♀ CHAPITRE 40 ♀

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J'étais soulagée de voir le visage d'Adam. Maintenant, j'étais certaine qu'ils couvraient mes arrières. Nous nous postâmes devant l'ordinateur. Alex nous demanda de nous dépêcher, j'étais restée beaucoup trop longtemps dans la pièce.

— Adam, comment as-tu fait pour entrer en contact avec nous ? Tu as accès à d'autres choses ? Tu peux voir où se trouve ma sœur ?

— Noa, calmes-toi, me demanda-t-il serein. On a peu de temps. Alex, on a envoyé les dossiers de Nathalia sur votre boite mail. Vous trouverez tout ce dont vous avez besoin.

— Merci, maintenant on doit y aller Noa, m'ordonna Alex.

Je me retournais vers lui rapidement. Je n'avais pas posé à Adam toutes les questions qui me trottaient dans la tête. Mais je voyais bien que je n'avais pas le choix, je devais suivre les ordres. Alex m'expliqua qu'il falsifierait les résultats ce soir avant de les remettre à son chef.

Pendant qu'il me ramenait, il m'expliqua qu'il fallait que je joue la comédie. Être stérile n'est pas censé être une chose des plus joyeuse. Je pris mon air attristé et rejoignis le groupe de femmes inaptes à la procréation, mais qui pouvaient postuler pour un poste. Nous étions trois. J'étais la plus jeune, les deux autres avaient dans la trentaine. Elles ne parlaient pas, elles se contentaient de suivre l'infirmier qui guidait notre groupe. Par réflexe, je regardais chaque caméra que je croisais. L'anxiété qui m'animait devait être perceptible à des kilomètres. Je triturais mes doigts dans tous les sens, remettais sans arrêt une mèche de mes cheveux derrière mes oreilles, je me mordais les lèvres (à certains moments jusqu'au sang). Je n'avais aucune envie de travailler pour un établissement comme celui-ci. Mais si cela me permettait de revoir Elisa, alors je n'hésiterais pas une seconde.

Un sourire léger s'esquissa sur mon visage. Je m'étais attachée à cette petite finalement. Dès la première minute de notre rencontre, je l'avais adopté. Il faut dire que j'avais toujours aimé être au contact des enfants. Être fille unique était mon plus grand désespoir. Quand je repense que je voulais m'enfuir et la laisser toute seule. Je ne savais pas si j'avais pris la bonne décision, si j'avais bien fait de l'emmener avec moi. Peut-être que oui, peut-être que non. En tout cas, nous avions vécu pas mal de choses ensemble, et je m'attachais à elle de plus en plus. Imaginer que je puisse la perdre me fendait littéralement le cœur. Elle était ma sœur à présent, ma seule famille. Je ne pouvais pas l'abandonner. Elle n'avait plus que moi.

Nous arrivâmes finalement dans un dortoir plus petit que le précédent. Il n'y avait que cinq lits. Chacune de nous en avait choisi un, et comme à mon habitude, je pris le plus éloigné. Je me mis en pyjama (si on pouvait appeler le bout de tissu qu'on nous avait donné un pyjama), et m'allongeai sur mon lit. J'observais le plafond blanc, immaculé.

Je repensais à ma vie : une vie bien mouvementée pour une fille de dix-neuf ans. Ma vie d'avant me manquais terriblement. Mes amies me manquaient. Je me souvenais du rire de Sofia, un rire beaucoup plus amusant que la blague en elle-même. Je me souvenais du garçon sur qui Marie avait craqué, un beau brun qu'on avait croisé en soirée. Elle était allée lui demander son numéro, chose que je n'aurais jamais pu faire. Je me souvenais du son de la cloche de mon lycée, strident et énervant. Je me souvenais de ces pestes qui nous critiquait, mais ça nous passait complètement au-dessus. Tout ça me manquait tellement, la vie normale, les rires, la joie... Mes yeux s'humidifièrent. Ce fichu virus avait foutu ma vie en l'air.

Enfin, il n'était pas le seul méchant dans l'histoire. Moi aussi, j'avais foiré pas mal de choses. Avec Maxime notamment... Ma jalousie avait tout gâché. Pourquoi est-ce que j'étais une idiote pareille ?! Je l'avais repoussé alors qu'il essayait de changer, de changer pour moi peut-être. Comment avais-je pu le condamner à cause de son passé ? Il y a moi aussi des choses que j'avais faites, dont je n'étais pas fière, qui étais-je pour le juger ?

Je soupirais en me tournant sur le côté droit, dos aux deux femmes.

Est-ce que j'avais des sentiments pour Maxime ?

Peut-être. Ou peut-être pas.

Je n'avais jamais été réellement amoureuse jusqu'ici, qu'est-ce que j'y connaissais moi hm ? Rien au final. Et puis, il y avait Adam avec qui il s'était passé un truc étrange. Vraiment bizarre même, je ne comprenais toujours pas. C'est comme si j'avais eu une connexion avec lui. Mais je n'arrivais pas à décider si c'était en bien ou en mal. C'est sûr que maintenant, j'avais l'embarras du choix pour les hommes. Mais était-ce vraiment le moment ? En avais-je vraiment besoin ?

Tous ces questionnements me retournèrent le cerveau. Puis la fatigue s'empara de moi, me plongeant dans un noir complet.

* * *

Le lendemain matin, une alarme nous réveilla. J'avais la tête dans le coaltar. Je m'habillai en vitesse, attendant qu'on nous indique ce qu'on devait faire. Les deux femmes n'avaient pas prononcé un mot depuis la veille. Ici, c'était chacun pour soi, et je n'avais pas l'intention de me faire des amies, je comptais partir le plus tôt possible.

Finalement, au bout d'un moment, un infirmier vint nous chercher, nous saluant vigoureusement. Il nous emmena jusqu'à la cafétéria. Là, seuls les aides-soignants, les infirmiers et je ne sais quoi nous attendait. Aucune patiente en vue. Je laissai mes yeux scruter la pièce à tout allure. Mon regard se posa sur une chevelure rousse : Alex était là. Je fis mine de rien, et allai m'asseoir à une table avec mes deux colocataires muettes.

Un homme habillé de noir, aux lunettes rondes vint vers nous.

— Mesdames, je vous demanderai de choisir un moniteur pour les deux prochaines semaines. C'est lui ou elle qui s'occupera de vous enseigner tout ce qu'il y a à savoir. Les moniteurs qui n'ont pas encore d'élèves vont s'avancer face à vous.

Et en effet, six personnes se postèrent face à nous. Alex me regardait avec insistance. Je me levai et allai dans sa direction. Il fit un signe, très explicite, pour que les autres comprennent qu'il me choisissait. Puis tout se passa rapidement. Nous déjeunâmes ensemble et nous voilà partis pour commencer mon premier jour de travail.

Une fois seuls, Alex se pencha vers mon oreille pour me murmurer :

— Dans mon bureau, quelqu'un aimerait te parler.

HEAVENWhere stories live. Discover now