Chapitre 1 - Routine du matin

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Tous les jours, c'est la même chose. À une heure précise le matin, aux alentours de six heures, c'est le bordel. Tout le monde quitte son appartement en même temps et s'entasse dans l'ascenseur, ne cessant de faire des allers-retours entre les étages.

Et les escaliers, hein ? Vous en faites quoi des escaliers ? Vous ne pouvez pas les prendre.

— Bonjour...

Un « bonjour » discret, timide, presque silencieux alors que la majorité des gens se contentent d'un sourire ou d'un hochement de tête. Et le chat ? Il a mangé votre langue ? Non, mais je vous jure. La politesse n'a jamais tué personne à ce que je sache. Bien sûr, on s'entasse comme des sardines, la tête dans le cul de bon matin, le journal sous le bras, la thermos de café à la main ou pour les plus fous, une de ces mixtures vertes composées uniquement de fruits et légumes parce que « c'est bon pour la santé ». Merde, hein. Vous ne me ferez jamais boire un de ces smoothies bio uniquement sous prétexte que c'est « bon pour la santé ». Personne ne m'enlèvera ma dose de café du matin.

Derrière moi, il y a cette ado vivant au 6e étage. Écouteurs dans les oreilles. Musique à fond. Elle sert de radio à tout l'ascenseur qui profite de ce qu'elle écoute. Avec un tel volume, je ne serais pas étonnée de la voir prendre rendez-vous chez un O.R.L bientôt. Ces gens qui écoutent la musique à fond, je vous jure. Encore, si c'était de la « bonne musique », je ne dirais rien, mais les ados de nos jours n'y connaissent rien à la musique ! Ils se contentent de tubes commerciaux parce que c'est « cool » ou « à la mode ». Et je ne vous parle même pas de ceux faisant exactement la même chose avec leurs enceintes miniatures dans les transports en commun. Une horreur !

Allons bon, Philippine, il n'est même pas sept heures et tu râles déjà. Il paraît que râler, c'est bon pour la santé. Ça réduit les accidents cardio-vasculaires. Voilà un truc qui pourrait battre haut la main ce smoothie vert biolasse (mix de bio et dégueulasse). Puis, râler, c'est typiquement de chez moi. Tout le monde râle. En même temps, je suis née pour râler. Je veux dire, mes parents m'ont appelée comme une île paumée. Philippine. Sérieusement ?! Qui s'appelle comme ça de nos jours ? C'est un peu comme les Valentine. À la base, je suis sûre qu'on devait être des gars et que les parents avaient une idée de prénom bien précise et que, par flemme, ils ont juste féminisé le truc. Valentin est devenu Valentine et Philippe est devenu Philippine. Je me demande si j'aurais été pareille si j'avais été de l'autre sexe. Des fois, je me surprends à me le demander. Pas vous ? Genre, comment je serais si j'étais un gars ? Grand ? Musclé ? Un regard à faire fondre les cœurs ? Du genre sexy ?

— Excusez-moi, vous gênez le passage.

Perdue dans ma rêverie, voilà que tout le monde sort au niveau du parking, me bousculant à moitié, sans la moindre gentillesse, ni rien. Il n'est même pas sept heures du matin et je méprise déjà mes voisins. 

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant