grande ville. A notre arrivée, tata Roughi était sur le point d'aller travailler et Diaryatou était encore en train de dormir. Elle nous a bien accueillies et après avoir pris des nouvelles de tout le monde est parti travailler. J'avais vraiment besoin de dormir et heureusement que la chambre était déjà faite. L'appartement était assez spacieux et comprenait 4 chambres, une grande cuisine, un salon bien aménagé avec une vue magnifique. La chambre de Demba était grande et offrait une superbe vue sur un parc et était très lumineux. J'ai adoré.

Mais j'étais encore trop fatigué pour apprécier le décor. Après une rapide douche, j'ai appelé Rama. Avant mon départ, elle me harcelait en voulant que je vienne chez elle. Elle a supplié Demba qui lui disait que ce n'était juste pas possible. Donc, elle s'est résignée en traitant Demba de «méchant beau frère. Je l'ai donc appelé pour lui dire qu'on était bien arrivé et Demba lui a indiqué la maison. Après cela, je suis allé me coucher. J'ai dormi toute la journée et je me suis réveillée après 17 heures, mourant de faim ; c'était le bébé qui devait avoir faim car il ne cessait de bouger. J'ai trouvé tata Rougui dans la cuisine en train de chauffer des pates. Elle m'a servie un plat tout en discutant. Elle était vraiment plus gentille que je ne pensais. La dernière fois à Dakar, elle était tellement froide que je pensais que nos relations seraient compliquées. Mais les débuts étaient très bien et très cool. Elle m'a dit que Demba devait surement être sorti pour voir ses amis du quartier mais ne lui avait rien dit.

Diariya est arrivé et m'a enlacée disant qu'elle était contente de me revoir. On s'est mise à discuter tranquillement quand Demba est arrivé avec un de ses amis Akim à qui je parlais souvent. Il habitait le quartier et avec Demba, c'étaient des amis d'enfance. L'ambiance était bonne et on a tous rigolé ensemble. Sauf tata Rougui qui s'est retirée quand Demba est arrivé. Plus tard quand Akim est parti, j'ai remarqué qu'entre Demba et sa belle mère c'était la guerre froide. Non, glaciale même. Quand il a fallu lui remettre ses commissions, c'était à la limite gênant. Le dialogue se faisait par monosyllabe et vraiment se limitait au strict minimum. Il l'appelait Rougui et ne faisait aucun effort pour être aimable. Je ne le reconnaissais pas. je ne savais pas excatement ou se situait le problème et il m'avait juste parlé de l'excision de sa sœur. Mais je sentais que c'était peut être plus grave que cela.

Plus tard, au moment de dormir, j'étais assise sur le lit et Demba était derrière et me massait le ventre avec de l'huile d'amande et du karité. C'était la seule position que je pouvais prendre pour les massages, mais avec Demba et ses mains baladeuses, ça dégénérait rapidement. Donc j'avais relevé mon débardeur et il massait avec beaucoup d'application mon énorme bidon avec pleins de commentaires sur les mouvements de son bébé. A chaque épisode de massage, c'était comme s'il sentait son père et bougeait sans cesse en donnant des coups de pieds. Ça m'amusait de le voir « discuter » avec son fils comme s'il parlait avec une grande personne. Mais aujourd'hui j'avais d'autres problèmes

- Demba, l'interrompis-je alors qu'il était en plein monologue bizarre avec le bébé.

- humm

- entre toi et ta belle mère c'est juste le problème de l'excision de ta sœur ?