Chapitre 37 : Le Beau et le Monstre

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Blanc, tout était blanc autour de lui. Tom ne voyait pas à plus de quelques centimètres, sa magie ne lui répondait pas et il sentit son souffle se raccourcir. Il détestait ça. L'impression d'être piégé. De ne pas voir alentour, de ne pas pouvoir faire appel à sa magie. Ça lui rappelait l'orphelinat. Ça lui rappelait la guerre, le blitz allemand. Là où, dans une ville qui se faisait bombarder et où toutes les lumières devaient être éteintes, il se retrouvait seul dans le noir avec pour unique compagnie la sonnerie stridente, annonciatrice de morts imminentes. Abandonné, privé de sa magie dans un environnement hostile.

La directrice l'oubliait lorsqu'il fallait évacuer les orphelins pendant l'alerte. Elle l'oubliait avec plaisir. Elle le faisait exprès. Ce n'était pas seulement un oubli, lorsqu'elle faisait l'appel, elle se contentait de sauter son nom sur la liste, comme s'il n'existait pas. S'il avait le malheur de se faire remarquer, de les suivre ou de se plaindre, c'était pire encore. Insultes et coups. Son enfance et son adolescence s'étaient déroulées dans la violence. Elle lui était coutumière. Autant que la noirceur du cœur des hommes.

Les nuages noirs du bombardement ayant sévi sur Londres se confondirent pendant un instant à ses yeux avec la brume pourtant blanche et inoffensive qui recouvrait le Mont Greylock et pendant un instant, il oublia l'épreuve, la première tâche.

Tom oublia avec qui il était et où il était. Son âme se remplit de la solitude qui avait longuement été la sienne et la douleur que cela provoqua dans son cœur lui parut banale, habituelle.

Dans son esprit il n'y avait que les images de ce passé dont il ne pouvait se détacher. Ce n'était pas compliqué pour une âme déchirée de revivre en boucle les traumatismes qui l'avaient conduit à ces extrémités. Vouloir l'invulnérabilité, ne plus désirer rien d'autre que l'inertie émotionnelle.

Il se serait perdu à nouveau, aurait souffert de ses souvenirs d'enfance encore longtemps s'il avait été véritablement seul en cet instant. Cependant cela faisait un moment maintenant que son âme n'était plus seule et aussi facilement que le brouillard l'avait plongé dans l'horreur, il fut dissipé. Emportant avec lui les lamentations de son âme.

La brume se découvrit autour de lui. Autour d'eux. Le ciel lui apparut enfin, il ne voyait pas bien loin devant lui mais il le voyait de nouveau et au-dessus d'eux le ciel parut devenir un couloir bleu. Protecteur et bienveillant, un halo céleste qui suivrait ses pas tant qu'il se tiendrait sous son égide. Tant qu'Harry l'illuminerait, son passé ne pourrait le dévorer. La noirceur de son cœur resterait repliée loin de son âme écartelée qui tentait de l'oublier.

Alors que la brume s'était assez dissipée pour qu'il puisse voir son visage, Harry lui sourit. Tom sentit l'intégralité de son être se réchauffer et le bombardement s'évanouit pour de bon. Son âme s'agrippa à celle de celui qui lui souriait. Il eut l'impression d'être immortel. Éternel, tant qu'il pourrait continuer de le contempler.

Un court instant s'échappa devant lui. Tom aperçut les mains d'Harry Potter fouiller dans l'une de ses poches pour en sortir quelque chose et alors que le jeune Seigneur des Ténèbres reprenait conscience de l'endroit où il était de ce qu'il y faisait, son âme liée lui souffla.

§ Retourne-toi. §

Il lui obéit sans la moindre hésitation, sa confusion ne changeait rien au fait que son âme reconnaissait en Potter la seule raison de vouloir ressentir autre chose que l'apathie. Pour pouvoir ressentir l'amour. Encore. Jusqu'à la folie.

Dos à lui, Jedusor sentit le corps du Gryffondor derrière le sien juste avant de voir des mains et des bras encadrer son cou pour y attacher quelque chose. Avec lenteur, le Serpentard attrapa la chose en question entre ses mains alors que le fermoir d'une chaîne, reliée à un pendentif, était relâché au-dessus de sa nuque.

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