Chapitre 37 :

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J'entends des bruits de pas derrière moi alors que Laaja félicite Kaïcha. Akan m'attrape le bras, et me prend à part. Son regard ambré si caractéristique de son Clan plonge dans le mien.

- Shari. Tu dois accepter...

Je me détache sèchement et me retourne.

- J'ai une condition.

Il s'immobilise à son tour et plisse les yeux, aussitôt méfiant. Son visage est marqué par la fatigue et les responsabilités qu'il accumule depuis l'attaque. Bien qu'il veille à être toujours coiffé et habillé de manière décente, ses cernes en disent long sur ses nuits. Face à un esprit aussi coriace, je dois m'imposer tout de suite ou je me ferais écraser.

- Je reste. Dis à Liban que je ne reviendrai pas avant un mois.

Les paupières d'Akan s'abaissent mi-clos, comme un prédateur repérant sa proie.

- Les Cerfs sont dans leur droit. Je n'ai rien à leur dire là-dessus. De plus, tu as du culot d'imposer des conditions alors que ce n'est pas toi qui valideras le fait que Kaïcha reste. Cette décision a déjà été prise.

Il fait comme s'il était avec les Cerfs, mais il nous a donnés une semaine de plus. Je suis sûr que ce qu'il voudrait réellement n'a rien à voir avec moi là-bas, mais avec moi ici. Je ne sais pas pourquoi, mais il a besoin de moi. Je croise les bras et esquisse un sourire détestable.

- Mais je ferai de sa vie un enfer si elle reste. Tu sais que je le ferais. Je ferais tout pour qu'elle parte et tu n'as pas idée de ce que tout signifie. Ce serait beaucoup plus facile si tu m'avais de ton côté.

Le regard sombre du Hamu reste insondable.

- Je t'ai déjà dit que je n'ai pas mon mot à dire. Tu devrais t'estimer heureuse que j'ai négocié ce délai d'une semaine, ils voulaient te faire revenir ce midi.

- Mais je ne m'estime pas heureuse, je réplique.

Dans l'atmosphère qui suit, j'ai l'impression d'entendre mon cœur résonner dans le couloir tellement il bat fort. Je lutte pour ne pas essuyer la transpiration qui mouille ma nuque. Je défie directement un Hamu, sur son propre Pavillon. Des centaines de pensées fusent dans ma tête, je me demande si j'ai bien fait de suivre mon instinct et le pousser si loin. Qu'est-ce qui va arriver s'il décide de me jeter à la porte tout de suite ? Il me fixe dans le plus long silence de mon existence.

- Est-tu prête à tout pour rester un mois de plus ?

Je prends une rapide inspiration et me force à ralentir mon rythme cardiaque. Tout ? Non. Une pique glacée s'enfonce dans ma colonne vertébrale. Quel est son plan avec moi ? Je me redresse et plante mes yeux dorés dans les siens.

- Oui.

Il m'évalue du regard en silence, puis tourne les talons.

- Viens dans mon bureau demain à 11h, je te dirais quoi faire.*


...


- QUOI ? Il s'exclame.

Ash se redresse - ou plutôt essaye dans la mesure où il plaqué sur un lit. Ses bleus commencent à s'effacer progressivement, mais sa jambe profondément blessée l'empêche toujours de se lever. Mon regard glisse sur les draps qui ne vont pas tarder à se déchirer.

- Fais attention aux draps.

Il baisse les yeux sur ses mains, mais son attention revient aussitôt sur moi.

Mince. La diversion n'a pas pris.

- Je refuse ! Non !

- C'est l'unique solution. Il n'y a pas d'autres choix. Ash, s'il y avait un autre choix, n'importe quel autre choix, je le prendrai, crois-moi !

Les serres du Corbeau - Double-âme [3]Where stories live. Discover now