Chapitre 2: Le Xiaoren (partie 2)

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Pour leur premier jour en tant que maître et disciple, Shi Chang invita son nouveau protégé, épuisé et courbaturé, à manger un vrai repas comestible et à se reposer dans une auberge. Yuan Sunjie ne pouvait être plus heureux.

Assis à table, Shi Chang décida de commencer la formation de son disciple :

« Yuan Sunjie, tu penses qu'un cultivateur est fort, c'est pour cette raison que tu veux en devenir un, n'est-ce pas ?
— Hmm, acquiesça-t-il.
— C'est donc pourquoi tu as porté soixante-dix kilos depuis toutes ces heures ? Tu penses que travailler ses muscles est suffisant pour devenir fort ? Je suis un cultivateur, je devrais être puissant et j'aurai pu porter tous tes sacs sans problème, alors pourquoi ne m'as-tu pas demandé de l'aide ? »

Yuan Sunjie ramena ses mains sous la table et baissa les yeux. Il marmonna doucement, embarrassé que Shi Chang pensât qu'il soit faible.

«...Shifu, je suis votre disciple. C'est mon devoir de porter les affaires et de servir Shifu... »

Shi Chang leva le verre de vin servi par l'aubergiste qui avait amené les plats appétissants et soupira avec amusement :

« Pour être vraiment fort, il ne suffit pas de travailler son corps, mais aussi sa tête. Un idiot musclé ne verra jamais plus loin que le bout de son nez et se fera avoir par les autres. Le cerveau est un muscle tout aussi important que le corps. Première leçon : apprends à te servir de ta tête ! »

Yuan Sunjie sursauta et se mit à réfléchir. Il ne se considérait pas comme une personne de peu d'intellect, mais hormis porter ces quatre sacs à la force de ses propres bras, quel autre choix pouvait-il bien avoir ? Ce n'est pas comme s'il aurait pu les faire disparaître, si ?

« Shifu, comment ma tête aurait pu porter quatre sacs si lourds ? Si vous avez de l'argent pour louer un âne ou un porteur, vous auriez pu me le dire !
— Idiot ! Je n'ai pas d'argent ! glapit Shi Chang. Je les ai bien portés pour venir, non ? Moi, j'ai utilisé ma tête.
— Comment avez-vous fait ? » demanda Yuan Sunjie en se penchant.

Sa curiosité était piquée à vif. Le jeune garçon eut une idée lumineuse soudaine :

« Vous avez utilisé vos pouvoirs de cultivateur ! s'émerveilla-t-il avec des étoiles dans les yeux.
— J'ai trouvé un couillon pour porter mes affaires voyons ! » lâcha Shi Chang en lui postillonnant du vin sur le visage et il éclata soudain de rire. Il s'esclaffa si fort que les autres convives de l'auberge se retournèrent pour le fusiller du regard.

Le visage de Yuan Sunjie se ternit de lignes noires. Il ne savait si c'était dû à la fatigue ou à la claque qu'il venait de prendre, mais toutes les bonnes résolutions qu'il avait prises la veille quand il ne pouvait pas s'endormir, où il s'était juré vingt fois sur sa couche de changer de comportement, manquèrent de s'envoler en vaines promesses. Yuan Sunjie eut le sentiment de s'être fait avoir une deuxième fois dans la même journée. Une veine gonfla sur son front et il tenta vainement de calmer sa respiration pour brider ses nerfs.

« Vraiment belle leçon, Shifu, ricana-t-il en sifflant entre les dents. Se servir de sa tête pour profiter des autres, c'est intéressant.
— Tss ! Je ne t'ai pas dit de profiter des autres, idiot ! fit Shi Chang en posant bruyamment son verre sur la table, le moins du monde offusqué. Utilise ta tête et cela concerne aussi tout ce qui s'y trouve ! Tu as de grands yeux dorés, sers-t'en pour observer autour de toi et apprends à voir au-delà de ce que tu ne vois pas. Sers-toi aussi de ta tête pour évaluer les autres qui t'entourent. Il avala une bouchée de riz et reprit sur le même ton. Je t'ai juste donné ta première leçon ! Tu portais un talisman Baoshi* qui s'alourdit quand il est actionné. »

L'Éternité d'Une SecondeWhere stories live. Discover now