Chapitre 45 - Lâche-moi la grappe

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Je me sens comme une grappe de raisin lors des vendanges. Une de ces grappes que l'on jette dans un tonneau et que l'on presse avec ses pieds pour en extraire un maximum de jus. Je me sens comme un malheureux grain de raison subissant tout le poids d'un être humain sur mon ventre.

Je vais mourir. Je n'ai qu'une envie, me rouler en boule quelque part et attendre que ça passe.

Mais ça ne passe pas.

— Que l'on m'achève !

Il y a des jours où j'aurais vraiment aimé être née de l'autre sexe. Ils ne connaissent pas ça, eux. Ils ne peuvent qu'imaginer la douleur, l'inconvénient et tout ce qui entoure le mythe des « ragnagna ».

J'ai l'impression d'essayer toutes les positions possibles sur mon canapé tandis que Bora ne bouge pas d'un pouce, couchée à mes pieds. Chanceux de chat. J'aimerais avoir une vie de chat.

— On peut discuter ?

Sans faire gaffe à l'heure, la voix d'Olivier résonne à travers l'encadrement de nos deux appartements. Son ton semble presque calme et, venant de lui, ça m'étonne presque. Je m'attendais à un deuxième round dans le bureau du directeur.

— Si c'est pour me faire la morale, je passe. J'ai déjà une guerre à mener, là.

— Ça ne va pas ?

— Non, Olivier, j'ai mes règles et j'ai mal.

— Ah.

Oui, « Ah ». Tu crois que je me tiens la tête à l'envers par plaisir de me retrouver dans une position des plus inconfortable, mais qui semble être la seule qui me soulage ?

— Je peux faire quelque chose pour toi ?

Me foutre la paix ?

« Me faire des bébés ! »

Ah non ! Ne commence pas, toi. Ce n'est clairement pas le moment et c'est complètement dégoûtant d'avoir un quelconque rapport quand Dame Nature est présente. Un peu de tenue, bon sang.

— Malheureusement, non.

— D'accord.

Il semble déçu. Tant pis. Je ne suis pas d'humeur. Pour rien. Ni pour faire des câlins, ni pour me prendre la tête.

« Reviens, Olivier ! Aide-moi ! »

M'aider à quoi ? Ce n'est pas comme s'il pouvait comprendre.

Je le vois alors revenir avec une licorne sous le coude.

— Tiens.

— C'est quoi ?

— Appuie dessus, tu verras.

Et c'est ce que je fais en attrapant la peluche qui se met à émettre un bruit de pet ce qui me fait immédiatement exploser de rire.

— C'est génial ! Où est-ce que tu l'as trouvée ?

— Ah ! Ah ! C'est une surprise. Je me suis dit qu'il fallait un truc pour te débrider un peu.

— Donc tu m'as acheté une licorne ?

— Non. Je t'ai acheté une licorne qui pète. Classe, hein ? T'en connais beaucoup des gars qui offriraient ce genre de cadeau ?

— J'avoue que c'est une idée plutôt unique.

Je me redresse sur le canapé tandis qu'Oliver s'assoit à côté de moi, enclenchant le bruit de pet par inadvertance en mettant la main dessus.

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant