vingt-neuf // glas

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Second Chances, Imagine Dragons

Marcus fit une petite révérence devant la trentaine de personnes qui l'applaudissaient toutes en chœur. Il reconnut quelques visages dans l'assemblée : Travis, qui sifflait avec son index et son pouce; Jenny, qui lui envoyait la main, un gigantesque sourire aux lèvres; Dolores, derrière le « bar », qui levait un verre en son honneur; Daisy, au premier rang, qui sautillait sur place d'enthousiasme; et même Aldous qui, un peu en retrait de la foule, approuvait de la tête ce qu'il venait d'entendre, les bras croisés.

Marcus sourit. Lorsqu'il avait commencé à lire son chapitre à voix haute, il ne s'attendait pas à ce qu'ils réagissent tous de façon aussi chaleureuse. Bien sûr, il se doutait que plus de la moitié de son public l'avait méprisé au cours des mois où sa tête avait fait la une des magazines people, mais son orgueil était chatouillé par tous ces applaudissements, tous ces sourires rivés vers lui — lui, l'enfant prodige des lettres américaines — qu'il se permit d'oublier l'espace d'un instant les médisances sur le Goldbert.

— Si vous êtes curieux de connaître la suite de l'histoire, vous pouvez vous procurer mon livre auprès de monsieur Barnaski, que voici. Sinon, il sera en vente à la première heure demain dans toutes les bonnes librairies du pays. Mesdames, messieurs, merci de vous être déplacés en si grand nombre, passez une bonne fin de soirée!

Il les salua tous de la main et se tourna vers Barnaski qui rayonnait non loin de lui.

— C'est génial, Goldman, génial! Ou plutôt, vous êtes génial! hurla-t-il par-dessus le brouhaha des conversations qui reprenaient peu à peu.

Marcus ne put cependant pas discuter avec lui, car déjà une bonne dizaine de personnes se pressaient autour de lui pour acheter leur exemplaire.

— Ne partez pas trop loin, Goldman, vos lecteurs désirent sans doute des dédicaces!

Aussitôt, des cris d'approbation s'élevèrent parmi les rangs des fidèles lecteurs. Marcus leur sourit.

— Je reviens, ce ne sera pas long, leur promit-il.

Sans s'expliquer davantage, il disparut dans la mer de gens. Sa discussion avec Daisy, tout à l'heure, l'avait convaincu de confronter Harry sans plus attendre au sujet de son comportement étrange des derniers mois. La rouquine avait raison : s'il insistait, il finirait tôt ou tard par comprendre ce qu'il avait bien pu dire ou faire pour embraser le courroux de l'homme qu'il aimait.

Il l'avait aperçu parmi l'auditoire, juste avant qu'il ne commence à lire à voix haute, alors il ne pouvait pas être bien loin. Tandis qu'il tournait la tête dans toutes les directions au point de risquer de choper un torticolis le lendemain, il bouscula sans le faire exprès un jeune homme qu'il reconnut sans peine : Douglas.

— Doug', tu as vu Harry? cria-t-il sans préambule.

Son ami se gratta la nuque.

— Euh, je crois l'avoir partir vers la cuisine pendant que tu lisais tes chapitres...

— Merci.

Marcus mit le cap sur la cuisine et dut jouer à nouveau des coudes pour se créer un chemin jusqu'à destination. Avec tous ces gens massés les uns contre les autres, il avait l'impression que la température dans le salon avait augmenté de dix bons degrés, c'était insupportable. Il épongea son front humide du revers de sa main.

Tandis qu'il se frayait un chemin entre une grosse dame au parfum atrocement sucré et un homme au rire gras, son pied écrasa malencontreusement un verre de plastique vide qui traînait par terre. Il jura dans sa barbe; il n'osait imaginer à quoi ressemblerait la maison une fois tous leurs invités partis.

Rimbaud et LolitaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant