Chapitre 44 - Coup de filet

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Entretemps, Daniel O'Reilly fut contacté par Renouf et un rendez-vous fut organisé pour un soir, après la fermeture, entre nous et le conservateur de l'Abbaye.

Ce soir-là, nous nous rendîmes donc dans le musée et examinâmes les gisants sous toutes les coutures. Nous n'y trouvâmes rien de particulier. De toutes façons, soulever la dalle funéraire aurait été impossible, car elle pesait plusieurs tonnes. Déçus, nous nous apprêtions à rebrousser chemin quand, regardant en arrière avec le sentiment d'avoir fait chou blanc, je remarquai, à quelques centimètres du tombeau, une dalle au sol, décalée de quelques millimètres vers le haut par rapport aux autres et dont les joints étaient absents. Je le fis immédiatement remarquer au conservateur.

— Ce n'est pas normal ! répondit celui-ci, passablement irrité. Nous avons fait faire des travaux récemment pour refaire quelques joints abîmés et en effet, cette dalle semble disjointe et les joints manquent. Nous devrons faire une réclamation auprès de l'entreprise qui a fait ce travail bâclé. Décidément, tout fout le camp ! On ne trouve plus de bons artisans !

— Attendez ! dis-je, une idée en tête.

Je me mis à genoux. J'essayai alors de dégager la dalle. Pour ce faire, je sortis mon précieux opinel de ma poche et dégageai doucement et patiemment la pierre de chaque côté, tour à tour pour la desceller.

— Mais qu'est-ce qu'il fait ? demanda le conservateur inquiet à Renouf.

— Chut ! lui répondit  celui-ci.

La dalle bougea légèrement et je réussis à la soulever peu à peu. A force, je finis par la retirer complètement. En dessous, il y avait une cavité assez profonde. J'allumai mon briquet et j'éclairai le fond. S'y trouvaient une dizaine de sacs de toile. J'en sortis un et en tirai une grosse liasse de billets de cent francs. C'était sûrement des faux. Je sortis d'autres sacs similaires, également remplis de billets. Nous les examinâmes attentivement.

— Eureka ! dis-je. Les faux-monnayeurs devaient être en cheville avec un informateur à l'imprimerie nationale car ces nouveaux billets viennent juste d'être émis alors que les plaques gravées ont été trouvées l'année dernière. Ils étaient vraiment bien renseignés. Il faudrait faire une enquête de ce côté-là.

En effet, ceux-ci reproduisaient très fidèlement ceux qui avaient été imprimés au mois d'avril 1964, mais qui n'avaient été émis qu'en janvier 1965, avec l'effigie de Pierre Corneille. C'étaient ceux qui étaient destinés à remplacer les anciens, émis à l'effigie de Bonaparte. Evidemment, ils avaient été imprimés avec les plaques trouvées chez Pierre Malandain quelques mois plus tôt. Le motif de la gravure retrouvée chez lui correspondant bien à ces nouveaux billets.

Je replongeai mon bras dans l'ouverture et sortis encore plusieurs autres sacs. Il y avait des bijoux provenant probablement des braquages de plusieurs bijouteries survenus à Rouen et ses environs les semaines précédentes. Tous les sacs furent sortis un à un. Il y en avait pour une sacrée fortune.

On avait fait coup double, voire triple ! La bande des braqueurs et des faux monnayeurs ne faisait qu'une. Et ses membres étaient liés aussi au meurtre de Bernard Malandain.

Puis, m'adressant au conservateur du musée complètement ébahi :

— Pourriez-vous me donner le nom de l'entreprise qui a fait les travaux ? Ce serait intéressant de le connaître ! Il est probable que le butin ait été déposé là à la va-vite par des faux ouvriers pendant la journée, car sinon, s'ils étaient venus de nuit, ils auraient sûrement déclenché le système d'alarme.

Dès le lendemain, à la suite de la riche idée, bien que moralement un peu contestable, exposée précédemment par moi-même, et comme il a été décidé que je m'infiltrerai dans le milieu, je commençai à préparer ma petite transformation physique.

crimes et flagrants délires : Vendetta Normande - Histoire terminéeWhere stories live. Discover now