28. Chute (3/5)

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Le reste du repas se passa dans une ambiance de plus en plus bruyante, l'orchestre jouait dans l'indifférence générale. Les enfants étaient repartis s'amuser.

Moi, je manquais d'idées pour d'autres pièges. J'étais rattrapée par la morosité. Que faire pour mettre Chloé plus mal que ça, la toucher sans que cela ne retombe sur d'autres prestataires ?

Je revins vérifier le planning, et mes amies me suivirent. Le spectacle de sons et lumières allaient commencer. Les régisseurs étaient déjà derrière leur borne de commande. Tout allait être géré via leurs ordinateurs. L'orchestre savait quoi faire, sa partition était réglée pour toute la durée du spectacle.

L'équipe de service débarrassait les tables et nettoyait les nappes. Dans les cuisines, on dressait le chariot pour la pièce montée qui serait dévoilée à la toute fin du numéro.

– Oh, putain, mais oui, je sais ! s'exclama Laura.

Elle nous emmena dans l'arrière-salle des vestiaires, un genre de pièce-entrepôt.

– On va la prendre à son propre piège ! Sa jalousie ! Enlève ton nez !

– Quoi ? paniquai-je.

– Fais-moi confiance, tu vas porter un loup pour dissimuler ton visage ! Ramène ton maquillage, Marion !

Elle se précipita vers sa palette.

– Anne, trouve-nous une belle tenue !

– Oui, je sais, piailla-t-elle, exaltée.

Elle s'affaira vers l'une des armoires immenses.

– Vendredi soir, le propriétaire a fait entrer des costumes pour un opéra qui va avoir lieu le week-end prochain. Autant faire les choses en grand !

Anne revint avec une robe à crinoline impressionnante, digne des plus belles divas. Sa couleur dorée rappelait ma robe au bal de promo que je n'avais pas vécu. Comme si le moment qui allait venir allait boucler la boucle. Comme si le destin avait tout prévu.

– Enfile-ça ! ordonna Laura.

Je me dépêchais de vêtir l'amas de tissu lourd. Marion ôta mon faux nez, je me sentis revivre, il faisait chaud là-dessous. Elle nettoya mon visage et me maquilla en vitesse. Anne réalisa un chignon moins formel, du mieux qu'elle put à cause de ma chevelure courte. Enfin, Marion posa le loup d'or sur mes yeux et noua la ficelle derrière ma tête.

Dans la glace, je vis une actrice d'opéra.

– Qu'est-ce que je dois faire ?

– Tu vas mettre tous les atouts de ton côté pour la faire crever de jalousie. Là, t'es la plus belle et la plus mystérieuse de toutes. Maintenant, c'est ta grande scène, tu vas chanter !

– T'es folle !

– Ne te dégonfle pas ! Pitié, ne te dégonfle pas !

En réalité, je crevais d'envie de le faire, c'était la meilleure idée. J'étais toujours cachée, plus d'Amanda l'organisatrice, ni d'Amanda Laracello. Représentation unique.

Chloé me reconnaîtrait mais pas Dimitri. Je pourrai dire que c'était une surprise. J'allais jouer de mes charmes pour que la mariée ne soit plus le centre du monde, j'allais la prendre à son propre piège sur le terrain de la jalousie et de l'insécurité. J'allais lui voler la vedette.

– Ok, amène-moi vite le chef d'orchestre !

Il ne restait plus que dix minutes avant le lancement du spectacle. A l'extérieur, le chanteur avait déjà annoncé aux convives et aux mariés de se rendre devant le bâtiment sans leur dire pourquoi. Seuls les mariés et moi savions ce qui devait se passer.

L'orchestre allait jouer sur le côté une musique symphonique digne des plus grands films pendant que le spectacle se déroulerait.

Je m'entretenais avec le chef d'orchestre et les régisseurs. L'orchestre me confirma connaître la chanson que je voulais chanter.

Enfin, à quelques secondes du décompte, le chanteur revint sur scène :

– Mesdames et messieurs, voici une surprise préparée par les mariés, et aussi l'organisatrice de ce beau mariage, Amanda.

Le silence envahit le parc. Les invités murmuraient, puis le spectacle commença, avec ensuite les premières notes de violons. Les premières lumières habillèrent les pierres de l'édifice.

Le thème musical tournait en boucle, puis après quelques minutes, je commençai à chanter, hors de la scène. Cela me donna du courage et je fis ensuite mon entrée sur le premier refrain.

La cerise sur la pièce montée (édité)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant