Chapitre Vingt-Troisième

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Vincent resta un moment sans voix devant le spectacle qui s'offrait à lui. Sans accorder la moindre attention au personnel soignant, il s'avança vers l'amnésique. Ce dernier, la tête enfoncée dans l'oreiller, esquissa un semblant de sourire. Sans doute se voulait-il rassurant. Richards l'avait déjà vu allongé, inconscient. Il avait même passé un temps fou à l'observer le soir de son admission, contemplant le drame auquel il avait participé...

Seulement découvrir son ami dans cet état le secouait plus qu'il n'osait se l'admettre. Jusqu'à présent il ne s'était pas rendu compte de l'impact de l'agression physique sur Nicolas. Certes il était au courant des blessures, il avait été mit au fait des moindres détails à ce sujet. Il savait également qu'elles étaient assez graves pour le plonger dans un coma. Seulement, comme beaucoup d'entre nous il avait oublié que de tels souffrances ne touchaient pas uniquement le corps, le mental en ressortait parfois en moins bonne condition que le physique. Et à l'instant même où ses yeux avaient croisés ceux de son ami le capitaine l'avait compris.

Aussitôt un vent de panique souffla sur la capitaine. Lecompte ne s'était toujours pas remis de son réveil sans souvenir au milieu de Paris, il commençait à peine à se faire à sa condition que ce nouvel incident arrivait. Cela aurait définitivement des impacts néfastes sur lui, il était déjà si psychologiquement fragile... Une autre source d'inquiétude vint en tête de l'inspecteur, à savoir le fait que Nicolas était sans doute en train de lire en lui et qu'il avait tout sauf besoin de cela en ce moment. Ce qu'il lui fallait c'était du réconfort, des phrases mensongères lui promettant que tout allait bientôt aller mieux, un soutien.

Alors qu'il cherchait un moyen de rattraper son erreur un détail, qui lui avait échappé jusqu'à présent, attira soudainement son attention : le silence de son ami. Une nouvelle vague de frayeur s'empara du policier. Le reconnaissait-il seulement ? Ou sa mémoire avait-elle encore été affectée ? Comment pourrait-il agir, alors ? Alors que le cœur de l'homme s'emballait il prit la parole, dans l'espoir de voir ses doutes se dissiper.

« Nicolas, c'est Vincent ? Est-ce que tu me reconnais ? »

L'amnésique sembla d'abord surpris par la question, avant de faire un mouvement de tête qui pouvait s'apparenter à un signe d'approbation. L'inspecteur leva des yeux interrogateurs vers les médecins présent, s'intéressant pour la première fois à leur existence. C'était souvent un réflexe lorsqu'une personne perdait la parole : interroger son entourage plutôt que de faire l'effort de le comprendre par un autre moyen.

« Sa gorge est endommagé, il a du mal à parler. Il vaut mieux d'ailleurs qu'il évite pour que sa blessure cicatrise plus vite. Je suis le docteur Lorenz, nous ne sommes déjà aperçus monsieur Richards... vous en souvenez-vous ?

— Je... oui. Vous êtes la personne qui m'a informé sur son état de santé lorsqu'il a été admis, c'est cela ?

— Exactement.

— Hum... alors.. Est-ce que tout est normal ? osa Vincent avec appréhension.

— Oui, vous pouvez être rassuré. Tout va bien, ou du moins tout va le mieux possible pour le moment. En revanche, je puis vous assurez qu'il ne tardera pas à reperdre connaissance. Son corps à besoin de repos... »

Richards acquiesça et ramena ses yeux vers Nicolas. Si ce dernier ne l'avait pas oublié alors pourquoi n'avait-il pas réagit à ses pensées ? Une information, qu'il avait une fois de plus occultée, lui revint alors en mémoire. Son ami ne portait pas ses lunettes. Or, d'après ce qu'il avait compris du don de son ami celui-ci fonctionnait uniquement lorsqu'il posait les yeux sur une personne. Peut être que sans une vision assez claire de ce qui l'entourait il était dans l'incapacité d'avoir recours à ses déductions ? C'était la seule explication qui lui venait en tête, il s'en contenterait pour le moment...

Le réveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant