Chapitre 38 : Épreuves argentiques

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Essoufflé. Fuite. Protection. Combattre. Protéger. S'essouffler. Souffle, essoufflement. Se battre. Fuir. Être à bout de souffle. Encore des ennemis. Activer la balise, courir, se protéger, se battre, fuir. Être en bout de course. Nuit. Froid. Souffrir. Souffre, souffle.

Brume... blanche et froide, neige ? Haleter. Inspirer, expirer. Flocons ?

Harry Potter leva tout à coup les yeux au ciel. Renversant la tête à l'instant où des flocons se mirent à danser au-dessus de lui. L'un d'eux s'écrasa contre son front. Agréablement froid. Glacial mais doux. Il s'arrêta, figé par le spectacle. Tout à coup frigorifié par la simple pensée qu'il s'était mis à neiger.

Pendant leur course, quelque part entre la pente rocheuse qu'ils avaient traversée à toute vitesse et la forêt noire et sombre qui s'étendait devant eux : la nuit était tombée et le ciel s'était givré. La brume s'était faite un peu moins dense qu'au matin. Elle paraissait accompagner les flocons légers dans leur danse de plus en plus agitée. De plus en plus violente. À l'image de leurs deux respirations saccadées.

Stoppé dans son élan, la main agrippée à celle de son compagnon de mésaventures, le Survivant expira dans le silence rendu épais et inquiétant par sa soudaine immobilité.

— Il neige.

L'automne était loin d'être terminé. La neige pouvait-elle tomber dès octobre ? Sur le Mont Greylock ça paraissait plausible. Beaucoup de choses semblaient possibles sur le Mont Greylock. Après la journée qu'il venait de passer, Harry aurait dû considérer les intempéries comme naturelles. Une tempête de neige ne semblait pas plus ardue à surmonter que ce qu'ils avaient déjà traversé. Elle se serait seulement ajoutée aux autres embûches et peut-être auraient-ils pu continuer leur chemin malgré elle.

Potter songea à cela, à reprendre son chemin. À continuer. Son esprit encore perdu dans le schéma de pensées qui les avait amenés jusqu'ici sains et saufs. Combattre, courir, protéger, activer une balise. Oublier de respirer.

Toutefois, à l'instant où il amorça un nouveau pas en avant, il sentit une résistance. La pression d'une main contre la sienne. Il se tourna vers celui qu'il n'avait pas lâché depuis leur chute dans la crevasse de la troisième balise et, pour la première fois depuis des heures, ses yeux se fondirent dans ceux de Tom Jedusor.

Lui aussi avait des difficultés à reprendre son souffle. Peut-être même avait-il davantage de mal à récupérer qu'Harry lui-même. Tom était de faible constitution. Sa magie était forte mais sans elle, son corps ne pouvait suivre un rythme aussi soutenu. Sa respiration formait de petits nuages blancs et vaporeux devant sa bouche, il paraissait exténué, gelé. Il avait une stature moins adaptée pour les activités sportives que celle de l'attrapeur de Gryffondor. Élancée et aristocratique mais pas appropriée.

Potter savait que Jedusor finirait par être un homme plus grand que lui, comme Voldemort l'était. Plus grand et certainement plus athlétique aussi. Cependant, il avait actuellement la stature d'un garçon de seize ans, pas particulièrement musclé. Pas fragile pour autant, mais définitivement pas appropriée pour des parcours d'orientations en pleine montagne.

Cette réflexion percuta le lion lorsqu'il réalisa qu'il était évident que le jeune Seigneur des Ténèbres ne pouvait pas avoir autant d'endurance que lui. La guerre l'avait entraîné, trop pour qu'il puisse se rendre compte de la différence qu'il existait entre ses capacités physiques actuelles, lui qui était en pleine possession de sa magie, et celles de son compagnon qui en était privé et n'avait pas été endurci par une année entière à courir derrière la mort.

C'est ce qui fit sortir Harry Potter de sa transe où seule la survie semblait prédominer. Il prit brutalement conscience qu'il ne pouvait pas juste faire cavaler Tom derrière lui pendant qu'il le protégeait. Cette prise de contact avec la réalité réussit à briser sa concentration et il reprit connaissance de l'espace, de son environnement. Après avoir constaté qu'il faisait nuit et qu'il neigeait, l'Oiseau-tonnerre fronça les sourcils et il demanda franchement.

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