La Rose Noire

Chapitre 35

Les membres de la Rose Noire, mêlés à la foule, écoutaient le discours du chef de la milice. Hope pouvait les apercevoir. Elle-même n'avait pas pu résister. Elle souhaitait entendre ce que Jack avait à dire. Elle était encapuchonnée dans une vieille cape. De toute manière il y avait là tant de personnes qu'il fallait vraiment ne pas avoir de chance pour être repéré.

Jack monta sur son estrade et observa la foule. Il sourit et les regarda d'un air hautain et supérieur. Tous ces êtres n'étaient, pour lui, que des pions. Mais au milieu de toutes ces personnes, il y avait peut-être celle qu'il cherchait. Il espéra qu'elle l'entende.

-Habitants du Gouffre. Nous souhaitons faire affaire avec vous. Les actes de violence que vous avez commis hier doivent vous tracasser. Nous acceptons de fermer les yeux. Mais cela ne sera pas gratuit, vous vous en doutez bien. En réalité, la milice ne vous demande pas grand-chose. Nous recherchons une criminelle qui, elle, ne peut être pardonnée. Quiconque la livrera à la milice sera récompensée. Des affiches montrant son apparence seront disposées partout dans le village, alors n'hésitez pas à jeter un coup d'œil. Car nous apporter cette personne, c'est changer vos vies. J'espère que vous saurez faire preuve de clarté d'esprit et que vous ne cracherez pas sur la bonté de la milice.

Jack se retira. Les villageois aussi et jamais Hope n'eut aussi peur. Elle était prise au piège. Elle ne pouvait maintenant que compter sur la solidarité des siens. Mais celle-ci venait de se réveiller et elle avait le pressentiment qu'elle s'endormirait bien assez vite.

Dans la forêt, tous se tenaient droits devant leur chef. Comme tous les samedis, monsieur Petit s'apprêtait à discuter avec les siens.

-La situation s'est envenimée. Notre Pissenlit est en danger. Nous risquons de le perdre. Je pense qu'aucun d'entre vous souhaite que cela arrive. Nous n'avons plus réellement le choix. Nous devrons agir bien plus tôt que nous ne le pensions. Car, je pense que vous serez tous d'accord avec moi : on ne peut pas perdre le Pissenlit que nous avons maintenant. Hier, il nous a prouvé à tous sa valeur. Je suis sûre que nous sommes tous impatients. D'ici la fin de la semaine, il sera pour nous temps d'agir, nous n'avons plus de temps. J'ai conscience que tout cela est bien précipité et imprévu, mais vous allez devoir choisir si vous souhaitez vous battre ou non.

-Attendez !

Tous se rivèrent vers Ben. Il rougit alors légèrement, mais ne perdit pas son assurance. Hier, il avait compris quelque chose et il devait partager sa découverte :

-Nous ne prenons pas le problème sous le bon angle. Vous craignez tous que les habitants du Gouffre ne trahisse Hope. Mais au lieu de les fuir, il vaudrait mieux les rallier à nous. Vous les avez bien vu hier. Hope est capable de les pousser à se battre. Si nous arrivons à faire d'eux des alliés, nous serons invincibles. Nous n'arriverons jamais à changer un royaume si nous ne réussissons pas d'abord à changer les mentalités de ceux qui souffrent le plus. Ne soyons pas trop ambitieux. Montrons déjà comme on le peut que notre ennemi peut être battu.

Tous l'écoutèrent et pendirent à ses lèvres. Ben avait raison, actuellement, ce n'était pas la milice mais les villageois qui mettaient le plus Hope en danger. Ben regarda Hope et lui chuchota à l'oreille :

-Tu veux bien m'aider ?

Hope acquiesça. Leur décision était prise : avant de changer tout Avaloria, ils allaient changer le Gouffre.

-Tout est prêt ?

Après le discours du maire, Ben et Hope avaient passé la journée à préparer leurs propres affiches. À présent, le soleil commençait à disparaître et la nuit tombait sur le Gouffre. Leur mission allait bientôt commencer.