Chapitre VI.1

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VI — Visite nocturne

Musique : Anna Blue "Where do I go ?".

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[...]

Les deux jeunes gens, après avoir obtenu et payé une chambre auprès de la réceptionniste, montèrent à l'étage indiqué. Suite aux dernières plaintes d'Ydris, qui répétait sans cesse que ce n'était pas d'un hôtel dont ils avaient besoin mais d'un moyen de locomotion pour aller je ne sais où, le calme s'installa de nouveau. Cet instant propice à la réflexion permit à Dianne de songer à la suite. L'éventualité d'ouvrir son sac et de découvrir de nouvelles indications demeurait son seul espoir, car le second scénario qu'elle avait en tête s'avérait dangereux, mais plutôt réfléchi. Cependant, il était hors de question qu'elle prévînt ses parents pour leur demander conseil, elle avait foncé sans réfléchir dans cette quête, elle devait à présent assumer et sortir de ce pétrin par ses propres moyens.

Le jeune homme qui l'accompagnait, s'approcha du lit le plus proche de la fenêtre et s'y avachit. C'était la première fois qu'il dormait à l'hôtel et il trouvait cela plutôt banal. Les murs blancs, les lumières éclatantes et la propreté à première vue irréprochable, lui rappelaient les foyers dans lesquels il était allé. Même le lit simple à côté du sien lui paraissait cruellement ordinaire. Il n'avait que peu de fois disposé d'une chambre individuelle, chez les rares familles d'accueil qui s'étaient occupées de lui, avant d'être replacé en foyer suite à un événement inexpliqué. En effet, il s'était souvent joué de ses capacités pour tourmenter ses hôtes. Enfin, il ne s'en amusait pas, au contraire, il trouvait ça pathétique et immature, néanmoins c'était le seul procédé qu'il avait trouvé pour rester près des gens de son âge. Etant donné qu'il ne souhaitait pas vivre avec des figures parentales de substitution, il préférait la compagnie de ses amis et faisait tout pour ne pas être amené loin d'eux.

« Est-ce que, par hasard, cela te dit quelque chose ? Tenta son guide improvisé.

Ydris se saisit des feuilles soigneusement pliées qu'on lui tendait. Il parcourut du regard le papier à l'écriture inconnue et détailla le personnage grossièrement dessiné. Alors que deux grandes ailes dorées s'échappaient de son dos, cet ange, trônant au milieu de ce flot de boucles qui renfermaient le secret d'un savoir vieux de plusieurs millénaires, revêtait une toge immaculée. Une inscription plus récente l'interpella, c'était l'adresse de la Maison de l'Enfance et son prénom.

-C'est comme ça que tu m'as trouvé, constata-t-il. Pourquoi ?

-Je n'en ai pas la moindre idée.

-Bah... moi non plus, répondit-il d'un ton inexpressif alors que cette nouvelle le troublait. Mais bon, tentons le tout pour le tout, c'est pas comme si on avait le choix.

Aussitôt dit, aussitôt fait. Il orienta le papier en direction du ciel. Ses bras tendus vers le plafond, il semblait se focaliser sur un point inaccessible.

-Aidez-nous ! Apportez-nous la lumière sur notre chemin ! J'en appelle à tous les anges et aussi tous les dém...

-Ouh la, malheureuse, l'interpella Dianne, ne les mêle pas à ces histoires, j'ai récemment eu la confirmation que ce n'était peut-être pas des sottises. Puis arrête, où qu'ils soient, je ne vois pas pourquoi ils répondraient à nos appels alors qu'ils n'aident déjà pas ceux dans le besoin.

-Tu veux pas me genrer au masculin ? » Demanda du tact au tact Ydris.

La jeune fille se contenta de hausser les épaules et de reprendre le feuillet. Si cela lui faisait plaisir, elle n'y voyait pas d'inconvénient, bien que ces demandes pour le moins étranges la laissassent perplexe. En soi, ce n'était qu'un caprice en plus à gérer.

Dianne se contenta de hocher la tête. Comme si c'était un signal de départ, l'adolescent retira sa casquette qu'il lança sur sa table de chevet et secoua la tête pour faire tomber sa longue chevelure châtain doré sur ses épaules. Il enleva ses baskets et s'allongea simplement sur le lit au-dessus des draps. Il ne bougea plus de toute la soirée, tournant le dos à sa colocataire.

La jeune femme, dans sa grande générosité, déposa un large tee-shirt blanc sur le lit de son acolyte, qu'elle sortit de ce morceau de cristal que son père lui avait offert et qui lui permettait d'entreposer diverses choses dans les limites de sa capacité maximale de stockage. Ainsi au lieu de s'encombrer de lourdes valises, elle avait jeté pêle-mêle ses affaires dans le portail.

[...]

La circulation et les voix des noctambules perturbaient le calme de la nuit. Cette symphonie désastreuse ne parvenait heureusement pas à s'insinuer dans la chambre des deux jeunes gens, à l'inverse du demi-dieu qui s'asseyait sur la chaise en face des deux lits occupés.

Il savait que sa présence n'allait pas passer inaperçue, cela dit sa démarche devait se faire remarquer, car l'adolescent commençait tout juste à remuer. Son impression d'être en danger ne l'ayant pas quitté, son instinct le poussa à se montrer plus réactif à son environnement. C'est ainsi qu'il ouvrit un œil, plus un second avec la désagréable impression qu'on l'épiait. Ne manquant nullement de courage, il se redressa et hoqueta de surprise, mais ses objectifs de grandeurs le rattrapèrent aussitôt. Voici l'homme qui lui apprendrait, qui l'élèverait au-dessus des autres ! Car, en effet, Ydris nourrissait de grands rêves dans lesquels sa puissance dominerait celle des autres.

« Vous êtes venu nous chercher ! Comme dans les films ! S'exclama-t-il. Vous savez vous téléporter, ça veut dire ? Oh, trop d'la balle !

Ydris sauta de son lit et, en un bond, fit face à l'intrus qui l'observait avec une mine perplexe. Il attendait patiemment, dans un tee-shirt trop large qui dévoilait ses fines jambes et une partie d'un sous-vêtement, que l'homme parlât, bougeât, fît apparaître un objet, qu'il lui vendît du rêve en somme. Mais rien ne vint, alors l'adolescent qui affichait toujours un sourire resplendissant, attrapa ses affaires et fila dans la salle de bains.

-Cela n'a aucune utilité, tu as accepté ta course, je suppose que tu ne devais pas redouter de me rencontrer en personne, trancha la voix du mystérieux homme qui se levait déjà.

Dianne reposa le téléphone et se contenta de regarder avec une moue éberluée le nouveau venu. Pour une surprise, s'en était bien une. Il y avait encore une poignée de minutes, elle se demandait ce qu'elle allait bien pouvoir faire, quelle serait la prochaine étape de ce périple, mais finalement, les choses se présentaient tout naturellement à elle, une aubaine.

-Je vous attends dehors, l'informa-t-il avant de sortir de la chambre. »

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Je ne sais pas si cette nouvelle va vous réjouir, mais j'intensifie le rythme de publication - avec des parties plus courtes.

AnasgallaWhere stories live. Discover now