Chapitre 2

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Le vent sifflait à ses oreilles. Ses yeux étaient plissés sous la vitesse, les ailes plaquées contre son corps.

Le sol se rapprochait à toute allure. Malgré leur hauteur de départ, ils n'auraient qu'une poignée de secondes pour réagir, après une chute de près d'une minute. Si longue et si courte.

Elle aurait dû apprécier la sensation grisante de la vitesse, le vent dans ses cheveux qu'elle avait négligé d'attacher, l'accélération des battements de son cœur.

Surielle ne put s'empêcher de jeter un œil à Aaron.

Le Massilien aux ailes chocolat était concentré. Il ne jouerait pas la prudence, après sa provocation, et attendrait le dernier moment pour redresser.

Eraïm, comment allait-elle le battre ? Il était hors de question de perdre la face une nouvelle fois. Plutôt mourir que de subir un tel déshonneur.

Leur altitude devenait dangereusement basse. La pression de l'air, les changements du vent ; un sentiment d'urgence la poussait à déployer ses ailes, sauf que Aaron n'en avait encore rien fait. Surielle serra les dents alors que le sol se profilait, tout proche.

Attendre encore, au risque de se rompre les os à l'impact ? Céder la victoire à Aaron ?

À la périphérie de sa vision, elle discerna Aaron qui remontait brusquement, puis filait au ras des herbes folles de la plaine. Un mince sourire étira ses lèvres. Elle avait gagné !

Puis la réalité la rattrapa. Le sol était beaucoup trop proche. Surielle déploya ses ailes au maximum, grappillant toute la portance qu'elle pouvait.

C'était beaucoup trop tard, elle le savait.

Jamais elle ne ralentirait assez pour éviter un contact fracassant avec le sol.

Pourtant, Surielle ne parvenait pas encore à fermer les yeux. Comme si elle ne pouvait croire à cette réalité. L'air vibrait sous ses ailes tendues, elle perçut vaguement les cris au-dessus d'elle, se recroquevilla pour anticiper l'impact.

Eraïm me garde, songea-t-elle, partagée entre le désespoir et l'envie d'éclater de rire devant l'absurdité de la situation.

Surielle percuta le sol, rebondit comme une poupée de chiffon, roula sur plusieurs mètres avant de s'immobiliser, couverte de poussière, les plumes froissées.

*****

–Suri ? Suri ! Tu nous entends ?

–Laisse-la respirer, Esmyr !

–Elle doit se relever. Eraïm, si elle a plus que quelques blessures, son père va nous tuer !

–Calme-toi. Suri est adulte et responsable. Et je te rappelle qu'il ne le peut pas.

–Taisez-vous, abrutis ! intervint Hikari. Comment voulez-vous que j'entende si elle respire avec le boucan que vous faites ?

–Ma tête, marmonna Surielle, les mains pressées sur ses tempes.

Elle lutta pour se redresser sans y parvenir.

–Doucement, fit Esmyr, à genoux près d'elle. Comment te sens-tu ?

–J'ai mal partout.

Surielle accepta la main secourable d'Hikari et réussit finalement à s'asseoir. Un vertige la saisit et elle ferma les yeux quelques secondes. Un goût de terre emplissait sa bouche.

–Tu nous as fait une sacrée frayeur, commenta Ystella.

–Qu'est-ce qui t'es passé par la tête ? renchérit Esmyr. Tu as failli te tuer !

L'héritage des phénixOpowieści tętniące życiem. Odkryj je teraz