Chapitre 16 - C'est qui le marchand de sable ?

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Il y a des jours où je me déteste. Où je me déteste vraiment, mais seulement à des moments bien précis, comme la nuit par exemple.

Pourquoi est-ce toujours quand j'ai décidé de dormir que mon cerveau, cet incapable, s'allume ? Pourquoi ? Que l'on m'explique ! Toute la journée j'ai besoin de lui, je le sollicite, je le supplie de me sortir d'un merdier de papiers au boulot, mais pas moyen... Cependant, le soir, cet enfoiré se manifeste, s'agite et pense.

Et c'est là que je reconnais que c'est bien mon cerveau : il pense toutefois, il pense à des conneries.

« Oh ! Et si demain j'achetais des choux de Bruxelles ? Ouais, mais j'aime pas les choux de Bruxelles... Alors, j'en ferais quoi ? Pourquoi pas des boulettes que je pourrais jeter sur Madame Roland ? Non, j'ai plus quatre ans, quand même. »

Des fois, je laisse ma lampe de chevet allumée et, m'installant pour dormir, je remarque soudain une fissure au plafond. Cette fissure prend alors une soudaine importance que je ne comprends pas.

« Et si elle s'agrandit pendant que je dors ? Si le plafond me tombe dessus ? Je vais mourir comme une idiote. Y a qui au-dessus de moi, déjà ? Ah oui... Y a le vieux maintenant. Hum, il me tomberait dessus, logiquement. Ah non ! Pas de vieux cochon sur moi ! »

C'est n'importe quoi ! Tais-toi cerveau de Philippine !

« Mais si je dors maintenant, peut-être que mon horloge biologique va me réveiller plus tôt, du coup ? »

Ça suffit, j'ai dit !

« Et si j'allais voir ce que faisait Olivier ? Si ça se trouve, il ne dort pas non plus. Je pourrais lui proposer une belote ? »

Et puis quoi encore ?

Promis, si tu me fais me lever pour ça, il y aura des conséquences.

« Il fait quoi Olivier ? Il est quelle heure, d'ailleurs ? »

On s'en fout de ce qu'il fait, bon sang ! Et l'heure, c'est pareil ! Ne regarde pas l'heure, ne regarde pas l'heure... Noooon !

« Ah, bah ça va ! Il est tôt ! Il n'est que 21h ! Je me couche comme les poules, moi. »

Et alors ? Ça te pose un problème ? Moi j'aime bien me coucher tôt, ça veut dire que je n'ai rien à faire et que je gratte des heures de sommeil gratis.

« Une souris verte, qui courait dans l'herbe... »

Non. Ne chante pas. Ne commence pas. C'est le genre de chanson qui nous reste dans la tête après. Arrête ça tout de suite, cerveau de pacotille !

« Je l'attrape par la queue, je la montre à ces Messieurs. Ces Messieurs me disent... »

Philippine ! Ça suffit maintenant !

« Trempez-la dans l'huile, trempez-la dans l'eau, ça fera un escargot, tout chaud ! »

J'ai envie de me cacher sous mon oreiller, maintenant.

Sérieusement, des fois je me dis que lorsqu'il y a eu la distribution des cerveaux avec les promos les plus intéressantes, je devais être aux abonnés absents. Un peu comme s'il y avait eu un Black Friday sur les cerveaux et que, comme d'habitude, j'ai loupé le coche.

Je loupe toujours les bons plans.

« Un mouton. Deux moutons. Trois moutons... »

Je me hais. Vraiment, il y a des nuits comme ça où je me hais.

« Pourquoi un mouton, d'ailleurs ? Et pourquoi pas une brebis ou une vache ? Ou bien même... un éléphant ! Oh oui, un éléphant ! »

Non. N'y pense même pas.

« Un éléphant qui se balançait sur une toile toile toile, une toile d'araignée »

Noooooooon !

Et vous ? Vous faites comment la nuit ? Si par malheur il y en a un qui me dit qu'il lui suffit de poser la tête sur l'oreiller pour s'endormir... je le déteste d'avance.

Cordialement, Philippine, incapable de s'endormir avant 23 heures.

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant