Chapitre 33

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Hope retint son souffle et tenta de garder son calme. Lorsqu'elle n'eut plus d'air, elle prit une lente inspiration, pour éviter une crise de panique. Criss était déjà reparti en courant vers la place. Hope se prépara à le suivre, mais Ben la retint en lui tenant le bras. Une larme avait coulée sur sa joue.

-Pourquoi ? Pourquoi tu dois toujours courir vers le danger sans réfléchir un peu avant ? Car si tu réfléchissais, tu saurais qu'on a aucune chance et que seule la mort nous attend si l'on essaye de le sauver.

-Parce que si je réfléchissais trop, je n'aurais plus le courage d'agir.

Ben regarda, paralysé Hope s'éloigner en courant. Ses cheveux ondulaient dans l'air. Lorsqu'elle courait ainsi, il pouvait voir en elle la liberté qu'elle représentait. Il n'y avait pas de lien, physique ou psychologique, assez fort pour la retenir. Elle faisait ce qu'elle voulait. Et lui, la suivrait, car il serait toujours là pour elle. Il était son ami. Non, en fait, il était plus que cela. Ce n'était peut-être pas réciproque, il l'ignorait, mais en tout cas pour lui Hope était une moitié qu'il ne pouvait abandonner.

La nuit tombait doucement sur le Gouffre lorsque Hope arriva à la place du village. Celle-ci était empreinte d'une pénombre sinistre. Au centre, trônait un bûcher imposant, dressé comme un sombre avertissement. Sur le bûcher de fortune, Arthur était retenu par des cordes, son visage pâle marqué par la terreur.

La foule s'était agglutinée autour du brasier, contrôlée par de nombreux gardes aux visages impitoyables. Leurs lances et leurs épées étincelaient dans l'obscurité, prêtes à réprimer toute révolte. Parmi les villageois, certains affichaient des regards empreints de curiosité malsaine, tandis que la plupart laissaient échapper des larmes silencieuses, conscients de l'injustice qui se jouait devant eux.

Au sommet d'une estrade, un garde qui devait être mieux gradé que les autres tenaient une torche allumée. Lorsque Hope était arrivée, il avait entamé depuis longtemps son discours qui annonçait que l'on ferait d'Arthur un exemple et qu'il fallait le brûler pour libérer le monde d'un sang-mêlé, un être qui par sa seule existence défiait les lois du royaume.

Le bûcher lui-même était entouré de bûches de bois séché, attendant que la sentence soit exécutée. L'odeur de la fumée imprégnait déjà l'air, emportant avec elle l'espoir d'un dénouement juste et clément. Dans cette scène tragique, le ciel était sombre et menaçant, comme s'il partageait le chagrin et l'horreur qui envahissaient le cœur des villageois.

Arthur, bien qu'effrayé, gardait la tête haute, résolu à affronter son destin avec dignité. Ses yeux bicolores brillaient d'une lueur de détermination et d'innocence, bien que condamné par des adultes aveuglés par la haine et la superstition. Il s'était toujours préparé à un moment pareil. Il savait que cette fin qui lui était destinée était celle qui avait le plus de chances d'arriver. Il contempla la foule, à la recherche de son père. Lorsqu'il le vit, des larmes perlèrent sur ses joues. Il bousculait la foule pour s'approcher de lui. Non, en réalité, il n'était pas prêt, il voulait retourner chez Criss. Mais il avait peur que s'il l'appelait, alors il mettrait son père en danger. Il cria néanmoins :

-Papa, je te demande pardon et je te remercie de m'avoir permis de vivre et d'avoir été mon père.

Cependant, tout n'était pas encore joué. Le destin d'Arthur n'était pas scellé, et peut-être, au dernier moment, une lueur d'espoir, un acte de courage ou une intervention providentielle pourraient encore changer le cours funeste de cette soirée sinistre. Arthur rêva d'un miracle. Il n'avait jamais rien demandé au monde, qui avait pourtant été cruel envers lui. Il regarda le ciel dépourvu d'étoile et chuchota :

La Rose NoireOù les histoires vivent. Découvrez maintenant