Assy : les caprices du destin (8)

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Les premières douleurs de l'accouchement se firent sentirent en pleine nuit. On était eu début du mois de décembre et il faisait froid. Très froid. Tout le monde était couché et elle entendait les ronflements de sa mère. Ablaye, son petit frère dormait avec ses cousins et elle ne voulait pas réveiller sa mère. Mais elle souffrait. Terriblement. Elle gémissait sourdement et se tortillait sur le lit. Vers 2 heures du matin, ne tenant, plus, elle réveilla sa mère. Cette dernière sursauta et avec ses arthroses, mit du temps à se lever. Dès qu'elle vit le visage d'Assy elle comprit, elle lui toucha le ventre et lui dit que le bébé était descendu. Elle lui fit prendre un bain avec un de ses eaux miracles, fit pleins de prières avant de réveiller sa tante.
Assy tenait à peine sur ses jambes. Les fortes douleurs faisaient qu'elle tremblait de tous ses membres. Elle savait qu'il y avait des douleurs, mais elle n'avait jamais imaginé ce degré. Elle s'accrochait à sa mère quand les contractions étaient trop intenses. Cette dernière lui disait de répéter « Ya Latif » sans arrêt et elle le faisait, pensant que ça soulagerait ses douleurs. Mais rien. Elle fut rapidement prise en charge et installé sur la fameuse « table d'accouchement ». Toute la nuit, elle soufra. D'atroces douleurs. Un moment, elle voulut mourir tellement elle avait mal. Elle demanda sa mère, mais personne ne lui permettait de la voir. Un moment, elle pleurait tellement que la sage femme lui permit de la voir un petit moment. Cette dernière s'approcha de la table, les larmes aux yeux et lui demanda d'être forte. Assy s'accrocha à son boubou, ne voulant pas qu'elle parte.
Le bébé poussa son premier cri avec les premières lueurs de l'aube. Difficilement. Elle n'avait plus la force de pousser et on appela une autre sage femme pour appuyer sur son ventre et aider le bébé à sortir. Et cela ne se fit pas sans mal. Elle eut plusieurs points de suture. Malheureusement. Mais, il naquit. Un beau garçon. costaud. Tout fripé, et criant à s'en fendre les poumons. Elle ne pouvait s'empêcher de pleurer en le voyant. Son fils. Son sang.

Plus tard, reposée et se remettant doucement, on lui ramena son enfant. Sa mère le prit d'abord avant de sourire.
- thiey...il n'a rien prit de toi. C'est le portrait craché de son père.
Assy se releva, pressé de voir. Et du se rendre à l'évidence. L'enfant là ne voulait pas être beau. Il avait tout prit de son père. La forme du visage, le beau nez, les yeux, la bouche. Tout. C'était incroyable. Elle sourit. Se souvenant de leur conversation.
- hii maman tu as raison. Omar a vraiment gagné. Mais les enfants changent. Peut être qu'en grandissant, il va me ressembler. Tiens il a les mêmes doigts que moi.
Elle souriait. Aux anges. Emue. Elle essuya furtivement les larmes qui coulaient. Des larmes de joie. Toute la famille défila dans sa chambre et le soir même, on lui permit de sortir avec son bébé puisqu'ils se portaient comme un charme. Elle avait du mal à marcher, mais elle était tellement contente d'avoir son enfant qu'elle n'y pensa presque pas. Elle appela Rama qui pleura comme une madeleine au téléphone. Regrettant de ne pas pouvoir être là pour assister à cela. Mais Assy la rassura en lui disant que tout c'était bien passé et elles restèrent des heures à discuter.
Le coup de blues vint plus tard. Quand le bébé s'était endormi, que tout le monde soit allé se coucher et que sa mère dormait. Elle pensa à Omar. Le père de son enfant. Indéniablement. Ils avaient tant de fois rêvée de ces moments. Tellement de fois, couchés dans leur lit, ils s'étaient fait des films en rigolant, lui disant qu'il se réveillerait les nuits pour lui donner le biberon et elle disant qu'il ne tiendrait pas une semaine. Il disait toujours sur le ton de la plaisanterie que son fils ainé se nommerait comme lui Seydina Omar. Et ainsi il l'appellerait junior. Elle sourit en y repensant. Et laissa couler des larmes, reniflant doucement
- arrête de pleurer Assy. Ce n'est pas bien pour toi. « sa mérète bi dafay yéke »
Elle pensait que sa mère dormait. Elle ne répondit rien.
- khana tu ne crois pas en Dieu ?
- si...
- remet tout entre ses mains.

Le jour du baptême arriva. Mère Saly avait juste prévu une cérémonie sobre pour donner un nom au bébé. Assy avait revêtu une belle tenue toute simple et avait juste attaché ses longs cheveux en un petit chignon derrière la tête. Sa cousine avait tenue à la maquiller quand même. Tonton Souleymane, le mari de sa tante, ordonna qu'on prépare un mouton pour le baptême et on devait le tuer après la cérémonie. Il avait insisté pour qu'on prévienne la famille d'Omar, mais mère Saly avait été ferme. Il n'en était pas question. Elle lui avait dit qu'elle ne voulait plus rien à voir avec cette famille. En désespoir de cause, il avait renoncé, ne comprenant pas.
Assy avait remis de l'argent à sa mère pour le lakh. C'était un minimum. La cérémonie était...pathétique. Elle avait dit à sa mère le nom qu'elle souhaitait donner à son fils. Seydina Omar Bocoum. Quand l'imam le dit tout haut, dans le petit salon de la maison, sous la présence juste d'une dizaine de personne, Assy faillit pleurer. Mais le regard de sa mère l'en dissuada. Elle tenait elle-même son bébé, ce dernier n'ayant pas de badiène. Après cela, on tua le mouton et tonton Souleymane recommanda qu'on sacrifie une partie de la viande. Comme il n'y avait pas grand monde, on prépara une petite quantité pour la maison. Et c'était tout. Et ça lui convenant parfaitement. Ou alors elle n'avait pas vraiment le choix. Ce n'était pas vraiment ce qu'elle avait espéré pour la naissance de son bébé. Elle voulait Omar à côté. Elle imaginait sa joie. Mais elle revint vite à la réalité. Elle était là, à St-louis avec sa mère pour fêter la naissance de son fils.

Bébé Seydina était un enfant relativement calme. Quand il avait le ventre rempli, il n'avait pas beaucoup de problème. La nuit, il se réveilla souvent en pleur, mais sa mère l'aidait beaucoup et parfois lui disait de se recoucher car elle s'en occupait, surtout quand elle était fatiguée. Seydina avait toujours les traits de son père, heureusement qu'il n'avait pas son teint noir. Au contraire. Il était tout clair et tellement mignon. Un vrai cœur. Tout le monde avait envie de le prendre et parfois Assy était obligé d'aller partout dans la maison pour voir laquelle de ses cousines l'avait kidnappé. Mère Saly avait commencé ses séances de massage sur le petit. Mais Assy ne supportait pas. Bébé criait tellement qu'elle en pleurait, suppliant à sa mère de laisser tomber. Mais cette dernière disait que c'était pour son bien. L'avantage c'est que juste après ces séances de massage, il dormait comme un loire et Assy en profitait aussi pour se reposer car les nuits étaient éprouvantes.
Il venait d'avoir un mois quand un jour elle reçut un coup de fil d'un numéro fixe.
- Allo Assy c'est Omar.
Sans le vouloir, son cœur se mit à battre plus fort et elle crut même défaillir. Pourquoi ressentait-elle encore ces genres de choses pour lui. Après tout ce qui venait de se passer.
- Omar, réussit-elle à articuler
- je t'appelais pour les papiers de divorce. Je voudrais en finir une bonne fois pour toute.
- haa... c'est vrai
Pff...qu'avait-elle espéré ? Qu'il l'appelait pour s'excuser. Qu'il lui dirait qu'il avait senti qu'il avait un fils. N'importe quoi.
- tu peux prendre un avocat pour défendre tes droits. Mais saches déjà que tu n'auras rien.
- je...
- j'ai déjà déposé les papiers, il faut ta présence pour finaliser les choses
- je ne veux rien Omar. Je ne prendrais pas d'avocat. Fais ce qu'il y a à faire. je...ça me va.
Il sembla perdre un peu ses moyens.
- tu es sûre ??
- heu oui... ça sera tout ?
- oui...
- ok ciao
Elle raccrocha le téléphone. Dépitée. Elle s'en foutait maintenant. Elle avait sa vie, son bébé, son petit rayon de soleil.

Les semaines passaient et Assy songeait à retourner à Dakar chercher du travail. Elle avait laissé des CV à Mme Diouf qui lui avait déposé dans plusieurs structures. Juste après son accouchement, elle avait eu des propositions mais elle avait décliné, voulant d'abord s'occuper de son bébé. Mais maintenant, Seydina avait 2 mois et l'argent qu'elle avait gardé commençait à fondre. Eh oui, s'occuper d'un bébé était assez compliqué financièrement. Il y avait les couches, le lait, les médicaments, et tout un tas de choses qu'elle voulait de qualité pour son bébé. Donc il fallait qu'elle se bouge. Mais sa mère n'était pas d'accord. Elle voulait qu'elle reste près d'elle et surtout, elle ne voulait pas que son petit fils soit loin. Elle s'était attachée, presque comme tout le monde dans la maison à ce petit bout de choux. Elle voulait bien rester à St-louis, mais on ne lui proposait que des stages non rémunérés. Elle ne pouvait se le permettre. Même pour avoir de l'expérience. Elle avait une famille à nourrir.
Elle avait à nouveau eu un contact pour un poste à pourvoir. Elle devait y aller pour un entretien et voulait faire un aller-retour rapidement. Seydina était assez autonome et prenait rarement le sein. Il préférait le biberon qui était plus consistant car il avait bon appétit. Mère Saly lui donnait toujours à manger sans respecter les heures d'intervalles comme le voulait Assy et il adorait cela. D'ailleurs, il adorait être avec sa grand-mère qui lui chantait aussi de petites berceuses pour l'aider à dormir.
Donc finalement, elle avait décidé de partir à son entretien. C'était la première fois qu'elle se séparait de son bébé et elle failli verser des larmes. Elle montra à sa mère comment faire les biberons, comment attacher les couches, quel habit il devait mettre ; cette dernière s'énerva.
- je me suis occupée de toi et de ton petit frère. Et tu es en train de m'apprendre comment tenir mon petit fils.
- mais..
- pas de mais. Pars et laisse le moi. Je ne vais pas te le tuer. « Amal sago thi sa dome bi... »
Elle éclata de rire.
- aye Maman, je te fais confiance, mais je ne me suis jamais séparé de lui.
Elle l'avait pris et déposait de petits baisers bruyants sur son front, le faisant sourire. Il était tellement mignon. Malheureusement, à chaque fois qu'elle le regardait, elle avait l'impression de revoir Omar. Oui. Malheureusement. Elle aurait voulu qu'il lui ressemble, qu'elle n'ait plus à penser à lui. Comme cela, elle pourrait s'en libérer plus facilement. Mais non. Cet enfant lui rappelait douloureusement qu'il avait un père.

Comme elle devait être à Dakar à 8heures, elle fut obligée de partir la veille au soir pour passer la nuit chez Mme Diouf. Toute la nuit, elle se tourna et se retourna sur son lit, incapable de dormir. Son bébé lui manquait trop. Elle avait cette impression d'être vraiment seule. Elle en profita pour penser à Omar. Elle aurait voulu l'oublier, mais revenir à Dakar lui rappelait beaucoup de souvenirs.
L'entretien se passa plutôt bien et Assy fit montre de professionnaliste et étala toute son aisance dans la langue de Molière. Malheureusement, ils cherchaient en plus une qui s'exprimait aussi en anglais car le cabinet avait des partenaires anglais. Elle leur dit qu'elle avait de bonnes bases et qu'elle était disposée à entreprendre des cours du soir pour se perfectionner. Le directeur apprécia fortement cette initiative et l'assurance qu'elle dégageait. Elle rentra assez satisfaite. Elle passa rapidement à Pikine voir ses anciens voisins et resta même pour manger là bas. Ensuite, elle reprit le chemin du retour, trop impatiente de revoir son petit cœur. Et elle attendit. Des semaines. Elle était sur le point de se décourager quand enfin ils l'appelèrent pour lui dire qu'elle avait été retenu , mais qu'elle devait compléter son dossier avec son diplôme de bac légalisé. Elle chercha partout, mais ne trouva pas l'original. Elle se souvint plus tard qu'elle l'avait laissé chez Omar. Dans la maison familiale. Elle l'avait rangé sur l'armoire dans une enveloppe et quand ils déménageaient, elle avait oublié de le prendre. Elle le dit à sa mère, l'air paniqué
- mais appelle-le et demande-lui de te le donner, dit sa mère tranquillement
- l'appeler ?
Elle voyait cette éventualité comme une grosse aventure. Ils ne s'étaient plus parlé depuis qu'il l'avait appelé pour le divorce. Et bizarrement depuis, elle n'avait pas eu de retour. Elle se rongea les ongles, réfléchis à une possible autre solution, avant de se résoudre à appeler, le cœur battant. Elle du essayer deux fois car elle raccrochait nerveusement avant que ça ne sonne. Finalement, elle sortit, respira un gros coup et cette fois laissa sonner, le cœur battant
- Allo...
C'était une voix féminine et un moment elle regarda le numéro pour voir si elle s'était trompée. Mais non
- Allo, je voudrais parler à Omar s'il vous plait...
- de la part de qui ?
Elle entendait glousser et en dessous elle distingua la voix rauque d'Omar
- arrête Fama, donne-moi mon téléphone, disait-il. C'est qui ?
- je ne sais pas. Aucun nom n'est affiché.
Il y eu un moment ou elle entendait des éclats de rire et d'autres petits bruits de bisous. Ensuite, le téléphone a du tomber. Assy raccrocha, perturbée, sans voix. Son Omar. Fama. Son assistance. Malgré la séparation, elle n'avait pas songé à cela. Elle rigola nerveusement. Qu'est ce qu'elle pouvait être bête. Son téléphone sonna. Il rappelait

Omar reconnut le numéro d'Assy et bouscula un peu violemment Fama
- Aie...tu me fais mal. C'est qui ?
Sans répondre, il se leva et sortit de la chambre pour composer à nouveau son numéro. Il l'avait effacé mais le reconnaissait parmi mille.
- Allo, dit-elle doucement
Pourquoi entendre sa voix lui faisait tout cet effet. Il avait l'impression de fondre et son cœur s'accéléra. Il respira un gros coup pour reprendre un peu de souffle et continua
- Allo. C'est qui ? dit-il
Il la sentait hésiter
- heu c'est moi...Assy.
- haa.
Il y eut un petit silence. Lourd. Gênant.
- salut. Excuse-moi de te déranger. Heuu...j'avais oublié mon diplôme de bac chez toi.
Il ne disait rien
- heuu quand on déménageait, je l'ai laissé dans une enveloppe sur l'armoire. Je voudrais s'il te plait la récupérer.
Il soupira.
- ok tu n'as qu'à passer le récupérer. Tu n'avais pas besoin de m'appeler pour cela
- non. S'empressa-t-elle de dire.
- quoi ? Qu'est ce que tu veux ?
Elle hésita.
- que tu le donnes au gardien de ton bureau. Je passerais le prendre.
Il gardait le silence
- s'il te plait.
- Ok. Passe demain.
- merci.

Avant qu'il n'ajoute autre chose, elle avait raccroché. Elle s'assit sur le fauteuil, regardant son téléphone. Elle semblait tellement lointaine. Il y avait toujours cette douceur dans sa voix. Elle lui manquait tellement. Il avait tellement envie de la revoir. Mais il se fit une raison. Elle allait bientôt accoucher normalement. Il ne pouvait s'empêcher de calculer, de se dire qu'elle en était à tel mois.
- c'était qui ?
Fama venait de sortir de la chambre, uniquement en sous-vêtement et vint s'assoir sur ses genoux. Elle était coquine. Très coquine. Mais il regrettait cette relation. Il l'avait débuté sous le coup de la colère. Mais c'était son assistante et depuis, elle se croyait tout permis au bureau. Et puis, il ne l'aimait pas. Il voulait, il pensait oublier Assy dans ses bras. Il avait tort. Heureusement qu'ils n'avaient pas couché ensemble. Mais ce n'était pas le refus pour elle. Mais lui ne voulait pas. Il ne se sentait pas bien avec une autre femme. Avec Kiné aussi, il n'y arrivait pas. Et il se sentait prisonnier de ces relations. Kiné avait le soutien de sa famille. Avec Fama, c'était plus compliquée. Il n'avait pas pu continuer les procédures de divorce. Il n'avait pas pu. Il avait demandé à l'avocat de sursoir à la décision et depuis c'était le statut quo.
- tu ne me réponds pas.
Il essaya de la soulever pour s'écarter, mais elle s'accrocha à lui. Il soupira.
- je crois que tu ferais mieux de partir. Je suis fatigué...dit-il doucement en évitant de le regarder.
- pourquoi j'ai l'impression qu'on n'avance pas.
- je ne veux pas qu'on avance Fama. Je suis désolé...
Elle se leva, énervée.
- je suis désolée, mais moi je ne suis pas ce genre de femme qu'on rejette comme un vieux mouchoir.
Elle entra dans la chambre et se rhabilla rageusement avant de sortir sans un regard pour lui.

Le lendemain, il remit l'enveloppe au gardien et lui dit de le remettre à sa femme quand elle viendrait. Il parut surprit, mais ne dit rien.
Toute la journée, il ne travailla pas. Il était debout devant la fenêtre à guetter Assy. Fama ne lui avait pas adressé la parole et lui aussi ne lui avait pas parlé. Il voulait demander son affectation dans une autre agence. Il y réfléchissait quand il la vit. Son cœur rata un battement. Il pensait voir une femme à terme, mais ce n'était pas ce qu'il voyait. Elle avait une petite robe droite bien ajusté et qui arrivait à peine au genou. Elle avait mis une ceinture à la taille. Non Assy n'était pas enceinte. Ou alors ne l'était plus. Elle parla rapidement au gardien et il la vit sourire. Qu'est ce qu'elle était belle. Elle avait lâché ses longs cheveux et avait un joli maquillage. Elle prit l'enveloppe et allait partir quand il se décida. Il fallait qu'il lui parle. Il se leva et se dirigea vers la sortie quand Fama lui barra le chemin
- je peux te parler...dit-elle
- pas maintenant. Je dois sortir...dit-il en essayant de la pousser de son chemin.
- Non, maintenant. S'il te plait mon chéri...
Il la regarda fermement et elle comprit et s'écarta. Mais trop tard. En sortant, Assy avait disparu. Il essaya de l'appeler mais elle ne décrocha pas et lui envoya juste un message avec un petit « merci ». Il faillit s'étrangler de rage.

Assy se dirigeait vers le siège de la société. Soulagée. Elle avait finalement récupéré son diplôme et leur amenait une copie. Tout se passait bien pour elle. Après avoir déposé, elle fut reçut par le DRH qui lui signifia qu'elle était prise pour un contrat à durée déterminé. Il lui précisa le montant de son salaire qu'elle trouva un peu bas, mais il la rassura. Elle était à l'essai pour 3 mois et si c'était concluant, elle aura une augmentation. Elle signa sur le champ et on lui demanda de commencer la semaine suivante. En attendant, elle décida de rentrer le soir même pour prévenir sa mère. En chemin, elle songea à comment elle allait s'organiser avec son bébé. Elle devait trouver un logement et s'installer. Elle ne s'imaginer pas vivre sans son fils. Mais la encore il fallait convaincre sa mère de le laisser l'amener. Et ce fut compliqué. Très compliqué. Elle devait quand même le laisser à sa mère le temps d'aller prendre service et trouver un logement. Après cela, il était convenu que sa mère viendrait un temps pour l'aider, le temps qu'elle trouve une bonne ou une bonne crèche.

La première semaine, elle s'installa chez Mme Diouf et avec l'aide de Rama, elle contacta un courtier. Ce dernier s'avéra très efficace et lui dégota un petit studio très coquet et joli. Le prix était assez raisonnable et elle décida de transformer le salon en chambre. Elle puisa sur ses économies qui prendre l'appartement. Heureusement qu'elle avait trouvé du travail car il ne lui restait plus grand-chose, mais avec son salaire et peut être une éventuelle augmentation, elle s'en sortirait. Mme Diouf se montra adorable et lui proposa du mobilier de maison car elle changeait ses meubles. Assy lui en était très reconnaissante et prit ses vieux meubles qu'elle retapa avec l'aide d'un menuisier. Le travail était très intéressant et elle s'intégra rapidement. Elle arrivait très tôt et rentrait assez tard. Elle y mettait beaucoup de cœur, s'attira la sympathie de la plupart de ses collègues et de ses supérieurs.
Pendant deux semaines, elle resta à Dakar. Sans son fils. Elle faillit devenir folle. Tous les soirs elle appelait en sa mère posait le combiné sur l'oreille du bébé. Quand ce dernier gazouillait, elle pleurait comme une madeleine, au grand dam de sa mère. Elle le sermonnait en lui disant que le bébé se portait comme un charme. Mais ça ne changeait rien. Il lui manquait. Depuis qu'elle avait parlé à Omar et savait qu'il avait tourné la page, elle avait l'impression qu'il ne lui restait que son fils. Quand elle avait commencé à travailler, elle ne manquait pas d'avance. Les hommes de la société s'étaient comme passé le mot. Mais elle se plaisait à dire qu'elle n'était pas libre et qu'elle avait un homme dans sa vie. eh oui. Seydina était l'homme de vie. Elle n'avait aucune envie d'avoir un homme dans sa vie. Non ces choses là c'était fini.

Ce weekend, elle était à St-louis pour prendre ses affaires et aussi pour récupérer son fils. Le revoir après deux semaines d'absence était une délivrance. Il avait grandi et ressemblait encore plus à son père. C'en était choquant. Non, elle ne voulait pas vivre sans lui, même si sa mère insistait pour qu'elle le lui laisse et ainsi travailler sereinement. Mais Non. Elle ne voulait pas. Finalement, elle décida d'amener sa cousine Aicha, qui adorait Seydina et le portait toujours au dos. Elle avait laissé tomber ses études et rêvait d'aller à Dakar pour faire une formation en couture. C'est elle-même qui proposa à Assy de l'amener avec elle et qu'elle l'aiderait. Assy lui promit de lui payer sa formation si elle réussissait à s'en sortir financièrement. Elle en parla à sa tante et cette dernière accepta de la laisser partir. Et le dimanche soir, Assy retourna à Dakar avec son fils, sa mère et sa cousine. A son plus grand bonheur.

Omar ne pouvait croire que personne dans la famille n'était au courant de l'accouchement d'Assy. Personne. Ça voulait dire que personne dans la famille ne s'intéressait à ce qui pouvait leur arriver. C'était quand même terrible. Et lui n'osait rien demander. Il attendait, se surprenait à épier les conversations, à appeler ses tantes pour espérer s'entendre dire que son ex à accoucher. Mais rien. Il n'entendait que des prières pour retrouver rapidement une femme digne de ce nom. Et sa mère qui la poussait dans les bras de Kiné. Toujours. Et ces derniers jours c'était son père qui s'y était mis. Mais il leur disait la même chose. Il lui fallait encore du temps. C'était trop tôt. il entendit toquer à la porte. C'était Awa.
- entre sœurette. Comment tu vas ?
Awa s'installa et ils se mirent à discuter tranquillement.
- dis-moi Omar, tu as des nouvelles d'Assy ?
Il la regarda un moment sans rien dire. Il ne voulait plus parler d'Assy car ses sœurs ne cessaient de sortir des insanités sur elle. Et ça lui faisait mal.
- pourquoi tu me poses cette question ? tu as de ses nouvelles ?
Awa secoua la tête.
- Non, mais comme tout le monde disait qu'elle était enceinte...je pensais que tu savais quelques choses.
- il ya deux mois, elle est venu à mon bureau pour récupérer un papier qu'elle avait oublié.
- elle avait accouché ?
- apparemment oui. Elle n'avait pas de ventre.
- ha...
Elle ne disait rien.
- tu lui a parlé ?
- Awa pourquoi tu me parles d'Assy comme cela subitement ?
Elle haussa les épaules.
- pour rien. Mais j'ai l'impression que tu n'es pas heureux. Peux être qu'il y a eu un malentendu entre vous. Qui sait ?
- il n'y a eut aucun malentendu Awa. On s'est séparé et elle est allée se faire enceinter par un autre. C'est tout. Maintenant arrête de me parler d'Assy ok.
Il était énervé et Awa se leva et prit congé, laissant Omar tout chamboulé. Il devait faire un voyage sur la France de quelques semaines dans le cadre du travail. Ça lui ferai du bien. Il avait introduit la demande d'affectation de Fama et normalement à son retour, elle ne devait plus être à sa place. C'était lâche, mais il n'avait pas le choix.

- Assy, je peux t'inviter à diner ?
Elle leva la tête et regarda son patron. Patrick. Ce jour là, ils devaient travailler ensemble sur un dossier. Elle avait remarqué les regards appuyés de ce dernier. Elle était là depuis 4 mois maintenant. C'était un blanc assez mignon. Brun, grand et très drôle. Ils avaient lié amitié assez vite et même s'il était son supérieur, il ne se gênait pas pour discuter avec elle librement, la mettant à l'aise et l'aidant dans son travail. Mais elle n'était pas intéresse. Pas du tout. Elle fuyait tout ce qui ressemblait à un homme.
- Patrick, ma mère est rentrée. Mon fils est seul avec ma cousine. Il faut que je rentre très tôt.
- dans ce cas invite-moi chez toi. Pourquoi tu ne veux pas que je vois ton fils.
Seydina avait 6 mois maintenant et était tout simplement adorable. Aicha s'en occupait très bien et Assy travaillait sereinement. Elle appelait quand même deux ou trois fois par jour pour voir si tout se passait bien. Et c'était toujours le cas. Le soir, elle était toujours très contente de rentrer et de retrouver son bébé. Elle lui donnait un bain, à manger avant de le border. Il dormait avec elle dans sa chambre tandis qu'Aicha dormait dans l'autre pièce. Toute sa vie tournait autour de son fils. Ses fins de mois étaient encore très justes mais elle s'en sortait. Parfois de justesse. Mais son fils ne manquait de rien. Seulement, elle était parfois obligée de se priver de manger pour boucler ses fins de mois. Mais ça ne la gênait pas. Elle faisait tout ça pour son fils. Et il n'y avait pas de place pour un homme. Un blanc de surcroit. Non.
- Patrick, une autre fois je te promets.
- tu me promets toujours, mais tu refuse toujours. Allez. Je te laisse rentrer, tu borde ton bébé et je passe te prendre plus tard. Pas plus d'une heure. Promis.
Elle hésita. Et puis ca ne lui coutait rien finalement. Même si elle ne voulait pas sortir avec un gard de son service. C'était trop compliqué. Donc encore une fois elle déclina.

Elle rentra donc et s'occupa de son fils. Comme d'habitude, il l'accueillit avec un grand sourire et en lui tendant ses bras tout potelés. Son cœur se remplissait alors de joie et débordait d'amour pour son bébé. Il était de plus en plus beau et tout simplement adorable. Ce soir Rama l'appela pour lui annoncer une grande nouvelle.
- je voulais attendre d'être à Dakar pour te le dire, mais j'arrive Samedi.
Assy se mit à crier au téléphone sa Rama arrivait dans deux jours. Elle lui manquait tellement. Et elle aussi avait tellement hâte de voir Seydina Omar.
- si tu me fais une blague, walay, je te trouve là bas pour te botter les fesses.
- mais non. Je te jure. Viens me prendre à l'aéroport et amène moi mon fils. C'est surtout pour lui que je viens.
- et moi alors ?
Elles discutèrent encore des minutes avant de raccrocher. Elle avait promis à sa mère de lui amener Seydina, mais là, elle était obligée de décommander. Sa mère comprit, même si son petit fils lui manquait terriblement.

Omar était à l'aéroport de Casablanca et attendait son vol. Il avait fait une escale par ce pays pour rencontrer un partenaire et là, il devait reprendre son vol. Il reconnut une silhouette familière. C'était Rama. Elle avait des écouteurs et semblait vivre à fond la musique qu'elle écoutait. Il lui toucha l'épaule.
- Rama...
Elle se retourna et le reconnut. Il la vit hésiter entre le saluer chaleureusement ou froidement. Et elle fit un subtil mélange des deux.
- Slt Omar. Quelle surprise ? Qu'est ce que tu fais ici ?
- je rentre. Comme toi on dirait. Je viens de Paris et j'avais une petite escale ici.
- Ok. Donc on va partager le même vol on dirait.
- bah oui.
- Ok.
Sans plus, elle remit ses écouteurs et il comprit. Elle n'avait pas l'intention de lui parler plus que cela. Et c'était tant mieux. Comme dit l'adage, qui se ressemble s'assemble. Et Rama devait être comme Assy. donc finalement, il n'avait pas vraiment envie de lui parler.

Assy était avec Patrick sur l'aire d'acceuil de l'aéroport. Seydina dormait sur son épaule et elle attendait patiemment la sortie de Rama. Elle aurait tellement voulut qu'elle le trouve réveillé. Mais elle comptait bien le réveiller quand elle sera là.
- merci Patrick de m'avoir accompagné. Et excuse-moi d'avoir gaché ton samedi.
- mais arrête de me remercier voyons. Je n'avais aucun programme. Tu avais encore refusé de diner avec moi.
Elle sourit.
- et quand tu vas arrêter de m'inviter ?
- si tu penses me décourager, tu rêves. Accepte et on verra. Tu ne veux pas me le donner ce petit trésor.
- Non c'est bon. Il risque d'avoir peur en te voyant à son réveil. Tu n'as pas vraiment la couleur qui sied.
Il éclata de rire.
- c'est bon moque-toi. Si j'étais plus coloré, tu accepterais mon invitation ?
Le cri strident d'Assy l'interrompit.
- RAMMMAAAA...
Elle démarra au quart de tour et fit rapidement le tour des barrières. Rama aussi s'était mise à courir et elles ressemblaient à deux folles qui parlaient et criaient en même temps. Seydina s'était réveillé et étonné, avait mis ses deux doigts dans sa bouche. Son petit tic.
- oh c'est mon petit chou. Viens voir maman mon cœur, dit Rama en essayant de le prendre.
Mais il refusa et s'accrocha au cou de sa mère. Cette dernière essaya encore de la convaincre d'aller voir Rama et celle-ci la prit dans ses bras et le serra, les larmes aux yeux
- oh mon petit cœur...toute la valise là, ce sont tes cadeaux.
Elle ne remarqua pas le visage d'Assy qui se décomposait lentement. Elle venait de voir Omar sortir aussi de l'aéroport et s'approchait d'eux. Son regard passait d'Assy au bébé que tenait Rama et dont le visage était tourné de son côté. Assy paniqua un moment et voulut prendre Seydina. Omar était à moins d'un mètre de Rama et fixait le bébé, le visage figé.
- donne le moi Rama. dit-elle nerveusement.
Elle ouvrit les yeux et regarda Assy.
- Mais laisse-moi mon bébé. N'est-ce pas Seydina Omar que tu veux rester avec ta nouvelle maman....

Omar laissa tomber le sac qu'il avait. Il avait l'impression de ne plus sentir ses jambes. Cet enfant que tenait Rama...il ne pouvait y croire. Non ce n'était pas possible. En s'approchant, il avait remarqué le trouble d'Assy qui essayait de reprendre le bébé. Mais Rama s'accrochait et la dernière phrase qu'elle avait prononcé l'avait tout simplement pétrifié. « Seydina Omar ».
Il était toujours figé à la même place, juste derrière Rama qui ne l'avait pas vu et Assy avait finalement pris le bébé et elle l'entendit parler nerveusement
- Rama viens on y va...
Elle avait brusquement tourné le dos et courait presque. Mais il se ressaisit et la rattrapa
- Assy...
Elle ne voulait pas s'arrêter et marchait rapidement. C'est Rama qui l'interpella.
- écoute Omar, tu ne vois pas qu'elle ne veut pas te parler. C'est bon là.
Sans faire attention, il l'attrapa par le bras et Assy se retourna. Il reçut en pleine figure le visage du bébé. Son portrait craché. Il tremblait presque en le regardant. Il le vit mettre ses deux doigts dans sa bouche avant de se blottir contre sa mère qui était en panique total. Enfant, il avait exactement le même tic. Deux doigts dans la bouche.
- Oh mon Dieu...murmura t-il...

Diouldé : itinéraire d'une vieWhere stories live. Discover now