Chapitre 4 :

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Écoutant d'une oreille Liban nous expliquer tout ce qu'on ne doit pas faire en ville, je regarde les hauts bâtiments en pierre s'ériger de part et d'autre de notre chemin pour dissoudre l'orage qui tonne dans ma poitrine. Ils semblent si solides qu'ils pourraient être là depuis des siècles. Ils dégagent une impression de stabilité étonnante, comme si rien ne pouvait les balayer. Cela me change des bidonvilles de ma ville.

Je dévisage les alentours. Autour de nous, les bâtiments en pierre parfois colorés de jaune, orange ou bleu, semblent si solides qu'ils pourraient être là depuis des siècles, bien loin de nos bidonvilles, si vite partis en fumée dans le feu de l'incendie.

Il règne une odeur agréable de viande grillée et de pain chaud qui fait gargouiller mon ventre, aucune odeur d'urine et de cocaïne nulle part, en revanche. Soit nous sommes dans un quartier riche de la ville, soit cette ville est bien plus aisée que la nôtre.

Les marchands nous interpellent en cette langue qu'ils semblent tous parler ici, l'espagnol, m'avait dit Analya. Leurs vêtements colorés semblent descendre jusqu'à leurs pieds du type des ponchos qu'on a dans notre ville, mais je remarque beaucoup de tenus beaucoup plus éloignés et moins pratique également – des minis-robes ? Dans la rue ? N'ont-ils pas froid ?

Je ralentis devant la vitrine d'un magasin qui n'affiche que des bottes. Je n'en ai jamais vu autant de ma vie ! En revanche, je ne comprends pas à quoi servent les froufrous dessus. Analya me tire par le bras.

- C'est un magasin de bottes, reste pas plantée là comme ça...

Je la suis en jetant un coup d'œil en arrière.

- Un magasin que pour des bottes ? Il y a pas d'épaulettes et de protèges-bras ?

- C'est un magasin de marque. Elle baisse la voix. Ici les bottes ne servent pas à se protéger les pieds pendant qu'on se bat, c'est quelque chose que les gens achètent principalement parce qu'ils trouvent ça jolie, ou pour paraître plus grand.

Je fronce les sourcils.

- Les bottes ça rend pas plus grand.

- Si, quand ils ont des talons.

Ah, je pensais que c'était le présentoir. Je fronce les sourcils à nouveau, et essaye de comprendre comment on peut marcher avec ça sous les talons.

- On tourne à la prochaine rue à droite.

Nous sommes forcés de ralentir à cause de la densité des gens sur le trottoir et le peu de place pour marcher à cause des voitures et bus qui prennent tout l'espace et nous pètent à la gueule. On est obligé de se serrer pendant que les machines démoniaques écument la ville.

Nous progressons comme nous pouvons, mais les passants semblent à moitié aveugles ou alors très déterminés à me rentrer dedans parce que j'ai l'impression de devoir tous les éviter un à un, ce qui est encore plus compliqué à cause des animaux qu'ils tiennent par un fil. Je n'ai pas compris à quoi ils servent, mais je crois que les humains aiment ramasser leurs crottes.

Je jette des coups d'œil autour, frustrée d'avancer aussi lentement, mais Liban et Analya semblent déterminés à suivre le rythme d'escargot de la foule. Sentant que la cocotte siffle, je me fraye rapidement un passage dans la foule en faisant attention à ne toucher personne pour ne pas déclencher des réflexes malencontreux, Ash dans ma trace.

Nous tournons à la rue que nous avait indiqué Analya où heureusement, il y a moins de monde. Quelques minutes plus tard, les bonnets des deux Àlfars tournent dans la rue. Liban nous fusille du regard.

Les serres du Corbeau - Double-âme [3]Where stories live. Discover now