Chapitre 24 : La prophétie

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La salle commune des Oiseaux-tonnerre était plongée dans la pénombre, éclairée seulement par les deux cheminées aux braises mourantes. Seul le silence était audible à cette heure tardive dans Ilvermorny. Un peu partout, il régnait, pesant, rassurant, comme si dans ces lieux agités chaque journée, la nuit avait le pouvoir de tout arrêter.

Mais en ces lieux où tout semblait s'être stoppé, deux dissidents à l'ordre du temps continuaient à garder les yeux ouverts, rivés dans la direction de l'autre.

Harry faisait les cent pas dans la salle commune vide d'autres signes de vie. Il tournait sans arrêt, comme un lion en cage, levant les yeux au plafond et lançant des regards tantôt furieux tantôt désespérés à la seule porte de l'endroit, comme si elle pouvait lui apporter une quelconque aide dans sa situation.

Il était conscient qu'il ne pouvait rien faire, mais subir en silence n'avait jamais été son fort. L'envie de courir et de rejoindre le responsable de ses tourments pour arrêter ceux-ci lui avait effleuré l'esprit des centaines de fois. Mais il ne pouvait pas le faire. Il avait promis, Severus Rogue tenait à être le responsable de Tom Jedusor. Qu'il essaie.

Et en attendant, le brun s'était résigné ; il allait devoir souffrir du lien sans pouvoir le refermer.

Serrant les poings alors qu'un profond sentiment de rage le percutait de plein fouet il grinça, figé comme une sentinelle devant la porte.

— Pourquoi est-ce qu'il ne se referme pas !

Ce lien, ce pont entre les émotions de Tom et les siennes, ne s'était jamais clos. Depuis qu'il s'était brutalement ouvert le lien entre lui et Tom était resté ainsi, béant. Le laissant ressentir chacune des émotions du mage noir, sans jamais s'apaiser, sans jamais s'arrêter.

Elles lui semblaient exacerbées. Elles n'étaient pas à lui et pourtant, elles l'influençaient et le faisaient souffrir. Il luttait contre elles depuis plusieurs heures maintenant et il se sentait à bout de souffle.

Dans un soupir plein de fatigue, le lion posa sa main puis son front contre la porte définitivement close de la tour. Il ne pouvait pas l'ouvrir.

Depuis que le couvre-feu était tombé, les mots de passe n'avaient plus aucune utilité, il aurait pu la détruire, la réduire en lambeaux et partir, mais il ne voulait pas le faire.

Se laisser aller et partir, abandonner et rompre la promesse qu'il avait faite à Rogue, était hors de question.

Rogue pensait, à sa manière, l'aider en éloignant Tom de lui et... même si ce n'était pas le cas, Harry pensait que laisser Tom avec Rogue ne serait-ce que quelques jours suffirait pour que son professeur arrête de le voir de la même manière qu'il voyait Voldemort.

Même si Tom souffrait et qu'il ressentait chacune de ses émotions, même s'il souhaitait plus que tout que cela s'arrête, il ne pouvait pas tout fracasser et aller rejoindre Jedusor. Ce n'était pas une solution. Tom finirait forcément par s'apaiser, jamais Rogue ne le blesserait physiquement, sa douleur était émotionnelle.

Alors que les sentiments du jeune Seigneur des Ténèbres passaient avec brutalité du désespoir à l'affection avant de revenir sur une certaine sérénité et de rebasculer sur de la colère, Harry ferma les yeux douloureusement et se crispa en prononçant d'une voix épuisée.

— Je t'en prie, arrête, laisse-moi tranquille...

À cela sa magie, qu'il tentait de retenir, s'agita autour de lui, alourdissant l'air. Cela ne fit qu'augmenter plus encore la tension du Survivant qui resta complètement immobile quelques secondes avant de reprendre son souffle.

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