Chapitre XXII.2

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XXII - Désolé, j'ai craqué

Image : source pixabay, par PublicDomainPictures.

Musique : "I believe" by Riverside.

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[...]

Les démons déambulaient encore dans les rues, plus silencieuses à présent, mais qui ne désemplissaient pas malgré l'heure bien tardive... ou matinale, selon votre préférence. En tout cas, l'horloge incrustée dans le clocher de la ville affichait un peu moins de cinq heure du matin.

Je vous vois venir mes frères et sœurs, qu'est-ce qu'un clocher vient faire chez les démons ? Ce n'est, ni plus ni moins, qu'un bâtiment décoratif, et quelque peu subversif au vu des activités qu'accueillent le lieu.

Ainsi, dans le quartier résidentiel de la banlieue nord, des immeubles de briques aubergine de quatre étages bordaient la voie de tramway et de bus, la route automobile traversant, comme chez les humains, les souterrains du territoire.

Une grille en argent, surmontée de piques en onyx sculptés en flèches athlétiques, entourait un des parcs de la ville. Bien que petit et ne bénéficiant que d'une sommaire aire de jeu pour enfant, il apportait un peu de verdure dans cette ville aux couleurs sombres et aux bâtiments terrifiants. En effet, de grands arbres aux feuillages de jais fendaient le bitume pour rejoindre le ciel et échapper aux Enfers. Quelques tags sataniques - terriblement cliché - recouvraient certaines façades de fresques glauques réalisées par des jeunes sans grande ambition professionnelle, à la dérive, mais que les résidents appréciaient néanmoins.

A quelques pâtés de maisons de là, l'éclairage public se faisait plus voyant, le centre-ville luisait en cette fin de matinée, concurrence à laquelle les lampadaires espacés de la banlieue, qui enfermaient une lampe dans des vitres teintées de byzantium, ne pouvaient rivaliser. Du cœur de la ville parvenait aussi des bribes de voix, des sons métalliques et le remue-ménage des jeunes et fêtards un peu éméchés. Les néons d'enseignes de boutiques diverses affichaient « Ouvert H24 et 7j/7 », chose étonnante pour un peuple chez qui le travail n'était pas une grande contrainte. Quoi qu'il en fût, la ville, bien qu'elle ne battît pas à son plein régime à cette heure-ci, restait dans un éveil constant, digne d'une capitale, et baignait dans un nid de faisceaux lumineux multicolores. Les passants, eux, se détachaient des couleurs sombres des constructions grâce à leurs cheveux flashy et leurs tenues extravagantes et osées selon les différents points de vue. Contrairement à l'image du parfait démon que se faisaient les autres peuples, le style gothique ne dominait pas.

Le noir dominait donc, mais des tissus fluorescents se distinguaient du reste. Il y avait aussi certains, une minorité, vêtus de manière plus occidentale ou humaine pour cette planète. Dans cette région du moins, car selon les coutumes des peuples démoniaques, l'accoutrement variait.

[...]

Alek sortit d'un bâtiment, nommé le « Le mime romain », duquel s'échappait de la musique et une faible lumière rouge. Exténué par sa nuit de travail, il bâilla à s'en décrocher la mâchoire. Il frissonna aussi lorsque le vent frais parcourut sa peau, hérissant les fins poils de jais qui la recouvrait. Il enfila donc sa veste qu'il tenait à la main, faisant disparaître son tatouage planète sous le tissu. La lune, l'étoile bleue, et même le soleil de ce système, regardaient cet autre morceau de caillou, celui sur lequel le démon marchait, s'éloigner, dériver à travers l'espace. Les nuits s'allongeaient donc et les journées se faisaient moins lumineuses, causant une perte de repères généralisée. Il longea la grande avenue où plusieurs terrasses s'étendaient sur la chaussée malgré le temps hibernal, prenant la direction du quartier des briques aubergine. Le démon s'engouffra dans la cage d'escalier d'un bloc de briques qui ressemblaient à tout les autres lotissement qui l'entourait, comme un ange et une démone après deux gouttes de bière. C'est pour vous, c'est cadeau. On est chez eux, imprégnons-nous donc des expressions locales ! [*]

AnasgallaWhere stories live. Discover now