Chapitre V.1

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V — Homme à la voix féminine, adolescente aux traits masculins

Musique : Lilium, "Sleep inside" ; Image : par ©l-or-en-serie - deviant'art

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[...]

L'air s'était réchauffé, effaçant la regrettable pluie matinale pour laisser le beau temps rendre la fête plus agréable et chaleureuse. Cependant, l'adolescente était loin de se douter de ce changement. [...] Elle lança son sac dans un coin de sa chambre désormais vide de ses effets personnels les plus importants et s'assit sur son lit. Sa chambre, comme le reste de la maison, n'avait rien de commun, bien que son domicile parût parfaitement banal vu de l'extérieur, l'intérieur, aux allures vieillottes, faisait tout le charme de la demeure. Outre le papier peint de mauvais goût, la chambre de Dianne était en partie encombrée par des étagères, elles-mêmes encombrées par des centaines de livres loin d'être en bon état. Au besoin de donner des précisions, il faut savoir que cette pièce était une bibliothèque et, par conséquent, pas destinée à accueillir un enfant. Pour la forme, on avait tout de même disposé un bureau sur lequel des cahiers et des classeurs côtoyaient crayons et stylos aux fanfreluches roses et pastel. Pour marquer son territoire, quelques peluches reposaient sur son lit.

La future étudiante enlevait, à l'aide d'une serviette en papier, les miettes de biscuit logées à la commissure de ses lèvres, alors qu'elle se saisissait du livre que ses parents lui avaient confié lors de son entrée au lycée. Bien qu'elle eût toujours eu quelques suspicions quant à ce qu'elle était, l'aveu de ses parents l'avait grandement surprise, avant que les nombreuses restrictions l'eussent, par la suite, refroidie. Depuis son plus jeune âge, elle posait des questions concernant l'origine de ses capacités, mais à chaque fois, elle s'était heurtée au silence persistant de ses parents. A présent, plutôt bien renseignée sur le sujet, ses demandes rencontraient des refus catégoriques ; il était hors de question qu'elle quitte la Terre. Pourtant, l'amour de sa tranquille vie, bien qu'un tantinet monotone, ne suffisait pas à réduire ses envies irrépressibles d'aventures et de découvertes, et quitte à désobéir, elle comptait bien un jour assouvir ses désirs.

Dianne feuilleta les pages de son livre, le premier d'une longue collection d'encyclopédies 'magiques', quand une série de pages cornées attira ses doigts sur l'irrégularité du papier, encore intact la veille. Elle se rendit donc aux pages concernées et découvrit, dans ce manuel de sciences physiques et ethniques, plusieurs pages de ce qui semblait être, à première vue, un documentaire illustré, mais après s'être attardée sur le papier rugueux et jauni ainsi que sur les illustrations sans perspectives et sur les figures graves des personnages, elle prit conscience qu'elles provenaient en réalité d'un livre saint.

L'incompréhension dans laquelle se trouvait la jeune femme augmentait aussi rapidement que la peur provoquée par l'enchaînement des événements. Cette journée devait être calme, si l'on excluait l'afflux important d'amateurs d'Histoire et de découvertes, mais en aucun cas des éléments d'une vie que ses géniteurs s'efforçaient de tenir éloignée d'elle, n'auraient dû refaire surface. Pour commencer, ce film n'avait ni queue ni tête, pourquoi lui révéler de tels 'secrets' si cela pouvait perturber les bases de l'Humanité ? Et puis avait-elle demandé quelque chose à Héraclès ? Elle se rassura, d'ailleurs à tort, en se convainquant que ce n'était peut-être là que la manifestation de ses capacités, dictées par son subconscient, ou par une toute autre chose portant une appellation barbare qu'elle avait brièvement lue dans son encyclopédie.

Elle justifiait cette découverte par sa simple volonté d'approfondir ses connaissances, la menant inévitablement à ce livre dans lequel elle avait cru apercevoir une partie consacrée à ces êtres célestes, d'où l'apparition de ce mystérieux feuillet à l'écriture archaïque. Il ne lui vint pas un seul instant l'idée que ce dialecte fût encore en usage dans certaines civilisations et que ce même feuillet se trouvât là, car il devait simplement se trouver là, du moins c'est ce que pensait l'individu qu'il l'avait disposé dans cet ouvrage.

AnasgallaWhere stories live. Discover now