3. Auckland (3/3)

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Le temps clair franchissait les baies vitrées de l'aéroport d'Auckland. Dans cette fourmilière, les yeux éblouis en ce dimanche matin, nous attendions devant les tapis tournants de la bagagerie.

– Laura, ça va ? demandai-je à mon amie qui aurait pu rejoindre les troupes de figurants de The Walking Dead.

– Je ne sais plus qui je suis, ni où j'habite... répondit-elle mollement. Mais ça va quand même, t'inquiète.

Le décalage horaire n'était clairement pas son ami.

– C'est bon ? Tout le monde a récupéré ses valises ? Alors, c'est parti ! lança Dimitri.

Anne, Marion, Laura, Dimitri, Yohann et moi, nous déplaçâmes en ligne parfaitement synchronisée dans l'aéroport. Nous devions retrouver notre chauffeur attitré pour le séjour juste derrière les portes d'arrivée. Mais une fois franchies, nous nous retrouvâmes face à une foule d'hommes et de femmes qui brandissaient papier ou tablette avec le nom de la personne à réceptionner.

– Cherchez « Grévois » ! précisa Dimitri pendant que nous avancions.

– Mais ils sont dix mille ! constata Anne.

– Il ressemble à quoi, ton chauffeur ? demanda Marion.

– Il s'appelle Rob ou Robert. Il m'a écrit qu'il porterait un haut rouge.

Nous accélérâmes le pas pour ne pas bloquer les passagers qui continuaient d'affluer derrière nous.

– Taxi ? Taxi ? Taxi ? demanda plusieurs fois un chauffeur minuscule à Marion.

– Ouste ! Ouste ! Ouste ! répondit-elle, agacée qu'il insiste.

– Par-là ! clama Yohann.

Nous le suivîmes dans la direction qu'il prenait. A une dizaine de mètres, j'aperçus d'abord la tablette avec notre nom, une main avec du vernis qui l'a tenait. C'était une femme.

– Monsieur Grévois ? demanda-t-elle.

– C'est moi, répondit Dimitri en lui serrant la main.

– Bonjour à tous, bienvenue. Je m'appelle Robine.

Dimitri eut un temps d'arrêt.

–  Ah, c'est d'accord, très bien, notre chauffeur, donc.

– C'est ça.

Non seulement, nous avions été piégés par le prénom, mais ce qui était d'autant plus étonnant, c'était que Robine était un tout petit gabarit, elle semblait toute sensible, toute fragile. Son haut blanc et rouge mettait en valeur ce corps fin mais dessiné, le rouge sur ses lèvres rehaussait sa chevelure flamboyante, un carré ondulé que je lui enviais déjà. Un joli petit brin de fille, comme aurait pu dire mon grand-père. Pas étonnant que Yohann l'aie remarquée.

Elle serra avec vigueur la main de nous autres.

– Bon, eh bien nous allons passer la semaine ensemble.

Yohann lança un clin d'œil à Dimitri en levant son pouce, du genre « bien joué, mec ». Elle se retourna et il changea instantanément d'attitude, de peur d'avoir été grillé.

– Je suis garée sur le parking extérieur en périphérie de l'aéroport. Suivez-moi pour rejoindre la navette.

Rob était si joyeuse que c'en était communicatif. Elle parlait très bien français. Alors Yohann n'eut pas peur de se rapprocher d'elle. Je le soupçonnais déjà de vouloir faire le beau. Décidément, il y en a qui ne change jamais.

La cerise déconfiteWhere stories live. Discover now