Chapitre 4 - Une nounou d'enfer

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Quand on habite dans un immeuble, on a une chance inouïe, sans vraiment s'en rendre compte. On participe quotidiennement, bien qu'indirectement, à la vie de nos voisins. Si la voisine du dessus réaménage sans cesse son appartement en poussant les meubles constamment, le voisin d'à côté, lui, est un père célibataire de deux enfants.

Deux démons.

Et tous les démons, à la nuit tombée, se réveillent.

— Au lit ! Au lit j'ai dit ! entends-je crier de l'autre côté du mur.

L'heure du coucher. Un bordel sans nom.

Avec la voix portante de mon voisin, j'ai le droit, chaque soir, à la mise au lit de ses enfants si... charmants. Si je me souviens bien... Pauline 4 ans, démone née et peste de premier ordre et son frère cadet, Basile, 2 ans, éternel pleurnicheur se faisant martyriser par sa sœur.

— Pauline, laisse Basile tranquille !

Quelle chance incroyable de pouvoir participer à un tel événement lorsque je franchis régulièrement la porte pour aller sonner à côté ! Alors bien sûr, cela n'arrange en rien la vie de ce pauvre homme pour lequel j'éprouve la plus grande compassion en le voyant malmené ainsi.

— Oh... C'est encore vous, souffle-t-il presque déçu de me voir me tenir sur le pas de sa porte.

Oui, c'est encore moi.

Et fais attention à comment tu me parles, je ne suis déjà pas d'humeur. Je pourrais être plus ou moins clémente en fonction de la façon dont tu vas t'adresser à ma sainte personne.

Sentez toute la modestie dont je peux faire preuve.

— Je suis désolé... Je présume que les enfants font trop de bruit et que...

Tu présumes plutôt bien, oui, sinon je ne serais pas là.

— Écoutez, je ne vais rien vous apprendre sur votre métier de « père », mais vous savez, tout à fait entre nous, une bonne claque n'a jamais tué personne. Bien au contraire.

Il me regarde avec de grands yeux tout ronds, complètement offusqué par ma remarque. Je sais que la tendance est à la psychologie et qu'il vaut mieux « parler » à son enfant pour l'aider dans son développement plutôt que de lui mettre une bonne fessée méritée.

Mais comment voulez-vous communiquer avec un enfant qui n'a que le mot « caca » à la bouche... et parfois, ce n'est pas que le mot, d'ailleurs.

— Mon Dieu, non ! s'offusque-t-il devant ma remarque, Je n'ai jamais levé la main sur mes enfants. Je m'en excuse, mais vous n'allez quand même pas me dire comment élever mes enfants.

Un peu que je veux ! Philippine, super Nanny, les enfants n'ont qu'à bien se tenir. Une petite claque sur les fesses par ci, un « file dans ta chambre » par là. Et voilà ! L'affaire est dans le sac. Puis, il paraît que ça fait circuler le sang. C'était l'excuse de mon grand-père quand il m'en mettait une de temps à autre : « Arrête de chouiner un peu ! Tu me remercieras plus tard », mais oui, papy... Je te remercie. Bon, j'avoue, ce n'est qu'un prétexte, toute cette histoire. Je ne supporte juste pas les enfants qui braillent.

— Faites comme bon vous semble avec vos nains de jardins, mais par pitié, après une journée crevante, je ne demande qu'un peu de silence pour lire en toute tranquillité, supplié-je presque.

— Je tâcherai de faire attention la prochaine fois.

Même excuse que ces trente-quatre dernières fois. Même sourire faux. Même fermeture de porte au nez. Au final, j'aurais fait pipi dans un violon que ça aurait été pareil.

Je. Déteste. Les. Enfants.

C'est définitif !

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant