Chapitre 22

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« Certains parlent de patience, d'autres d'indifférences. Je dirai que l'une de ces deux interprétations est la vérité, et l'autre bien éloignée. Aussi, celle qui exprime ma pensée et ma façon d'être n'est pas celle qui pense de manière erronée »

paroles de Lettie


— Tout le monde le sait.

Persuader une personne indépendante et n'attendant rien de personne, capable d'apprécier la solitude et d'endurer n'importe quelle souffrance tout en souriant à cœur ouvert, n'était pas une mince affaire. Mais cela n'arrêterait pas Jord ni ne le découragerait.

Lettie tourna son visage vers lui, lui accordant un regard chaleureux et un sourire béni des cieux. Comment parvenait-elle à revêtir un tel bonheur inexistant dans chacune de ses expressions ? N'importe qui la penserait être heureuse, sans aucun problème. Et si demain son corps inerte était trouvé, aucun soupçonnerait un suicide. Comment une personne aussi joviale et souriante pourrait-elle un jour souhaiter disparaitre de la surface du monde ? Il n'y aurait que Jord pour comprendre, pour savoir et pleurer la désertion de sa sœur.

— Tout le monde sait, mais personne n'agira, Jord, rétorqua l'oiselle.

Une bourrasque d'air frais l'interrompit. Elle aimait le vent, elle aimait le froid, elle aimait les tempêtes. Elle détestait le Soleil, cherchant l'ombre à chaque instant. L'anonymat lui était aussi pesant que la notoriété. Elle fuyait tout et appréciait ce même « tout » à la fois. Un paradoxe ambulant. Jord avait connu ces états. Mais bien au lieu de les affronter seul, de les défier et de les combattre, il avait compté sur sa sœur. Et lorsque cette dernière eut décidé qu'il était temps pour lui de renaitre par ses propres moyens, sans doute parce que les problèmes qu'elle trainait avec elle auraient pu avoir un impact sur lui, elle avait disparu, l'abandonnant lui et son père.

Elle avait eu raison. Aujourd'hui, il était un Oiseau de Joie, immortel et sans plus d'angoisse ni d'idée à en terrifier les esprits faibles en quête de repos éternel. En bref, il devait son bonheur à sa sœur. Parce qu'elle l'avait abandonné au moment où il en avait eu le plus besoin. En le laissant se démerder, sa sœur lui avait permis de vouloir découvrir le monde. Juste pour la retrouver.

A présent, c'était à lui de lui venir en aide.

— Tu ne m'écoutes pas, la grosse.

Et comme pour mettre en action les accusations de son frère, elle se détourna de lui. Encore.

— Valentin me cherche encore. Et comme tu le dis, chacun le sait. Tout comme chacun à conscience de ce qu'est Valentin.

— Un connard que je peux tuer pour avoir juste posé sa main dégueulasse sur ma sœur.

— Jord, ne soit pas si vulgaire.

— Mais c'est un putain de fils de pute ! cracha-t-il, de nouveau énervé par sa sœur.

Elle avait ce talent de toujours le mettre en rogne. Et il n'arrivait jamais à lui en vouloir trop longtemps. Comment en vouloir éternellement à une personne vous écoutant en silence, vous parlant et vous comprenant, taisant volontairement chacun de vos mensonges, fermant les yeux lorsque vous aviez besoin que tout soit ignoré ?

— Tu traines avec des loups-garous et des sorcières mais tu as encore peur de ce gars.

— Je n'ai pas peur.

— Ouais, ouais, bien sûr. J'suis peut-être pas psy mais moi aussi je sais quand tu mens, la grosse.

— La ferme le mioche.

Bang Bang, Banshee sang ; Tome 2Where stories live. Discover now