Chapitre Trente-sixième

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Nicolas avait longuement réfléchi à sa décision. Il était bien conscient qu'elle n'était pas bonne. Il était bien conscient qu'elle ferait souffrir Vincent, Atsuko et tous ceux qui s'efforçaient de prendre soin de lui. Il était également conscient que cette décision le ferait souffrir lui. Mais il n'avait pas le choix.

En cherchant dans ses souvenirs, il avait ouvert la boîte de pandore. La voix tournait en boucle dans sa tête. Une voix grave et profonde qui l'informait qu'on venait le chercher. Une voix qui l'informait de son retour proche. Mais surtout une voix menaçante, pas seulement pour lui, mais pour tous ceux qui l'entouraient. Son instinct lui disait que les inconnus qui l'avaient envoyé ici ne voulaient pas que son existence soit dévoilée. Pourtant elle l'avait été. Et étant donné qu'il était parvenu à le faire voyager dans une dimension ou une temporalité parallèle, il ne doutait pas que ces hommes étaient bien plus forts que ceux qu'il fréquentait actuellement.

« S'il est découvert... Il faudra l'éliminer. Ils ne doivent pas savoir que nous existons. »

C'était cette déclaration qui tournait en boucle dans l'esprit de l'homme. Il n'avait pas voulu la comprendre au début, il avait refusé d'y voir ce qu'elle disait pourtant explicitement. Mais il avait bien été obligé de se rendre à l'évidence. Il y avait eu un problème dans sa mission, quelque chose l'avait fait bugger. Parce qu'il n'était rien de plus qu'un homme envoyé dans une mission suicider pour accomplir une mission. C'était de là que lui venait son don. Il le savait à présent. Son étrange don avait enfin une explication.

À coup sûr, quelque chose se cachait dans ses yeux, ou ses yeux eux-mêmes étaient différents de ceux de ses semblables. C'était sans doute l'organe qui permettait à ses émissaires de collecter des données et qui le laissait, au passage, profiter de son don étrange. Cependant, quelque chose n'avait pas fonctionné et la mission avait échoué. Il avait peut-être perdu la connexion avec ces étrangers qui avaient dû l'observer vivre, et sans connexion il ne pouvait plus lire dans les autres.

« S'il est découvert... Il faudra l'éliminer. Ils ne doivent pas savoir que nous existons. »

La phrase lui revenait constamment en mémoire, comme une mise en garde qui l'engageait à se mettre en sécurité. Il savait très bien que s'il avait observé et qu'on venait pour le récupérer les personnes sauraient où chercher, elles connaissaient Vincent, Atsuko et toutes ses relations. Il les mettrait tous en danger. Il pourrait les prévenir, mais à quoi bon ? Atsuko partait de l'autre côté de la terre et Vincent ne pourrait pas quitter sa famille. Il ne pouvait tout simplement pas lui demander de quitter sa famille pour lui, un gars perdu. Non.

Il ne voyait donc qu'une solution à son problème et elle ne lui plaisait pas. En réalité il l'a haïssait. Mais c'était cela ou mourir et il n'avait pas envie de mourir. Il voulait vivre, lui qui pendant si longtemps n'avait pas trouvé sa place, s'était senti inutile et avait eu envie de quitter ce monde voulait maintenant s'y établir. À présent il n'était plus soumis à aucune force, il était enfin libre. Lorsqu'il lisait dans les gens, il n'était pas vraiment comme les autres, lorsqu'il était à l'hôpital il en était prisonnier, mais maintenant qu'il était libre, totalement libre il était bien décidé à profiter de cette liberté, peu importe le danger que cela représentait pour lui.

« S'il est découvert... Il faudra l'éliminer. Ils ne doivent pas savoir que nous existons.»

Il devait donc faire ses adieux. Nicolas avait demandé à Atsuko et Vincent de venir dîner. C'était un jeudi soir. Les deux amis avaient accepté avec joie, ils se disaient que ce devait être un bon signe. Leur ami reprenait goût à la vie !

Le réveilOù les histoires vivent. Découvrez maintenant