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-Merci pour le repas, mais la prochaine fois c'est moi qui paye, sourit Nicola en s'étirant sur sa chaise roulante.

Elle la fit glisser jusqu'à la poubelle, la boîte en carton qu'elle venait de vider dans les mains. Elle la jeta dans la corbeille quasiment pleine avant de se tourner vers Lachlan, qui souriait malicieusement.

-En tant que gentleman, je me dois de payer. Et puis, j'ai bien compris qu'avec mon humour infaillible, c'est comme ça que je te remettrai dans mon lit.

L'homme la fixa, fier de lui. Il savait qu'il avait raison et pour cause, au détour des longues conversations qu'ils avaient eues, enfermés dans leur bureau, la jeune femme lui avait confié qu'elle adorait manger et qu'elle était donc obligée de faire beaucoup de sport pour conserver la ligne. Il en avait donc conclu que pour séduire Nicola, il devrait la nourrir. Et Dieu savait qu'il aimait voir ses yeux s'illuminer lorsqu'il lui proposait de manger et que le sourire qu'elle lui offrait en acceptant lui faisait plaisir. Peut-être même un peu trop. Il fallait avouer qu'elle était attachante lorsqu'elle laissait un peu tomber ses remparts. Ils avaient parlé de tout, en avaient appris pas mal l'un sur l'autre et étaient compatibles sur le plan professionnel.

Finalement, il n'aurait pas pu trouver mieux comme collègue : elle comprenait ses idées et les partageaient, sa façon de travailler coïncidait parfaitement, si bien qu'ils s'étaient adaptés très vite à l'autre et son style allait avec le sien.

-T'es toujours aussi sûr de toi, je remarque, commenta-t-elle en revenant à son bureau.

-Je préfère toujours réaliste quant à mes capacités, rétorqua-t-il, amusé.

-Ah, Nessie ! s'exclama Nick, explosant de rire.

-Nessie ?

Depuis qu'ils travaillaient ensemble, Lachlan l'avait plusieurs fois appelé par le surnom qu'il lui avait trouvé. A vrai dire, il ne s'était pas foulé : Walleye ne signifiait rien de plus que « vairon ». Mais il fallait avouer que c'était plus original que « Nick ». Ou pas. De toute façon, il était le seul à l'appeler ainsi et ce simple fait lui réchauffait le cœur. C'était stupide et il en avait conscience mais parfois, il fallait juste prendre les choses comme elles venaient.

Mais là, il ne savait pas comment prendre ça. Elle l'avait appelé Nessie, pas vrai ? Et, bien qu'il ne comprenne pas pourquoi, ça le touchait. Beaucoup. Vraiment beaucoup. En fait, son cœur s'emballait tout seul comme un con. Pourquoi se mettait-il à pomper comme ça, cet abruti ? Ce n'était pas son premier surnom et ce ne serait sûrement pas son dernier.

Pourtant, il aimait ça. Il aimait qu'elle lui ait donné un surnom, original qui plus est. Il aimait la façon dont elle l'avait prononcé, son accent traînant sur le « N » et sur les « S ». Il aimait le regard qu'elle lui lançait à cet instant, les yeux encore embués de ses larmes de rire.

Et il aimait par-dessus tout ce qu'il ressentait la voyant ainsi.

-Eh bien, tu es Irlandais mais ta mère est écossaise, donc « Loch Ness ». Et puis, comme je n'allais pas t'appeler « Lac », j'ai préféré « Nessie », expliqua la femme alors qu'il était muet depuis plus d'une minute –ce qui, à part lorsqu'ils travaillaient, arrivait très rarement.

Lachlan lui offrit un sourire pathétique, un peu incrédule. Il ne comprenait pas à quel moment il avait commencé à se laisser aller comme ça. Parce que oui, c'était du laisser-aller. Il ne réfléchissait plus autant qu'avant et n'était plus dans le contrôle. Or, c'était un problème. S'il commençait à juste accepter les choses il risquait de se faire prendre. Bon, pas dans tous les sens du terme mais prendre quand même. Parce qu'à ses yeux, Nicola représentait un très bon coup qu'il souhaitait remettre dans son lit –ou contre son mur, il n'était pas encore certain de la position- et rien de plus.

Le Paradoxe de la Mante Religieuse (#Wattys2018)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant