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Lachlan alla chercher ses affaires dans sa voiture en se faisant la réflexion qu'il devait faire preuve de malchance pour se retrouver à travailler avec la femme avec laquelle il avait baisé pas très longtemps auparavant. Lui qui était arrivé à peine trois semaines plus tôt à Charlestown commençait déjà à regretter le charme de Cork. Il ne fallait pas se méprendre, il n'avait rien contre cette ville ni même contre l'Australie –même s'il fallait avouer que leur accent était vraiment très prononcé, et c'était un Irlandais qui disait ça ! –, à vrai dire, il avait lui-même demandé à travailler dans cette ville-là avec ce cabinet d'architecte-là. Mais s'il avait su qu'il ferait équipe avec cette femme-là, il aurait peut-être cherché ailleurs.

Mais Lachlan était mature et même s'il se refusait à avoir des rapports avec ses collègues, il avait conscience qu'il ne savait pas qu'il allait se retrouver dans le même bureau que cette Nick –sérieusement, c'était un prénom féminin, ça ? S'il l'avait su... d'accord, peut-être bien que si elle avait été aussi ouverte que lors de leur dernière rencontre, il aurait fait l'impasse sur ses principes. Parce qu'il fallait être honnête : cette femme était canon. L'homme n'avait pas vraiment de genre, mais une chose était sûre : elle l'avait fait bander. Il n'aurait su dire quoi exactement, mais elle avait attiré son attention. Bon d'accord, les brunes étaient celles qui visitaient le plus souvent son lit, mais c'était la première fois qu'il se tapait une fille aux yeux vairons qui refusait de l'embrasser –et qui accessoirement n'avait rien contre être prise en levrette. Et il fallait dire qu'elle avait un beau cul, cette fameuse brune.

Cul qu'il aperçut justement, bien moulé dans une robe noire qui révélait une bonne partie de ses jambes fuselées, alors qu'il rentrait dans le bâtiment. Le brun s'approcha d'elle alors que son ancien collègue, Matt, s'avançait aussi. Il la prit dans ses bras et elle lui rendit son étreinte. Il lui dit quelque chose que Lachlan n'entendit pas et qui fit rire Nick. Il remarqua que les mains du gars étaient bien basses pour des mains innocentes. En fait, elles étaient bien loin d'être innocentes vu comme elle touchaient les fesses de la brune ou serraient les hanches de celle-ci.

L'homme se demanda s'ils étaient ensemble avant de chasser cette idée. Elle n'avait pas l'air d'être le genre de fille à tromper son copain avec des types choisis dans des bars. Mais il savait que les apparences étaient souvent trompeuses. Alors peut-être bien qu'ils étaient ensemble, ou pas. Et puis, de toute façon, il n'en avait rien à faire.

Ou peut-être que si.

Lachlan avait toujours été curieux. Déjà lorsqu'il était petit, il posait des milliers de questions qui ennuyaient toujours les gens autour de lui. Ce trait de caractère avait persisté dans son adolescence, le poussant à essayer toutes sortes de choses et, en grandissant, il avait gardé cet intérêt pour le monde. C'était une des raisons pour lesquelles il se retrouvait en Australie, si loin de chez lui, avec plus de 3000 heures d'ensoleillement par an contre quoi ? 1500 heures en Irlande ? Combien de coup de soleil allait-il prendre, au juste, avec autant de soleil ? Pour le coup, ce n'était peut-être pas la meilleure idée qu'il avait eue, d'aller s'installer à l'autre bout du monde.

Il repoussa ses pensées lorsqu'il sentit le regard bicolore de la brune sur lui. Il hésita à lui sourire, puis voyant qu'elle affichait un air indifférent, il se ravisa. Il voulait bien faire des efforts, mais son égo le poussait à attendre que ça vienne de la femme. Celle-ci plissa légèrement les yeux, presque imperceptiblement. Mais l'homme avait appris à repérer chaque inflexion, chaque tic –son deuxième choix de carrière était psychanalyste.

Nick tourna les talons après avoir soupiré et il la suivit sans même lui demander où ils se rendaient. Ils prirent l'ascenseur et se rendirent dans le fond du couloir. Ils s'arrêtèrent devant trois portes. La brune se tourna vers lui, le dos droit et le menton haut. Elle semblait déterminée à prouver que la situation ne la dérangeait pas alors même que Lachlan apercevait distinctement le léger pincement de ses lèvres et la façon dont elle était crispée. Pour autant, il ne fit aucun commentaire.

-Bien, commença la femme, il y a des règles à suivre. Tout d'abord, et probablement la plus importante, on enlève ses chaussures avant d'entrer.

L'homme fronça les sourcils.

-Pourquoi ?

-Je considère ce bureau comme ma maison. Et qu'est-ce que je fais en rentrant chez moi le soir ? J'enlève mes chaussures.

Il hocha la tête, d'accord avec ce qu'elle venait de dire. Il ne l'aurait sûrement pas fait instinctivement mais ça semblait plutôt logique.

-Oublie le vouvoiement, c'est sympa quand tu dragues mais ici on ne fait pas dans le diplomatique entre nous. Tu peux manger tout ce que tu veux, mais ouvre les fenêtres pour évacuer les odeurs. Je travaille en musique, donc si ça te dérange, dis-le-moi pour que je pense à prendre mes écouteurs pour demain. Ton bureau est le vide, forcément. Tu mets ce que tu veux dessus, ça ne me regarde pas, mais, tout comme je ne m'en approcherai pas sans autorisation, je refuserai que tu le fasses avec le mien. Interdiction de fouiller ou d'investir l'espace privé de l'autre sans autorisation. Tu peux remplir la bibliothèque si tu le souhaites et, bien que la déco ne changera pas, tu peux y ajouter des choses si tu le souhaites, dans la limite du raisonnable. Tu peux téléphoner ou recevoir des appels mais les règles de civilités s'appliquent aussi ici, donc évite de parler trop fort. Si tu veux dormir sur un des canapés un soir où on aura fini tard, tu peux t'allonger sur celui que tu veux, mais si jamais je suis là, j'ai une préférence pour celui de gauche.

La brune fit une pause, l'air de réfléchir. Elle apporta une main à ses cheveux et la posa sur le sommet de sa tête, la lèvre inférieure mordue. Lachlan se fit la réflexion que c'était une drôle de position pour penser mais c'était original. Probablement comme elle.

Ou pas.

Parce que c'était juste une femme comme les autres et que ce n'était pas parce qu'elle semblait résister à son charme légendaire qu'elle était intéressante. Surtout maintenant que c'était une collègue de travail. Et comme elle avait l'air prête à passer outre leur nuit torride, il allait faire de même. De toute façon, ça n'avait pas été si bien que ça. En fait non, ça avait été carrément mieux que « bien » !

Il revint sur Terre lorsque l'objet de ses pensées reprit la parole :

-Je ne crois pas avoir oublier quelque chose... Ah si, tu ne mets pas de parfum, n'est-ce pas ?

Le brun confirma.

-C'est bien, autant je n'ai pas de problème avec les odeurs de bouffe, autant les parfums me donnent mal au crâne.

Lachlan sourit un peu. Effectivement, il n'avait pas senti de parfum sur la femme lorsqu'ils avaient couché ensemble. Il s'était d'ailleurs fait la réflexion qu'elle sentait très bon, lorsqu'il avait sucé ses tétons, et puis même après, alors qu'il allait et venait en elle. Il n'avait pas le souvenir d'avoir pensé ça avec d'autres femmes qu'elle.

-Des questions ? De toute façon, on aura le temps d'en reparler et peut-être même d'ajuster certains trucs pour que ça fonctionne.

-Ça me parait plutôt clair.

-Bien, dans ce cas, bienvenu dans l'entreprise, Lachlan, sourit Nick en ouvrant la porte qui se trouvait dans son dos.

Ledit Lachlan supposait que c'était tellement agréable d'entendre son prénom prononcé par la femme que c'était pour ça qu'il souriait comme un con.

Le Paradoxe de la Mante Religieuse (#Wattys2018)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant