Chapitre 30 - Retard, blâme et fausse excuse.

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Je fais grève. Sans préavis, sans rien. Aujourd'hui je ne me lève pas. Mon grand-père m'a souvent dit que la vie était faite de choix et de conséquences, donc j'assume parfaitement le fait de ne pas aller au travail aujourd'hui.

Je vais faire ça. M'enrouler comme un burrito sous ma couette et attendre que le temps passe jusqu'à ce que « Motivation » vienne me trouver.

— Philippine, murmure une voix qui me paraît bien lointaine.

Philippine n'est pas là, veuillez laisser un message.

— Philippine, levez-vous.

Non.

— Vous allez être en retard.

Et alors ?

D'ailleurs, pourquoi est-ce que j'ai l'impression d'entendre la voix d'Olivier dans ma chambre ?

Ne me dites pas que...

Sortant la tête de dessous ma couette, je le vois tout près, tout habillé de son costume trop bien taillé, se tenant juste-là, au pied de mon lit, les mains sur les hanches et le regard sévère.

Un hurlement m'échappe tandis que je m'empresse de me recouvrir.

— C'EST DE LA VIOLATION DE PROPRIÉTÉ PRIVÉE ! SORTEZ D'ICI !

— Dit celle qui est venue poser sa pêche chez moi. Philippine, sortez de là.

— Vous, sortez de là ! fais-je sous la couette en essayant de le pousser des abords de mon lit. Vous n'avez rien à faire ici !

— Le retard peut vous coûter très cher.

— Pour être en retard, il faudrait que je me lève déjà et je n'en ai pas la moindre attention. Franchement, après ce que j'ai fait pour vous, vous devriez m'être un peu plus reconnaissant. Accordez-moi une journée.

— Vous allez sortir de là, à la fin.

Je le sens saisir ma couette et la tirer de son côté. Merde, merde, merde. Vite, retiens-la. Technique de coincer le drap entre les cuisses !

— C'est n'importe quoi, lâchez cette couette ! Je suis venu exprès vous chercher.

— Trop gentil, mais je ne vous ai rien demandé ! Je suis malade.

Tant bien que mal, j'essaye de mimer une fausse toux pour préserver mon intimité matinale. Hors de question qu'il me voit dans cet état-là.

— Mentir, c'est mal !

— Entrer chez les gens, c'est mal !

— Vous n'aviez qu'à pas faire un trou béant entre nos deux appartements.

— Encore cette histoire de trou ! Je vous l'ai déjà dit : rebouchez-le.

— J'estime que ce n'est pas à moi de le faire. Lâchez, maintenant. J'ai déjà la bonté de vous servir de réveil alors...

— Les réveils n'agressent pas les gens.

— Je ne vous agresse pas, je vous ai réveillée en douceur.

— En douceur ? Vous m'avez pratiquement traumatisée en vous pointant jusque dans ma chambre ! Elle est où la douceur, là-dedans ? Et puis n'insistez pas, je ne sortirai pas de là-dessous.

— Très bien. Comme vous voulez.

Soudain, je le sens lâcher prise et je ne peux qu'être fière de moi.

Ah ! Ah ! La femme n'est décidément pas le sexe faible, mon cher.

— Vous l'aurez cherché.

Je sens ses deux mains me passer sous le dos pour me saisir, moi, le burrito que je suis, avant de m'emmener dans mon salon.

— C'est de la triche.

— Je m'en fiche. Vous pouvez rester à faire le nem et aller au travail dans cette tenue, mais je ne vous donne pas dix secondes. Donc soit vous allez vous habiller, soit je vous mets dans mon coffre de cette façon.

— Je suis en shorty, il est hors de question que je sorte de chez moi ainsi.

— Dans ce cas, je prends cela pour une réponse.

— Quoi ? Non !

Avant même que je ne lui laisse la moindre chance de m'attraper, je tente de m'enfuir avant de me prendre les pieds dans ma couette.

Magnifique, Philippine. Continue comme ça et fais-toi mal.

— Attention.

Manquant de m'effondrer au sol dans les règles de l'art, Olivier se jette sur ma moquette et me sert de matelas d'atterrissage.

— Je savais que vous et moi on finirait l'un sur l'autre, mais je n'imaginais pas dans ce genre de circonstances là, flirte-t-il en riant.

— Et ça vous fait rire... D'ailleurs, vous et moi, on ne finira jamais dans un quelconque genre de position ! J'ai des valeurs moi, Monsieur, et il est hors de question que je m'abaisse à ça.

— À quoi ? À mon niveau ? Ah ouais ?

D'un mouvement habile, Olivier retourne nos positions, me plaquant au sol, ses mains encadrant mon visage de part et d'autre.

— Alors, Philippine ? Que comptez-vous faire maintenant ? Vous ne pouvez pas vous enfuir ?

— Non, mais j'ai mon genou extrêmement bien placé. Si j'étais vous, je réfléchirais à deux fois avant de faire quelque chose de stupide.

Il penche sa tête pour regarder tandis que son entrejambe est à la limite de frôler mon genou droit.

Vas-y, fais encore le malin et crois-moi, tu peux dire adieu un ton désir d'avoir une descendance.

— Vous n'oseriez pas.

— Vous voulez prendre le pari ? J'ai cru entendre que vous aimiez ça.

Malgré tout, aucun de nos deux corps ne se meut. On se contente tout simplement de rester là. À quelques centimètres l'un de l'autre. Pratiquement l'un contre l'autre.

— Vous savez quoi ? Vous avez raison.

Sur quel point ?

— J'aime bien trop les paris.

Et avant même que je ne puisse avoir le temps de faire quoi que ce soit, sa main vient glisser derrière ma nuque et ses lèvres viennent trouver les miennes sans rencontrer la moindre résistance de ma part.

— Désolée, mais chez moi, c'est moi qui décide.

D'un tacle vicieux, j'inverse nos positions, reprenant le dessus sur lui tandis que ma main vient trouver les premiers boutons de sa chemise à présent toute froissée.

— Je présume que nous serons tous les deux en retard alors, rit-il en s'empressant de m'enlever mon débardeur.

— Quel patron peu respectueux des règles ! C'est incroyable.

— Au diable les règles, j'ai une employée qui ne joue pas équitablement.

— Je vous l'ai dit, je suis bien meilleure que vous.

Parce qu'une partie de jambes en l'air vaut bien un blâme. 

Philippine - Tome 1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant