Le jour d'après

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Isshin était sorti comme d'habitude prendre des croissants pour les filles, à la pâtisserie du coin, des brioches, et des gâteaux. Il avait même acheté les friandises préférées de Yuzu, et le magazine de sport préféré de Karin. Elle rêvait de cet abonnement depuis si longtemps. Souriant, pensant à Masaki, au bonheur qu'elle répandait autour d'elle, il voyait déjà le sourire de Yuzu, l'expression indifférente de Karin, mais il la surprendrait en train de lire avidement chaque page de ce magasine, tournant chaque page, ses yeux sautant d'une ligne à l'autre, inlassablement.

Prenant une dernière pêche, pour sa fille, Yuzu, il salua de la main le marchand de fruits et légumes. Au passage, dans une librairie, il acheté pour son fils, prévoyant son retour, un livre sur la biographie de Shakespeare, et une autre pièce de théâtre. Il n'avait pas remarqué qu'on le suivait du tout, occupé à vouloir voir le sourire de ses enfants. Il avait voulu combler le vide laissé par la mort de Masaki, mais il lui paraissait, par moments, avoir lamentablement échoué sur cette ligne, ou pas. Parfois, Ichigo lui adressait un compliment, et Karin se demandait comment il allait. Mais au fond, peu lui importait, il adorait sa famille telle qu'elle était. Il ne s'était jamais remarié, en souvenir de sa chère et tendre Masaki. Et il pensait que ses enfants lui en étaient reconnaissants.

—Ah Masaki, que penserais-tu de moi, à présent ?

Mais il obtint le silence pour seule réponse.

—Toujours à me regarder, moi être pitoyable.

Il soupira légèrement :

—Tu ne changeras jamais, hein ? Toujours à me critiquer sur un point ou un autre... Bref. Parlons d'autre chose.

Ce fut seulement lorsqu'il fut proche de sa maison qu'il le sentit, qu'il put le percevoir. Et ce fut un choc pour Isshin quand il ne flaira plus le reiatsu de ses propres filles. Il se précipita à l'intérieur de sa maison, mais vit avec horreur les corps de ses deux filles, baignant dans le sang, dans la cuisine. Yuzu avait encore son couteau de cuisine à la main, et Karin portait encore son pantalon de pyjama.

—NON !

Il provoqua la sortie de son propre gigai, et dégaina aussitôt son propre katana, mais trop tard, l'homme l'avait pris dans son piège. Avec effroi, Isshin constata qu'il était debout, sur un pentacle, tracé en rouge, sans doute avec le propre sang de ses filles, qui le privait de toute énergie, de toute aptitude à percevoir la réalité de manière claire et précise. Il ne sentit pas le katana qui lui transperçait le cœur de part en part.

Il tomba, et sa dernière pensée fut pour son fils, Ichigo, et sa famille. Puisse-t-il trouver le bonheur, fut ses derniers mots. Si jamais il trouvait femme. Ou alors un homme. Il avait accepté depuis longtemps que son fils était homosexuel, mais il ne le savait pas encore lui-même.

Etonnant le flux de pensées, et de regrets qu'un homme pouvait éprouver quand il rencontrait la mort. Il imaginait bien son Ichigo dans les bras d'un homme fort, tel qu'il les aimait, il imaginait la souffrance d'Ichigo quand il devrait tuer Aizen... La compassion qu'il avait éprouvée envers lui, dès que le tyran avait perdu ses pouvoirs. Il savait que des hommes pouvaient changer le sexe de quelqu'un... Il regrettait de ne pas pouvoir voir la sublime fille qu'était devenue Ichigo, en kimono blanc, rendant hommage à ses formes. Ou en robe blanche, comme les Européens, tenant son bouquet de fleurs. Puis son ventre rond, dans les bras de cet homme brun, comme Ichigo les aimait, son bébé dans les bras. Sa famille heureuse. Elle, en bikini blanc très sexy, et lui, en boxer noir sur la plage.

—Sombre idiot, pourquoi ne m'en as-tu pas parlé ? De tes sentiments pour lui ? J'aurais parfaitement compris, tu sais, soupira-t-il dans un dernier râle. Tout à fait compris.

Un autre mondeWhere stories live. Discover now