Chapitre 38

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Ciryatan, Quatrième Monde.

Avec la force de l'habitude, Satia tint la bride à son impatience. L'arrivée de Surielle avait été un soulagement, son départ un chamboulement qui avait serré son coeur. Affronter Orhim en personne ! Un dieu ! Elle aurait tellement préféré pouvoir tenir sa fille éloignée des combats. La protéger, encore et toujours.

Elle a grandi, observa Séliak.

Oui. Et je m'en réjouis autant que ça m'effraie.

Près d'elle, le Djicam Aioros et le Messager Grefel réglaient les derniers détails de l'assaut. Elésyne mènerait les Massiliens dans les airs ; Satia se demanda si c'était également difficile pour Aioros d'observer la chair de sa chair courir au devant du danger. Avant de réaliser qu'il était un Massilien pure souche - quoiqu'ils en disent, combattre était leur raison d'être.

L'énorme dragon (encore que l'adjectif énorme reste trop faible pour le caractériser) se tenait non loin de là. Il transporterait deux escouades de Maagoïs, ainsi que les troupes massiliennes sous les ordres d'Elésyne. Quand le dragon de terre survolerait le complexe, les Massiliens se déploieraient et les Maagoïs sauteraient en parachute. Même si elle connaissait le principe de fonctionnement de l'objet, Satia frissonna à la simple pensée de s'élancer ainsi dans les airs. Pour l'instant, les deux groupes ne se mélangeaient pas mais s'observaient avec curiosité. Ils étaient jeunes, pour la plupart, et elle espérait ne pas voir ressurgir d'anciennes rivalités.

C'était un point sur lequel elle avait échoué, elle devait le reconnaitre. La paix avec l'Empire, elle l'avait certes obtenue, mais elle n'avait jamais osé forcer davantage la coopération entre leurs deux nations. Elle voulait croire que cette nouvelle génération saurait faire mieux.

Le groupe d'assaut terrestre serait mené par un impérial, le colonel Miyano, de Bereth . Une manière pour les impériaux de mettre à l'honneur d'autres troupes que les Maagoïs. Ici aussi l'élite était parfois considérée comme arrogante par les autres corps d'armes. Ils seraient assistés par les centaures de la Fédération, occupés pour l'instant à remplir leurs carquois de flèches, tandis que les impériaux leur expliquaient le fonctionnement du bouclier énergétique en fixant un brassard sur leur bras. Les centaures étaient bien plus rapides que des hommes à pied ; leur mission serait d'encercler le complexe pour s'assurer qu'aucun Stolister ne puisse prendre la fuite.

Shaniel désirait les écraser et Satia comprenait la jeune Impératrice. Elle était reparu un peu plus tôt, avec une nouvelle tenue rouge et or, et un nouveau maquillage. Le Seigneur Evan était à ses côtés ; les troupes impériales disposeraient d'écrans de fumées et de quelques poisons toxiques, mais non létaux. Evan avait préféré se montrer prudent : dans un lieu clos, n'importe quel système de ventilation serait capable de retourner leurs propres armes contre eux.

Cette fois, Satia avait cédé à Sinoros de rester superviser leurs opérations au poste avancé de commandement. Le soldat de la Garde du Phénix prenait son rôle de protection très à coeur, surtout en l'absence de Lucas. Elle sourit à Shaniel, assise en face d'elle. La tente était largement ouverte sur l'un des côtés, et la silhouette du complexe s'y dessinait au loin, structure blanche au milieu des arbres. Même si Surielle et Alistair s'en étaient échappés, Satia s'inquiétait des actes qui s'y perpétraient encore. Elle doutait qu'ils aient été les seuls cobayes, et les quelques minutes de discussion qu'elle avait pu arracher à sa fille n'avaient fait que renforcer sa détermination.

— Ils sont en position, votre majesté, vint annoncer une estafette après le salut rituel.

Elle s'adressait davantage à l'Impératrice qu'au Commandeur, pourtant celui-ci s'assurait que personne n'approche Shaniel de trop près.

L'héritage des phénixWhere stories live. Discover now