La Rose Noire

Chapitre 41

-Chers membres, certains d'entre vous l'auront peut-être compris, mais le combat final approche. Nous avons été tous formidables, géniaux et incroyables. J'aimerais féliciter chaque membre. Car nous faisons tous partie de la Rose Noire. J'ai beaucoup aimé être à la tête de cette organisation et j'espère avoir été à la hauteur d'un chef. Ce fut un honneur. Ces années sont passées bien vites. Mais à présent, il est temps de devenir plus solidaires que jamais. Notre Pissenlit, à elle seule, est en train de changer le Gouffre, alors avec notre appui, elle pourra changer le royaume tout entier. Je compte sur chacun d'entre nous pour lui apporter son soutien. Parlons maintenant des faits. La milice nous a enfermés dans le Gouffre. Pour sortir tous, nous devrons la vaincre. Une bataille s'annonce. Plusieurs d'entre nous perdront la vie, alors si vous vous joignez au combat, comprenez bien que vous pourriez ne jamais rentrer chez vous. Dès à présent, je laisse la parole à Iris qui, resté toujours aux côtés de notre Pissenlit, a passé une grande partie de son temps à élaborer une stratégie. Nous pouvons le dire, la Rose Noire a un formidable stratège, promis à un grand avenir.

         Ben, légèrement stressé, s'avança. Il observa son auditoire avec un regard sérieux et intense. Tous l'observèrent avec respect. Personne ne prit la parole pour s'opposer au fait qu'un enfant influençait leurs destins. La confiance était un pilier de la Rose Noire qui pouvait surprendre.

-Je voudrais initialement vous remercier de m'accorder votre confiance. Je ne vous connais pas encore bien, je n'en ai pas eu le temps. On aurait dû se côtoyer encore pendant bien des années avant les premiers combats, mais le destin en a choisi autrement. Qu'importe, pour nous adapter, nous serons prêts à changer nos plans autant qu'il le faudra. Une source sûre, un petit garçon courageux, nommé Pierre, nous a communiqué que le Pissenlit devrait tomber dans une embuscade d'ici peu. En effet, la milice lui a demandé d'escorter la Pissenlit dans un endroit précis, où elle sera attendue par une armée, afin de réduire au maximum ses chances de fuite. Le point positif, c'est que leur chef, Jack Lancaster, sera présent. Cela signifie que nous pourrions éliminer de nombreux gardes et capturer leurs chefs en une seule bataille. Le plan n'est pas difficile. Le Pissenlit se rendra bien dans la gueule du loup. Elle fera semblant d'être tombée dans le piège. Lorsque la milice mettra la main sur elle et baissera sa garde, nous l'encerclerons, pour empêcher la fuite des gardes et de Jack. Il sera notre cible principale. Il nous le faut vivant, pour faire pression sur le reste des gardes. Il deviendra notre otage. Votre rôle est clair, vous battre contre les gardes. Celui du Pissenlit sera de simuler la surprise, la terreur. Si elle ne venait pas, les gardes ne sortiraient pas de leur cachette, si elle sera trop sûre d'elle, ils comprendront bien vite qu'il y a anguille sous roche. Ce plan est d'une simplicité déconcertante, j'en ai bien conscience, mais je vous assure avoir réfléchi longuement. De plus, pour la première fois, on a un coup d'avance sur la milice, alors nous devons sauter sur l'occasion.

         Tous hochèrent la tête avec respect, leurs visages tendus par la pression. Le grand jour arrivait et beaucoup craignaient de ne pas être prêts. Mais tous étaient déterminés, car c'était pour cela qu'ils avaient rejoint la Rose Noire. Tous levèrent alors, sans prévenir, le poing et crièrent :

-La justice fleurira dans la Rose Noire

         Alors le maire reprit la parole pour donner les dernières informations. Le surlendemain, leur opération allait commençait.

         Hope prit une décision risquée mais importante. Elle se rendit chez ses parents. Lorsqu'elle entra à la maison, sa mère courut vers elle pour l'embrasser. Son père la regarda de loin.

-Maman, papa. Je dois vous révéler un secret, je ne peux plus le garder pour moi plus longtemps.

         Ses parents ne répondirent rien, désireux de savoir ce que leur fille voulait leur dire.

-Je ne suis pas en sécurité et je ne le serai pas avant bien longtemps. Je savais que si je vous le disais vous voudriez m'arrêter, mais je n'ai plus le droit de vous le cacher. J'ai rejoint un groupe clandestin. Et avec lui, je m'apprête à me battre contre les injustices d'Avaloria. Je pourrais mourir et je sais que vous ne voulez pas que je suive le chemin entrepris par Gabriel, mais je n'ai pas pu me l'empêcher. Je vais finir ce qu'il a commencé. Hélas, je ne reviendrai peut-être pas. Et alors, je voulais vous dire que je vous aime forts. Et que je suis désolée.

         Son père s'approcha d'elle et elle eut un mouvement de recul. Il ne l'arrêterait pas. Il n'avait pas le droit, même en tant que géniteur. Elle avait décidé de vivre sa vie ainsi, elle ne changerait rien.

         Sa mère l'avait laissée et elle la regardait tout en pleurant. Elle ne comprenait pas pourquoi ses enfants continuaient à se mettre en danger. Elle en venait à se demander si elle n'avait pas raté une étape de leur éducation. Elle regrettait sa maladie plus que jamais, elle ne lui avait pas laissé beaucoup de temps pour s'occuper de ces enfants. Elle aurait tant aimé pouvoir vivre avec sa fille. Et puis, ces derniers jours, elle avait vraiment dû avoir besoin d'elle. Ses larmes continuaient à couler alors qu'elle se rendait compte de combien sa fille était forte.

         Son père avait, au début, voulu instinctivement l'enfermer pour la garder en sécurité. Mais il aurait eu tort. Hope ne pouvait pas être arrêtée, elle était un esprit libre, comme le vent.

-Hope, est-ce vraiment ton choix ? Même si, par notre incapacité à payer tes taxes, tu es une Exclue, faire la traversée te permettrait d'avoir une belle vie.

-Je ne veux pas d'une belle vie en sachant que des gens que j'ai abandonnés ici n'en ont pas une. Je suis une habitante du Gouffre et je compte y rester et me battre pour qu'un jour il soit meilleur.

-Très bien, si c'est ce que tu souhaites. Tu as le droit de faire tes choix. Sache que tes parents seront toujours là pour toi. On te soutient. Parce que ça aussi, c'est notre rôle.

-Alors, vous n'êtes pas déçus?

-On ne l'a jamais été. On est incroyablement fiers de toi. On est seulement inquiets. Hope, vit ta vie comme tu l'entends, mais je t'en prie, reviens.

         Ses parents serrèrent Hope dans leur bras et ils pleurèrent tous ensemble. Hope allait revenir, ne serait-ce que pour ses géniteurs. Elle se sentait libérée d'un poids. Ses parents savaient maintenant. Elle ne devait plus leur cacher la vérité. Son père partit un instant et sa mère en profita pour lui poser une question :

-Mon amour, est-ce que ça va ?

         Hope cacha mal sa surprise face à cette question. Elle réfléchit, devait-elle mentir ? Elle refusa de le faire. Sa mère devait savoir comment sa fille se sentait.

-Non, maman, ça ne va pas. C'est trop dur, je n'y arrive pas. Mais je m'accroche parce que je sais que beaucoup de personnes comptent sur moi. Pourtant, j'aimerais tellement lâcher prise.

-Ton frère non plus ne voulait pas partir. Lui aussi, il nous avait parlé. Mais ton père et moi, on a préféré se taire. On pensait que si tu ne savais rien, tu n'aurais pas eu envie de rejoindre la même organisation. Pourtant, tu l'as fait. Je suis désolée de ne pas t'en avoir parlé, mais Gabriel lui-même m'a demandé de garder le secret. Tout ce que tu dois savoir, c'est que si tu veux arrêter, tu peux le faire. Je t'accueillerai toujours à bras ouverts et jamais je n'aurai honte de toi. Tu as conquis mon cœur à l'instant où tu es née.

         Alors que mère et fille s'enlaçaient, le père de Hope vint les interrompre.

-Hope, cette lettre, elle est de ton frère. Il m'a dit de ne te la donner que si tu décidais de faire comme lui. Il est temps, à présent, que tu la lises.