Chap 36 : Blizzard

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Quelques jours plus tard, la réalité du train-train quotidien reprend ses marques.  Louann retourne à l'Université et Jérémy, ayant obtenu le poste de critique pour le magazine hebdomadaire souhaité, s'immerge dans la rédaction de ses articles.  Ils ne se voient donc plus que le soir ou le week-end.  Ils parlent moins, ils sont surchargés par le travail et les études.  Jérémy avec passion et ambition, Louann avec résignation et oubli, réflexe mécanique.  À la petite table de l'appartement près du Stade,  souvent leurs deux têtes sont penchées sur leur clavier respectifs à rédiger ou à étudier.   Levant ses yeux de son écran, les iris bleus la scrutent.  Les prunelles dorés se lèvent vers lui, mais il n'y voit  plus l'étincelle, seulement un miroir indéchiffrable. 
Tard le soir, il va la reconduire chez elle, la raccompagnant au pas de la porte, déposant un timide baiser sur sa joue ou lui donnant une accolade qu'il tente de rendre le plus significatif possible.

« Je suis là » murmure son silence à tue-tête. 

L'entend-elle ? 

La visite impromptue au cimetière et l'anniversaire de la mort de Mariza ont ravivé la plaie au cœur de la jeune femme.  Louann s'est abîmée dans un mutisme à ce sujet et Jérémy considère son attitude comme malsaine.  Il voit bien que sa blessure est à vif. 
N'ayant pas connu un bien grand attachement maternel, il se questionne sur la force et la virulence de cette douleur mais en même temps, il doit avouer qu'il la jalouse aussi.  Cette peine violente et mordante ne peut être issue que d'un sentiment profond envers une personne très spéciale.

Louann lutte quelques temps : elle essaie de pleurer pour se libérer, de verbaliser ses sentiments refoulés, d'expulser cette noirceur qui l'englobe; le tout pour tenter de demeurer vivante, de guérir.  Mais, c'est inexorable, elle s'enfonce, le sel de ses larmes ronge les derniers lambeaux d'espoir qui bordent les muqueuses de sa plaie à vif. 

Cette douleur qui se nourrit d'elle-même.

Cette réalité à laquelle elle ne peut faire face.

Ce blizzard qui lui congèle la tête et le cœur.

Elle ne peut l'affronter.

C'est un vent tournoyant, une spirale qui ravage tout.

Sans pitié.

Insurmontable.

Insupportable.

Alors elle s'isole et se cache derrière une normalité de façade.

Il ne sait comment l'aider.

           Il tente de ne pas perdre sa main.

                       Il s'efforce de la retenir.

Mais...

             Elle plonge.

Louann...

Clair-ObscurOù les histoires vivent. Découvrez maintenant